Plusieurs Princes et Grands Seigneurs, Dignes, certes, de tous honneurs, En ce Ballet galant dansèrent, Et, des mieux, le Roi secondèrent. […] Nos Reines, pleines d’un bon sens, Mais qui des plaisirs innocents, (Comme sages et débonnaires) Ne sont nullement adversaires, Malgré l’âpre et rude saison, Quittant Chambre, Alcove et tison, Furent, non seulement, icelles, Mais Monsieur et Mesdemoiselles,27 Assez volontiers sur le lieu, Pour audit Ballet dire adieu ; Ayant illec, pour assistance, Plusieurs Personnes d’importance, Princes, Ducs, Comtes et Marquis, Et quantité d’Objets exquis, C’est-à-dire de beaux Visages Bien dignes de vœux et d’hommages, Que je lorgnais par-ci, par-là, Étant en lieu propre à cela.
Il faut sçavoir d’abord, qu’il n’y a personne admis dans le Cercle, que les Princes & Princesses du Sang, ensuite les Ducs & Pairs, & les Duchesses : & après les autres Seigneurs & Dames de la Cour, chacun selon le rang qu’ils doivent occuper ; mais les Dames sont assises sur le devant, & les Seigneurs aussi assis derriere les Dames : quoique je les aye réprésenté debout ; mais c’est afin de donner moins de confusion à mes groupes de Figures, & les rendre plus distinctes. […] Sçavoir, Monseigneur & Madame la Dauphine, Monsieur & Madame ; ainsi des autres Princes & Seigneurs ; tous les Seigneurs sont d’un côté à la gauche, & les Dames à la droite : & dans ce même ordre on se fait la reverence l’un devant l’autre, ensuite Sa Majesté & sa Dame mene le branle, qui étoit la danse par où les Bals de la Cour se commençoient, tous les Seigneurs & Dames suivent leurs Majestez, chacun de leur côté, & à la fin du couplet, le Roy & la Reine se mettoient à la queuë, & celui & celle qui étoient derriere leurs Majestez menent le branle à leur tour ; ensuite se vont placer derriere le Roy & la Reine, & successivement des autres de deux en deux, jusqu’à ce que leurs Majestez soient revenus les premiers : après quoy ils dansent la Gavotte, qui se danse dans le même ordre du branle, qui est de se remettre à la queuë jusqu’à ce qu’ils soient revenus devant, & les branles finis on se fait de pareilles reverences en se quittant, que celles que l’on a fait avant de danser.
L’Histoire qui nous peint tous les grands Rois occupés sans cesse à cultiver, à honorer les arts, nous montre aussi tous les Princes médiocres74 tremblant toujours qu’on ne fasse trop en saveur des meilleurs Artistes. […] On sera sans doute surpris que j’ose le mettre au rang des Princes médiocres.
Jeudi, bien des Gens y coururent, Nos deux sages Reines y furent Environ vers la fin du jour, Avec une assez noble Cour, C’est-à-dire Mademoiselle, Sa Soeur d’Alençon avec elle, Et plusieurs Princes, mêmement, Tant Princes du Sang, qu’autrement.
Loret, lettre du 6 octobre 1663 […] Vers le milieu de la semaine On Dansa, dit-on, à Vincennes, Au grand appartement Royal, Un petit Ballet jovial, Qui d’une Noce de Village Était la Peinture, ou l’Image, Qui fut des mieux exécuté, Et dont était Sa Majesté, Plusieurs Seigneurs et quelques Princes, Et d’autres Gens un peu plus minces.
Mécène fit sentir à Auguste le besoin qu’il avoit d’eux ; ce prince les combla de récompenses et de distinctions. Les arts sensibles, et reconnoissants effacèrent le souvenir de tous ses crimes ; le vainqueur d’Actium, le tyran de Rome et le fléau des Romains dût la gloire de son règne à l’acceuil, et à la protection qu’il accorda aux arts, et par un heureux échange les hommes de génie firent oublier ses cruautés : sans eux la mémoire d’Auguste eût été confondüe avec celle des Tarquin, des Catilina et des Sylla ; mais telle est la puissance des arts, tel est l’empire du Génie, qu’ils consacrèrent le nom d’Auguste dans les fastes de l’immortalité, qu’ils le rendirent cher à sa patrie, qu’il avoit désolée, et qu’enfin son nom est devenu le titre le plus illustre, que l’on puisse donner aux Princes, éclairés, et bienfaisants. […] Le peuple s’amusant sans cesse des intrigues du théâtre ne s’inquiétoit en aucune manière des affaires du gouvernement, et les acteurs pantomines étoient sans le savoir des instrumens utiles à la tranquillité du prince ; aussi reçurent-ils de cet Empereur, des priviléges, des distinctions honorables et des récompenses. […] Pylade parut, fut applaudi avec transport ; et le peuple et les grands ne cessèrent de bénir un prince, qui leur avoit rendu l’âme de leurs plaisirs.
L’ambition et la jalousie qui rendent les Princes irréconciliables, obligeaient ceux-ci à avoir continuellement les armes à la main. […] Après bien des combinaisons, ils auront préféré la musique, cet art cosmopolite, qui ouvroit à leurs malheureux rejettons un asyle dans les grands chapitres, dans les riches abbayes, dont la plupart sont autant de souverainetés indépendantes ; et enfin chez tous les Princes de l’Allemagne, qui, jaloux de soutenir leur dignité et de varier leurs jouissances, ont appellé chez eux les arts et les talens, et fait principalement de la musique, le premier objet de leur luxe.
Cette action allarma encore M. de N … mais le mal n’alla pas plus loin, par la prudence du Roi, qui calma le ressentiment des Princes & des Princesses, du refus de l’entrée du bal ; desorte qu’ils sortirent sans se faire connoître, après avoir dansé autant qu’ils le voulurent. […] Ces exemples font assez connoître qu’il est de la prudence des Princes & des grands Seigneurs de ne point sortir de leur caractere dans leurs divertissemens. […] Mais l’on peut dire que la magnificence des bals masquez n’a jamais paru plus superbe que sous le régne de Louis XIV. où le luxe semble avoir monté au suprême dégré : c’est pourquoi, sans parler de ceux qu’on a vû à Versailles, à Marly, au Palais Royal & à Sceaux ; nous avons vû aussi des Princes Etrangers & des Ambassadeurs donner des bals masquez qui coutoient jusqu’à dix ou douze mille écus : témoin ceux que le Prince Emanuel de Portugal a donnez au Public au mois de Juin 1715, à l’Hôtel de Bretonvilliers, dans l’Isle, avec un feu d’artifice sur la riviere : l’on y vit encore trois piramides de feu, dressées dans le jardin, dont la nouveauté surprit tous les masques. […] Je finirai l’histoire de la Danse par une singularité que nous rapporte encore l’Espion de la Cour des Princes.