Chapitre I.
Remarquez combien ces premières lignes rattachent naturellement la Poétique à la Rhétorique elles ont d’ailleurs beaucoup d’analogie avec les préambules d’autres ouvrages d’Aristote, par exemple avec ceux des Météorologiques et des petits traités qui suivent le Traité de l’âme.
Presque tous les genres de musique qui emploient la flûte.] Tῆς αὐlhτɩᵡῆς ἡ πlɛίστh s’explique très-bien par un passage d’Athénée, XIV, p. 618, où sont énumérées quatorze αὐλήσɛɩ; qui toutes accompagnent une danse mimique.
Trois différences.] Le Tasse part de ces trois différences marquées par Aristote, lorsque, dans son deuxième Discours sur l’Art poétique, il s’efforce de montrer, contre l’opinion▶ de quelques critiques ses contemporains, que le roman en vers appartient au même genre de poésie que l’épopée, et que par conséquent il doit se conformer aux mêmes lois, entre autres à la loi de l’unité.
Avec la voix.] Δɩὰ τῆς φωνῆς, leçon des manuscrits, que j’ai cru devoir conserver elle offre un sens raisonnable dès qu’on traduit σχήματα par les gestes. Cf. Morale Nicom. III, 13 : Οἱ χαίροντɛς τοῐς δɩα τῆς ὄψɛως , οἴον χρώμασɩ χαì σχήματɩ ϰαì γραφῆ; Rhétorique, II, 8 : σχήμασɩ ϰαì φωναῖς ϰαì ὲσθῆτɩ. — En lisant δɩ’ ὰμφοῖν au lieu de δɩα τῆς φωνῆς,, comme ont fait la plupart des éditeurs, et en traduisant σχήματα par le trait, on obtient une symétrie plus satisfaisante entre les deux termes de la comparaison marquée par les mots ᾥσπβρ — οὒτω. Peut-être aussi les mots ἔτɛροɩ δὲ δɩὲ τῆς φωνῆς sont-ils une annotation marginale qui aura passé dans le texte.
L’épopée n’emploie que la prose ou les vers.] Sur λόγοις ψɩλοῖς, voy. plus
bas, p. 71. « Aristote, dont les jugements sont des lois, dit
positivement que l’épopée peut être écrite en prose ou en
vers : et ce qu’il y a de remarquable, c’est qu’il donne au
vers homérique ou vers simple un nom qui le rapproche de la prose,
ψɩλομɛτρία, comme il dit de la prose poétique, ψɩλοί λόγοɩ. »
(Chateaubriand, Préface des Martyrs.)
Le rapprochement n’est
qu’ingénieux le grand écrivain n’a pas vu que ψɩλός, dans ψɩλομɛτρία,
au chap. II, indique seulement l’absence de tout accompagnement
musical. Chateaubriand cite ensuite un témoignage de Denys d’Halicarnasse,
qui ne prouve rien pour sa thèse il eût pu tirer de la Poétique
(chap. IX, etc.) d’autres observations plus décisives contre l’◀opinion
de ceux qui veulent que la poésie ne parle qu’en vers. — Ce qui
est remarquable ici, c’est qu’Aristote semble ne pas savoir que les poëmes
d’Homère aient jamais été chantés. Homère, cependant, ne connaît pas
d’autres poëtes que les aèdes ou chanteurs les rhapsodes étaient aussi des chanteurs or il y avait
encore des rhapsodes, et du temps d’Aristote, et longtemps après lui.
Xénarque.] Il y a eu un poëte de la moyenne comédie qui portait ce nom et
qu’il ne faut sans doute pas confondre avec Xénarque, fils de Sophron
ce dernier semble indiqué par Suidas, à l’article Σωτάδη:, comme ayant écrit
des ’Іωνɩϰοì λόγοɩ. Si ce rapprochement est juste, dès le fils de Sophron la
comédie syracusaine aurait admis l’usage du dialecte attique. Ce qui est
certain, c’est que Sopatros, poëte comique syracusain, que l’on place après
Rhinton, nous est connu par un assez long fragment en dialecte attique.
— Le Lexique de Photius, au mot ’Рηγίνους dit, en propres termes,
que Xénarque, « fils de Sophron le mimographe, »
avait joué les
Rhéginiens pour leur lâcheté.
Les dialogues Socratiques.] Athénée, XI, p. 505, cite un passage du traité d’Aristote Sur les Poëtes, où l’auteur faisait à peu près la même observation.
Homère et Empédocle.]
Plutarque, De la Manière d’entendre les poëtes,
chap. II : « Nous ne connaissons pas une fable sans poésie et
sans fiction. Les vers d’Empédocle et de Parménide, les Thériaques de
Nicandre et les Sentences de Théognis sont des discours qui empruntent
seulement à la poésie le ton sublime et le mètre, et, en quelque sorte, son
char pour ne pas marcher à pied. »
En composant une imitation.] Je suis la leçon des manuscrits. IIροἵοɩτο est une conjecture ingénieuse, mais inutile, de Hermann. Pour Aristote, l’essence de la poésie n’est pas seulement dans l’imitation, mais dans l’imitation du général on peut donc composer une imitation en vers qui ne soit pas de la poésie.
On ne l’appellera pas pour cela un poëte.] Οὒϰ ἤδη manque dans plusieurs
manuscrits. La leçon οὐχ ἤττον est encore moins autorisée : Batteux,
qui l’admet, traduit : « Mériterait-il moins le nom de
poëte ? »
Cela me semble bien contraire à la pensée d’Aristote.
Si, selon notre philosophe, on n’est pas poëte parce qu’on emploie le vers
héroïque ou le distique élégiaque, comment peut-il dire qu’on sera poëte
pour avoir amalgamé plusieurs espèces de mètres ?