/ 241
50. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 5 février. Les périls du music-hall. »

Elle tourne, bercée par la valse du Danube ; ses beaux bras accompagnent le tournoiement du corps et quand tout à coup elle laisse aller le poignet en ouvrant la main, elle n’est plus que la petite vague fraîche qui vient se briser au rivage de la rampe. […] La traîne de la robe jaune se déroule en volutes magnifiques, les bras ondulent provocants, les talons scandent le rythme avec justesse… Et cependant tout cela apparaît stérile ; inutile beauté ! Le génie de la race est absent de cette copie consciencieuse ; et en regardant faire Mlle Duval, je ne peux m’empêcher de songer à d’autres sourires et d’autres cambrures, à des bras qui s’ouvrent lentement, en un mouvement décomposé en dix temps, et qui vous fascine, à des pieds qui font vibrer le plateau comme le bois d’une guitare et qui, se posant sur une cape, en font un « reliquaire »… Danseuses, méfiez-vous de vous mêler aux « cosas de España » !

51. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Iphigenie en Tauride. Ballet tragique » pp. 235-256

Pylade, qui arrive avec les siens et qui poignarde Thoas, au moment que le Tyran lève le bras pour frapper Oreste, fait renaître le calme et la joie ; et par une transition subite et naturelle, on se livre aux expressions délicieuses de l’amitié et de la reconnoissance. Eumène court dans les bras de son père ; Oreste se jette dans ceux de son ami et ne les quitte que pour voler dans ceux de sa sœur. […] Sa lampe s’éteint ; il court, il s’agite, la frayeur s’empare de ses sens ; il se jette à genoux, lève ses bras tremblans vers le ciel et implore sa clemence : il veut se relever ; mais ses jambes ne peuvent supporter le poids de son corps ; il tombe, il appelle et l’on vient à son secours. […] A ce nom si cher, Iphigénie laisse tomber le glaive homicide, elle recule de surprise, d’étonnement et de joie, et se jette avec transport dans les bras de son frère. […] Isménie accourt, l’arrête, et, en embrassant ses genoux, détourne pour un instant les coups, qu’il veut porter ; il jette sur elle des regards épouvantables, il veut en faire sa première victime ; Iphigénie lui arrête le bras ; mais n’écoutant que l’excès de sa rage, il s’élance de nouveau sur Oreste, et le traîne à l’autel malgré les efforts des Prêtresses secondées d Iphigénie ; il lève le bras pour lui porter le coup mortel.

52. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Enée et Didon. Ballet tragique. » pp. 135-147

Jarbe, enivré d’amour et dévoré de jalousie, court à la vengeance, cherche son rival, et le surprend dans les bras de Didon, rien ne peut arrêter sa rage et son désespoir. […] Didon, attentive à la conservation des jours de son amant, vole au milieu des coups ; tantôt elle arrête le bras d’Enée ; tantôt elle pare de son bouclier le coup que son adversaire lui portoit. […] Enée, vivement attendri, se jette dans les bras de Didon ; il lui fait les plus tendres adieux. Cette Reine ne pouvant supporter sans frémir l’idée du départ de son amant, tombe sans connoissance dans les bras de ses femmes. […] Les amis de ce héros, attachés à sa gloire, l’arrachent des bras de Didon et l’entraînent sur son vaisseau.

53. (1725) Le maître à danser [graphies originales] « Le maître a danser. premiere partie — Chapitre XXXIII. Des Balancez. » pp. 153-155

Le Balancé est un pas qui se fait en place comme le Piroüetté, mais il se fait ordinairement en presence, quoiqu’il se puisse faire aussi en tournant ; mais comme ce n’est que le corps qui se tourne, & que cela ne change aucun mouvement ; c’est pourquoi je vais décrire la maniere de le faire en presence : je dirai d’abord qu’il est composé de deux demi-coupez, dont l’un se fait en avant & l’autre en arriere ; Sçavoir, en commençant vous pliez à la premiere position, & vous le portez à la quatriéme en vous élevant dessus la pointe, puis vous posez le talon à terre, & la jambe qui est en l’air s’étant aprochée de celle qui est devant, & sur laquelle vous vous estes élevé, étant en l’air vous pliez sur celle qui a fait ce premier pas, & l’autre étant plié se porte en arriere à la quatriéme position, & vous vous élevez dessus ce qui finit ce pas ; mais en faisant ce pas au premier demi-coupé l’épaule s’efface, & la tête fait un petit mouvement ; ce qui donne l’agrément à ce pas, & que j’expliqueray avec la maniere de conduire les bras dans la seconde Partie. J’ai vû plusieurs personnes le porter à côté à la deuxiéme position, mais il ne m’ont pas paru avoir la même grace ; parce qu’il paroît que le corps se dandine : outre que les mouvemens qui se doivent faire de la tête & des bras ne sont pas si avantageux ; pour ceux qui se font en tournant, c’est la maniere de plier & de s’élever, en se contenant dans la proportion du pas & la position du pied, afin que le corps se conserve dans son équilibre, d’autant que tous les pas qui se font en tournant sont d’une plus difficile execution que ceux qui se font en avant.

54. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Adèle de Ponthieu. Ballet tragi-héroïque, en quatre actes. » pp. 109-120

Après cette cérémonie, qui étoit pour les chevaliers l’engagement le plus saint, Renaud s’approche de sa fille, pour lui ordonner de confirmer le don qu’il vient de faire de sa main ; mais au moment qu’Alphonse se dispose à recevoir sa promesse, Adèle tombe évanouie dans les bras de son père. […] Celui-ci se jette dans les bras de Renaud et le supplie de lui accorder le grade de chevalier. […] Adèle le rend surtout intéressant : soutenue dans les bras de son père, et les yeux élevés vers le ciel, elle fait des vœux pour son amant : tout le peuple en fait pour elle. […] Les acclamations du peuple, un cri perçant d’Adèle qui tombe mourante dans les bras de son père, rallument le courage et la fureur de Raymond. […] Elle revoit la lumière et son amant ; elle se jette dans ses bras pour n’en sortir jamais.

55. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — La Descente d’Orphée aux Enfers. Ballet héroï-pantomime. » pp. 215-224

La décoration représente un bras de l’Achéron ; de l’autre coté de ce fleuve on apperçoit les portes de l’Enfer, et des rochers dont les extrémités lancent des flammes : Caron est assis sur la proüe de sa barque. […] Orphée revoit sa chere Euridice, tombe à ses pieds et la reçoit dans ses bras. […] Dans cet instant des démons, conduits par les furies, s’élancent sur elle et l’arrachent des bras de son époux ; l’Amour lui prête de l’énergie et du courage : elle lutte contre ces monstres. Orphée animé des mêmes sentimens, se réunit à Euridice : par un nouvel effort les démons séparent ces deux époux pour la seconde fois ; mais animés du désir de se rejoindre, ils se dégagent de leurs bras, et volent l’un à l’autre. Les furies irritées de cette résistance parviennent enfin à arracher Euridice des bras d’Orphée, tandis que celui-ci est enveloppé par les démons.

56. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Appendice à l’ouvrage — Traduction des passages italiens parsemés dans cet ouvrage » pp. 115-118

C’est pour cela qu’Ovide donne aux bras d’une danseuse l’épithète de Nombreux, au lieu d’Harmonieux. « Cette danseuse séduit par ses gestes, elle meut avec justesse ses bras nombreux : en inclinant avec un art enchanteur et tournant avec souplesse son beau corps. » (Métastase, Considérations sur l’art poétique d’Aristote.) […] La fossette du cou doit perpendiculairement correspondre au pied ; si on place un bras en avant, elle sort de sa perpendiculaire sur les pieds ; si une jambe se porte en arrière, la fossette est placée en avant, et elle change ainsi selon les diverses positions. […] — La nature enseigne et agit d’elle-même, sans qu’on ait besoin de raisonnement ; de sorte que celui qui veut sauter, élève avec vitesse les bras et les épaules qui se mettent simultanément en mouvement avec une partie du corps en raison de l’impulsion ; et ils se soutiennent élevés, tant que le mouvement est accompagné de celui du corps, dont les reins se courbent, et de l’élans qui se forme dans la jointure des cuisses, des genoux et des pieds, et cette extension se fait de deux sens ; c’est-à-dire en avant et en haut, alors le mouvement destiné à se porter en avant, place aussi le corps en avant au moment du saut, et celui qui le porte en haut l’élève, en lui faisant décrire un grand arc et rend le saut plus rapide.

57. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 2 juillet. Les adieux des Ballets russes. »

Mais ce qui distingue Karsavina, c’est la grâce suprême de ces ports de bras qui font d’une préparation à la pirouette, qui est une nécessité mécanique, une chose de beauté. […] Et comme les bras accompagnent harmonieusement les temps sautés en tournant !

/ 241