Ne pensez pas que ce grand acteur fut bas, trivial, et grimacier : fidèle imitateur de la nature, il en sût faire le plus beau choix ; il la montra toujours dans des positions heureuses et dans des jours avantageux ; il conserva la décence que le théatre exige dans les rôles même les moins susceptibles de graces et d’agrémens ; il ne fut jamais au dessous ni au dessus du personnage qu’il faisoit ; il saisissoit ce point juste d’imitation, que les comédiens manquent presque toujours : ce tact heureux qui caractérise le grand acteur et qui le conduit à la vérité, est un talent rare que M. […] Je vous laisse à penser, Monsieur, s’il est possible d’imaginer que de pareils fardeaux aient été crées pour la danse ; ajoutez encore l’attirail, le ventre, les mollets, les cuisses postiches et les échasses, et vous verrez qu’il n’est pas probable que cet accoûtrement ait été imaginé pour un art enfant de la liberté, qui craint les entraves d’une mode embarrassante, et qui cesse de se montrer dès qu’il cesse d’être libre. […] il y auroit de l’absurdité à le penser : ceux-ci auroient donc été des colosses, et les autres des pygmées. Voilà, Monsieur, le seul passage qui puisse faire penser que les pantomimes se servoient du masque ; mais dans les auteurs anciens, ni dans les auteurs modernes qui ont traité de cette matière, il n’en n’est aucun qui me convainque que ces figures colossales aient été enfantées pour la danse.
Ne pensez pas que ce grand Acteur soit bas, trivial & grimacier ; fidelle imitateur de la nature, il en sait faire le plus beau choix, il la montre toujours dans des positions heureuses & dans des jours avantageux ; il conserve la décence que le Théatre exige dans les Rôles même les moins susceptibles de graces & d’agréments ; il n’est jamais au-dessous ni au-dessus du Personnage qu’il fait ; il saisit ce point juste d’imitation que les Comédiens manquent presque toujours ; ce tact heureux qui caractérise le grand Acteur & qui le conduit à la vérité, est un talent rare que M. […] Tout Danseur qui altere ses traits par des efforts & dont le visage est sans cesse en convulsion, est un Danseur sans ame qui ne pense qu’à ses jambes, qui ignore les premiers éléments de son Art, qui ne s’attache qu’à la partie grossiere de la Danse & qui n’en a jamais senti l’esprit. […] Je vous laisse à penser, Monsieur, s’il est possible d’imaginer que de pareils fardeaux aient été créés pour la Danse ; ajoutez encore l’attirail, le ventre, les mollets, les cuisses postiches & les échasses, & vous verrez qu’il n’est pas probable que cet accoûtrement ait été imaginé par un Art enfant de la liberté, qui craint les entraves d’une mode embarrassante, & qui cesse de se montrer dès qu’il cesse d’être libre. […] Il y auroit de l’absurdité à le penser ; ceux-ci auroient donc été des colosses & les autres des pygmées.
On doit joindre à tous ces réglemens si unanimes des différens conciles que je viens de citer, celui du troisième concile de Milan, que j’ai rapporté plus haut en marquant ce que saint Charles a pensé des danses.
Cette académie devenant dailleurs plus nombreuse, se distingueroit peut-être davantage ; les efforts des provinciaux exciteroient les siens ; les danseurs qui y seroient agrégés, serviroient d’éguillon à ses principaux membres ; la vie tranquille de la province faciliteroit à ceux qui y sont répandus, les moyens de penser, de réflechir et d’écrire sur leur art ; ils adresseroient à la société des mémoires souvent instructifs ; l’académie, à son tour, seroit forcée d’y repondre ; et ce commerce littéraire en répandant sur nous un jour nouveau, nous tireroit peu à peu de notre langueur et de notre obscurité. […] Non, Monsieur, c’est une erreur que de penser qu’un bon maître de ballets puisse tracer et composer son ouvrage au coin de son feu.
Cette Académie devenant d’ailleurs plus nombreuse se distingueroit peut-être d’avantage ; les efforts des Provinciaux exciteroient les siens ; les Danseurs qui y seroient agrégés, serviroient d’aiguillon à ses principaux Membres ; la vie tranquille de la Province, faciliteroit à ceux qui y sont répandus les moyens de penser, de réfléchir & d’écrire sur leur Art ; ils adresseroient à la Société des Mémoires souvent instructifs ; l’Académie à son tour seroit forcée d’y répondre, & ce commerce littéraire en répandant sur nous un jour lumineux nous tireroit peu à peu de notre langueur & de notre obscurité. […] Je conviens, me repliquerez-vous peut-être, que le fameux Blondy lui-même interdisoit cette étude à ses Eleves ; mais avouez du moins que la chorégraphie est nécessaire aux Maîtres de Ballets : non, Monsieur, c’est une erreur que de penser qu’un bon Maître de Ballets puisse tracer & composer son ouvrage au coin de son feu.
Des pirouettes ; De la manière de les prendre ou préparer, de celle de les faire et de les filer ; des diverses positions ou attitudes que l’on peut avoir en tournant, et des différentes manières de les arrêter et de les terminer [1] C’est aux progrès étonnants de la danse moderne58 que nous devons les pirouettes ; nos anciens danseurs, ainsi que Noverre 59, ne les connaissaient point, et ils pensaient qu’il était impossible de surpasser les trois tours sur le cou-de-pied.
J’oserai dire encore que la surprenante Machine de Marly peut donner une idée & même une espece de preuve du mouvement harmonieux des Planetes ; laquelle auroit été encore plus sensible, si l’Inventeur de cette merveilleuse Machine, avoit pensé d’ajoûter à son mouvement des tuyaux d’orgue, qui auroient pû former un Jeu d’orgue hidraulique, comme on en voit en Italie ; ce qui est encore faisable, si le Roi vouloit rendre ce grand chef-d’œuvre plus digne d’admiration.
Les petits Musiciens se sont d’abord élevés contre ; plusieurs admirateurs du chant ancien, parce qu’ils n’en connaissaient point d’autre, ont été révoltés, en voyant adapter une partie des traits difficiles et brillants des Italiens, à une langue qu’on n’en croyait pas susceptible ; des gens d’un esprit étroit, que toutes les nouveautés alarment, et qui pensent orgueilleusement que l’étendue très bornée de leurs connaissances est le nec plus ultrà des efforts de l’art, ont tremblé pour le goût de la nation.
Dans cet état l’homme s’éclipse ; il ne pense point ; il rumine.