De là, le caprice qui conduit vers elles une curiosité trop prompte à fêter ce qui paraît neuf. […] Lorsque Joachim Du Bellay, défiant les anciens et les modernes, convia les descendants de Brennus à l’escalade du Capitole et au pillage de Delphes, ce cri de guerre ne fut que trop entendu ; car ces conquérants se conduisirent en barbares. […] Ses erreurs mêmes recouvrent parfois des instincts clairvoyants, et, si la science n’a pas grand-chose à démêler avec ses conjectures, il n’en faut pas moins regarder comme un service rendu cet appel qui anima la curiosité des intelligences, et les conduisit vers des sources trop oubliées. […] L’usage a préféré par consequent à par conséquence, et en conséquence à en conséquent, travailler à ouvrer, conduire à duire, faire du bruit à bruire, injurier à vilainer, piquer à poindre ; et dans les noms, pensées à pensers, un si beau mot et dont le vers se trouvait si bien, grandes actions à prouesses, louanges à loz, méchanceté à mauvaistié, porte à huis, navire à nef, armée à ost, monastère à moutier, prairies à prées, … tous mots qui pouvaient durer ensemble d’une égale beauté, et rendre une langue plus abondante… Si nos ancêtres ont mieux écrit que nous, ou si nous l’emportons sur eux par le choix des mots, par le tour et l’expression, par la clarté et la brièveté du discours, c’est une question souvent agitée, toujours indécise. » Ce plaidoyer n’est point une boutade, et l’usage lui a même donné raison, puisqu’il a repris plusieurs des mots cités par Labruyère comme ayant alors disparu.