Chapitre XV.
Une femme peut être bonne, etc.] « Les poëtes, dans la peinture des
mœurs de la vieillesse, font reconnoître la foiblesse de l’âge, et celle du
sexe dans la peinture des mœurs des femmes : elles sont moins propres
que les hommes, soit à cause de la délicatesse des fibres, soit à cause de
la frivole éducation qu’on leur donne, à soutenir des inclinations fortes et
égales. C’est apparemment ce qu’a entendu Aristote quand il a dit dans sa
Poétique que
L. Racine
paraît avoir deviné ce qu’Aristote lui-même écrit dans un passage de ses
Problèmes (XXIX, 11) où il appelle la femme un être inférieur (πολὺ ἦττον)
et plus faible (ἀσθενέστερον) que l’homme. Cf. Morale Nicom., VIII, 13, où
il fonde sur des considérations analogues la supériorité de l’homme dans le
mariage. Voy. encore : Hist. des Animaux, IX, 1 Politique, 1, 2
et 6 Économique, 1, 3 Rhétorique, II, 23. Du reste, la pensée
d’Aristote sur ce sujet n’est guère que celle de presque toute l’antiquité
païenne voyez Strabon, Géographie, III, 4, § 18 Philon le
Juif, Sur l’Immutabilité de Dieu, ch. xxv. On sait
de quelle manière Périclès s’adresse aux femmes d’Athènes dans l’oraison
funèbre que lui prête Thucydide (II, 45), et, huit siècles plus tard, le
rhéteur Ménandre, donnant des règles sur la manière de consoler dans une
oraison funèbre, dit qu’il faut parler différemment aux hommes, aux enfants
et aux fem
mes, et que, pour ces dernières, il faut avoir soin
d’abord « les femmes sont communément plus mauvaises que les
hommes »
. Il n’y a pas d’apparence qu’un aussi grand philosophe ait voulu
dire qu’elles sont communément plus vicieuses que vertueuses. » (L.
Racine, Réflexions sur la poésie, p. 203, éd. 1747.)« de relever un peu leur personnage par des éloges »
, ἵνα
μὴ πρὸς φαῦλον ϰαὶ εὐτελὲς διαλέγεσθαι δοϰῇς πρόσωπον
(Περὶ Ἐπιδειϰτιϰῶν, chap. ii, t. IX, p. 294 des Rhetores græci de Walz).
Il faut bien distinguer ces jugements sérieux des plaisanteries comiques
dont la tradition s’est perpétuée depuis le vieux poëte Simonide d’Amorgos
(poëme Sur les Femmes, dans les Lyrici varii de la collection de Boissonade,
et dans les Lyrici græci de Bergk) et l’école d’Aristophane jusqu’à Molière,
en passant par Érasme (Éloge de la Folie, chap. vii,
p. 33, éd. 1777, dont Molière semblait se souvenir en écrivant les
vers, passés en proverbe, du Dépit amoureux, acte IV, scène ii). Surtout il ne faut pas croire que les philosophes anciens
aient toujours, et en tout point, méconnu la dignité morale de la femme.
Aristote, à lui seul, nous offre beaucoup de belles observations sur ce
sujet par exemple, dans sa Morale à Nicomaque, VIII, 9, une admirable
analyse de l’amour maternel. Xénophon, dans le dialogue socratique intitulé
l’Économique, nous représente avec une délicatesse charmante le rôle de la
femme dans le ménage d’un riche campagnard Athénien.
La convenance.] Même précepte dans Horace, Art Poétique, v. 114 et suiv. On a souvent induit de ces ressemblances, qu’Horace lisait et imitait l’ouvrage d’Aristote rien n’est moins démontré. La plupart des imitations d’Horace portent sur des préceptes qui devaient se trouver à peu près dans toutes les Poétiques. D’ailleurs, un scholiaste du poëte latin, Porphyrion, nous apprend qu’il avait surtout puisé dans la Poétique de Néoptolème de Parium.
L’Oreste d’Euripide.] L’auteur de l’Argument grec sur cette pièce, la déclare δρᾶμα τῶν ἐπὶ σϰηνῆς εὐδοϰιμούντων, χείριστον δὲ τοῖς ἤθεσιν πλὴν γὰρ Πυλάδου πάντες φαῦλοι ἦσαν.
