(1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XV. Genre didactique en prose. »
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(1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XV. Genre didactique en prose. »

Chapitre XV.
Genre didactique en prose.

C’est moins un genre particulier qu’un genre collectif, qui renferme des ouvrages bien différents par la forme et par l’objet. Les ouvrages didactiques sont en général des ouvrages sérieux, où le jugement a plus de part que l’imagination, et qui ont pour but de communiquer directement des connaissances sous forme d’enseignement.

Ce genre n’a donc pas de bornes déterminées ; il peut comprendre tous les traités, réguliers ou non, sur la philosophie, sur la morale, sur les arts et les sciences ; tous les livres de théorie, les études et les descriptions de la nature, les livres d’éducation, etc. C’est le genre le plus vaste de tous, et celui par conséquent auquel on peut le moins imposer de règles, car celles qui s’appliqueraient à une espèce d’ouvrages ne conviendraient pas à d’autres. La Bruyère, dans ses Caractères, n’écrit pas comme Buffon ou comme Bernardin de Saint-Pierre dans leurs études de la nature ; Aristote ne ressemble pas à Platon.

Les règles, dans chaque ouvrage didactique, sont tracées à l’auteur parle sujet même ; c’est de son goût, de son jugement que dépendent la forme, le plan et le style convenables. Ce que nous avons dit sur l’art d’écrire en général, dans la première partie, peut trouver son application dans chaque genre. L’ordre, la clarté, la vérité, la justesse, telles sont les qualités essentielles à tout ouvrage dicté par la raison.

L’écueil le plus difficile à éviter dans un ouvrage didactique, c’est la sécheresse. Il faut donc, autant que possible, y semer la variété, chercher à rendre la science intéressante, et ne pas en bannir absolument l’imagination, si le sujet permet d’y jeter quelques fleurs. Le goût de l’écrivain doit le guider en cela.

Fontenelle, dans ses ouvrages scientifiques, nous montre souvent mal à propos le bel esprit ; mais on aime à voir Buffon orner de brillantes couleurs ses descriptions de la nature ; Chateaubriand, dans le Génie du Christianisme, animer de sa puissante imagination les preuves qu’il donne au sentiment religieux ; et Platon faire circuler dans ses dialogues philosophiques le souffle inspiré de la poésie35.