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55. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre XI. Grands poèmes. »

Par exemple, Boileau, dans le dernier chant de son Art poétique, interrompt la série de préceptes qui constitue l’art qu’il enseigne, pour introduire le tableau des bienfaits de la poésie, qu’il raconte en ces termes : Avant que la raison, s’expliquant par la voix, Eût instruit les humains, eût enseigné des lois, Tous les hommes suivaient la grossière nature ; Dispersés dans les bois, couraient à la pâture ; La force tenait lieu de droit et d’équité ; Le meurtre s’exerçait avec impunité. […] Ainsi Voltaire, imitant Virgile, le Tasse et Milton, a commencé sa Henriade par ces mots : Je chante ce héros qui régna sur la France, Et par droit de conquête et par droit de naissance ; Qui par de longs malheurs apprit à gouverner, Calma les factions, sut vaincre et pardonner, Confondit et Mayenne, et la Ligue et l’Ibère, Et fut de ses sujets le vainqueur et le père. […] Après l’invocation, le poète commence d’un ton soutenu, comme : Valois régnait encore, et ses mains incertaines De l’État ébranlé laissaient flotter les rênes ; Les lois étaient sans force et les droits confondus, Ou plutôt, en effet, Valois ne régnait plus.

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