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103. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Guizot. Né en 1787. » pp. 469-478

Il savait croire fermement à sa propre pensée, et agir résolûment selon ce qu’il pensait, sans craindre la responsabilité. […] Incurable paresse de l’esprit humain, qui veut toujours se croire au terme et s’y reposer ! […] Sans doute, il portait sur les droits et les intérêts de l’Angleterre un jugement bien moins pur, bien moins juste que Falkland et Hampden1 ; cependant il ne faut pas croire que tout fût erreur dans sa pensée politique : bien des choses, et de très-importantes, le frappaient, qui échappaient à ses rivaux ; il connaissait des besoins publics, des conditions de liberté publique dont Hollis et Pym2 avaient tort de ne point tenir compte ; il prévoyait, au train de la révolution, mille conséquences dont ils ne voulaient pas plus que lui, mais qu’ils ne savaient point démêler. […] Dans les plus mauvais jours, quand il avait à se défendre de sa propre tristesse, il disait : « Je ne puis pas ne pas espérer et croire que le bon sens du peuple prévaudra à la fin sur ses préjugés… Je ne saurais penser que la Providence ait tant fait pour rien… Le grand souverain de l’univers nous a conduits trop longtemps et trop loin sur la route du bonheur et de la gloire, pour nous abandonner au milieu. Par notre folie et notre mauvaise conduite, nous pouvons de temps en temps nous égarer ; mais j’ai cette confiance qu’il reste en nous assez de bon sens et assez de vertu pour que nous rentrions dans le droit chemin avant d’être entièrement perdus. » Et plus tard, lorsque de cette France, qui l’avait si bien soutenu pendant la guerre, lui arrivent, pendant sa présidence, des embarras et des périls plus redoutables que la guerre, lorsque l’Europe bouleversée pèse sur lui comme l’Amérique, et étonne son esprit, il sait croire et se confier encore.

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