/ 204
124. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

C’est un art très sérieux, qui est destiné à instruire, à gouverner les passions, à corriger les mœurs, à soutenir les lois, à diriger les délibérations publiques, à rendre les hommes bons et heureux. […] Si je voulais prouver que les méchants ne peuvent être heureux, j’examinerais la destinée de tous ceux qui se sont signalés par des crimes ; je prendrais surtout mes preuves dans les conditions les plus fortunées en apparence ; je montrerais Tibère, ce tyran cruel et subtil, avouant lui-même que ses forfaits sont devenus pour lui un supplice, faisant retentir de ses cris les antres de Caprée, et cherchant en vain dans son infâme solitude un remède à ses tourments ; je citerais Néron, le meurtrier de son frère, de sa mère, de ses femmes, de ses maîtres, l’auteur de tant de crimes, livré à d’éternelles horreurs, dans des transes qui vont jusqu’à l’aliénation d’esprit, croyant apercevoir les enfers entrouverts sous ses pas et les Furies qui le poursuivent, ne sachant comment échapper à leurs flambeaux vengeurs, et cherchant moins des amusements que des distractions dans ses fêtes somptueuses et insensées ; je parcourrais l’histoire de cette foule de scélérats qui, au comble de la grandeur et de la puissance, n’ont pu trouver le bonheur ; et de tous ces exemples, je conclurais que le bonheur n’est point fait pour les méchants. […] -C., démêlez-vous de cette paille destinée au feu. […] il met dans le sénat un pied téméraire ; il a part aux secrets de l’État ; il marque, il destine de l’œil chacun de nous à la mort ! […] Il doit être lu non seulement par ceux qui se destinent à la chaire, mais par quiconque veut parler pour prouver et pour convaincre.

/ 204