Rien ne rappelle dans ces fantoches l’insouciance riante de Pétrouchka : nous sommes — et on le sent douloureusement — à la veille d’une chose terrible ; un morne ennui pèse sur nous comme un ciel bas d’orage.
Sans doute, je constate avec vous que la conception scénique de ce ballet porte l’empreinte de la plus basse époque du siècle dit « stupide ».
C’est heureux que tu aies dit cela tout bas, on se serait moqué de nous. […] L’ami , bas à l’habitué.
On n’a qu’à substituer à leur place beaucoup de patience, un fond inépuisable d’intrigue, une âme bien basse, un front d’airain.
Elles pratiquent une attitude devant où la plante est maintenue parallèle au sol, une attitude derrière : genou ployé, le bas de la jambe ramené vers la cuisse.
Et cependant quand Ricaux survole comme un grand oiseau planant très bas sur la surface du plateau (car c’est l’envergure qu’il recherche et non la hauteur du saut), quand l’étoile, enveloppée dans une trombe de jetés en tournant et de déboulés, décrit autour de la scène le cercle magique du « manège », le public est ébloui, entraîné, puis conquis.
Maintes Cascades y jouaient, Qui de tous côtés l’égayaient ; Et, pour en gros ne rien ommettre Dans les limites de ma Lettre, En ce beau Rendez-vous des Jeux, Un Théâtre auguste et pompeux, D’une manière singulière, S’y voyait dressé pour MOLIÈRE, Le MOME cher et glorieux Du bas Olympe de nos Dieux.
En voici la raison ; la contraction des muscles dans les efforts du saut roidit les articulations, & force chaque partie à rentrer dans sa place & à revenir à sa forme naturelle ; les genoux ainsi forcés se portent donc en dedans, ils reprennent leur volume ; ce volume met un obstacle aux battemens de l’entrechat ; plus ces parties se joignent, plus celles qui leur sont inférieures s’éloignent ; les jambes ne pouvant ni battre ni croiser, restent comme immobiles au moment de l’action des genoux qui roulent désagréablement l’un sur l’autre, & l’entrechat n’étant ni coupé, ni battu, ni croisé par le bas, ne sauroit avoir la vîtesse & le brillant qui en font le mérite. […] Ils sont nerveux, vifs & brillants dans les choses qui tiennent plus de la force que de l’adresse ; nerveux & légers, attendu la direction de leurs faisceaux musculeux, & vu la consistance & la résistance de leurs ligaments articulaires ; vifs, parce qu’ils croisent plus du bas que du haut, & qu’ayant par cette raison peu de chemin à faire pour battre les temps, ils les passent avec plus de vîtesse ; brillants, parce que le jour perce entre les parties qui se croisent & se décroisent ; ce jour est exactement, Monsieur, le clair-obscur de la Danse, car si les temps de l’entrechat ne sont ni coupés ni battus, & qu’ils soient au contraire frottés & roulés l’un sur l’autre, il n’y aura point de clair qui fasse valoir les ombres, & les jambes trop réunies n’offriront qu’une masse indistincte & sans effet ; ils ont peu d’adresse, parce qu’ils comptent trop sur leurs forces, & que cette même force s’oppose en eux à la souplesse & à l’aisance : leur vigueur les abandonne-t-elle un instant ? […] La plupart d’entr’elles dansent les genoux ouverts comme si elles étoient naturellement arquées ; grace à cette mauvaise habitude & aux jupes, elles paroissent plus brillantes que les hommes, parce que, comme je l’ai dit, ne battant que du bas de la jambe, elles passent leurs temps avec plus de vîtesse que nous, qui ne dérobant rien au Spectateur sommes obligés de les battre tendus, & de les faire partir primordialement de la hanche, & vous comprenez qu’il faut plus de temps pour remuer un tout qu’une partie.