Leurs années se poussent successivement comme des flots : ils ne cessent de s’écouler, tant qu’enfin, après avoir fait un peu plus de bruit et traversé un peu plus de pays les uns que les autres, ils vont tous ensemble se confondre dans un abîme où l’on ne reconnaît plus ni princes, ni rois, ni toutes ces autres qualités superbes qui distinguent les hommes ; de même que ces fleuves tant vantés demeurent sans nom et sans gloire, mêlés dans l’Océan avec les rivières les plus inconnues… Mais voyons ce dernier combat1, en nous affermissant toutefois, pour ne point déshonorer par nos larmes une si belle victoire. […] Ceux qui trouvent que les animaux ont de la raison, parce qu’ils prennent pour se nourrir et se bien porter les moyens convenables, devraient dire aussi que c’est par raisonnement que se fait la digestion… Toute la nature est pleine de convenances et disconvenances, de proportions et disproportions, selon lesquelles les choses, ou s’ajustent ensemble, ou se repoussent l’une l’autre : ce qui montre, à la vérité, que tout est fait par intelligence, mais non pas que tout soit intelligent.