Scylla.] Voyez Welcker, livre cité, p. 527.
Ménalippe.] Voyez ibid., p. 846.
Iphigénie à Aulis.] Voy. v. 1200 et suiv., puis v. 1398 et suiv.,
1530 et suiv. — Ici, comme dans son immortelle tragédie, Racine
traduit ἐν Α ὐλίδι par « en Aulide ». De
Norville
avait déjà traduit, avec plus d’exactitude, « à Aulis ». Il s’agit
en effet d’une ville, non d’un pays. — « Aristote, et
d’autres après lui (L. Racine, A. W. Schlegel, etc.), ont blâmé comme une
inconséquence de caractère ce passage de la faiblesse à l’héroïsme. Malgré
l’autorité d’un tel critique et de ceux qui l’ont suivi, je crois que ces
mouvements d’une âme qui cède d’abord à la douleur et se roidit ensuite
contre elle, sont conformes à la nature, conformes à l’esprit du théâtre
grec, qui en avait fait le sujet et la leçon de la tragédie. »
(M.
Patin, Études sur les Tragiques grecs, t. II, p. 301, Examen de
l’Iphigénie à Aulis.) Comparez la Harpe, Analyse de la Poétique.
Dans la Médée.] L’auteur d’un argument grec de cette pièce, qui contient des observations intéressantes, cite Aristote ἐν ϓπομνήμασι. C’est la troisième fois que nous remarquons ces rapports entre les Arguments des pièces grecques et des textes d’Aristote ils indiquent évidemment des emprunts, mais des emprunts dont on ne peut aujourd’hui apprécier l’étendue et l’importance.
Le départ proposé par Agamemnon.] Voyez la note d’Alexandre d’Aphrodise sur les Réfutations sophistiques, ch. iv, où Aristote fait allusion au même texte d’Homère.
Comme des modèles, etc.] « Ainsi, le poëte, en représentant un homme
colère ou un homme patient, ou de quelque autre caractère que ce puisse
être, doit non-seulement les représenter tels qu’ils étaient, mais il les
doit représenter dans un tel degré d’excellence, qu’ils puissent servir de
modèle ou de colère, ou de douceur ou d’autre chose. »
(Trad. de
Racine.) — « « Ce qui est rare et parfait en son espèce, ne
peut manquer d’attirer l’attention. Ainsi, il faut toujours peindre les
caractères dans un degré élevé, rien de médiocre, ni vertus, ni vices…. Les
vices ont aussi leur perfection. Un demi-tyran serait indigne d’être
regardé mais l’ambition, la cruauté, la perfidie, poussées à leur
plus haut point, deviennent de grands objets. La tragédie demande encore
qu’on les rende, autant qu’il est possible, de beaux objets. Il y a un art
d’embellir les vices et de leur donner un air de
noblesse et
d’élévation. »
(Fontenelle, Réflexions sur la Poétique, §xvi, xvii.) Le texte est ici très-douteux.
De rudesse.] Σϰληρότητος. Twining propose ingénieusement, mais sans nécessité, de lire ici ἁπλότητος, et il compare avec ce passage la Rhétorique, I, 9, et le vers 926 (917, éd. Boissonade) de l’Iphigénie à Aulis. Cf. Iliade, IX, 308.
Voilà ce qu’il faut, etc.] « Le poëte doit observer toutes ces choses et
prendre garde surtout de ne rien faire qui choque les sens qui jugent de la
poésie, c’est-à-dire les oreilles et les yeux : car il y a plusieurs
manières de les choquer, j’en ai parlé dans d’autres discours où je traite
de cette matière. »
(Trad. de Racine.) C’est aussi le sens adopté par
Dacier, qui rapproche de ce passage Horace, Art poétique, v. 179 et
suiv.
Résultant.] Παρά marque quelquefois la cause. Voy. Matthiæ, Gramm. gr., § 588. Hermann lit περί, et il pense qu’il s’agit de la danse et de la musique.
Ouvrages déjà publiés.] Ἐϰδεδομένοις. Expression consacrée en ce sens : Isocrate, A Philippe, § 35, et Sur l’Antidose, § 5 Philodème, Rhétorique, iv, col. 33, éd. Gros. Cf. Stahr, Aristotelia, ii, p. 238 et 263. Mais on ne sait pas à quel ouvrage se rapporte cette allusion.