J’appris alors de Mlle Fiori qu’elle arrivait de Russie, où elle avait dansé quatre ans avec succès et profit. […] Il jugea nécessaire de m’apprendre à lire et à écrire, et de me faire changer mon patois contre la connaissance de la langue italienne ; mais là s’arrêtèrent mes leçons. Quand il vit que je prenais goût à la lecture et désirais former un peu mon esprit, il m’ôta les livres des mains en me disant : « Apprends que quiconque se consacre à la danse est réputé bête et que c’est justement là notre supériorité. […] Mon père m’emmène dans la loge, et répondant à mes questions, m’apprend que ce jeune duc est du Dauphiné, veuf depuis un an, habitant ses terres et de passage à……, où il ne connaissait que le propriétaire du théâtre, chez lequel il était descendu peu de jours auparavant.
Spon nous apprend encore dans sa Recherche curieuse de l’Antiquité, que l’art des Danseurs de corde est des plus anciens, & dont l’origine commença dès l’établissement des Foires de Ville en Ville, pour l’utilité du Commerce, & qu’ils dressoient leurs Théâtres dans les Places publiques, pour assembler le peuple, & pour servir de divertissement aux Marchands Forains. […] Archange Tuccaro Napolitain, Professeur en l’art Gymnastique, nous apprend que lorsque les Danseurs de corde commencerent à paroître chez les RomainsOrigine des premiers abus de la danse. […] Virgile nous apprend aussi qu’après que les Perses & les Romains eurent affoibli la grandeur des Grecs, qu’ils envoyerent leurs enfans en Toscane pour les former à tous les exercices du corps, où cette Nation excelloit autant que les Grecs l’avoient pû faire dans le tems de leur splendeur ; de même qu’aujourd’hui tous les grands Seigneurs de l’Europe viennent en France pour se perfectionner dans les exercices convenables à la Noblesse.
Ils verront en Xenophon qu’on honnora de danses & mascarades à l’arriuee des Capitaines de Cyrus : & en Macrobe que les enfans des Senateurs de Rome au sortir des escoles aloient apprendre à danser. […] Vn Philosophe me dit vn iour, que comme les paroles estoient les marques des conceptions de nostre ame, les escrits estoient aussi les images des paroles, que des choses s’enfantoient les paroles pour les communiquer aux presens, & des paroles les escrits, mais en consideration des absens & de nos posterieurs, ce qui n’est pas l’office des paroles, il m’apprit encores par des exemples & des raisons si palpables, qu’vn homme auec du sens commun n’en peut douter, que lors que l’intellect a bien compris la cognoissance des choses qui luy arriue par l’entremise des sens, il la peut heureusement esclarcir par le moyen de l’vn ou l’autre de ces deux instruments dont ie viens de parler, cela m’a tellement fortifié en l’opinion que i’en auois desia par experience, que i’ose maintenir, que quiconque a l’imagination plaine de quelque science, il se peut faire entendre ou de voix ou d’escrit, sinon à tous, pour le moins à ceux de sa profession. I’auouë bien que la danse a quelque chose de particulier qui l’annoblit & l’anime, comme vn certain air, ou vn maintien tantost graue, & tantost negligent qu’vne plume ne peut apprendre, mais qu’outre les pas on ne puisse encores enseigner les actions plus necessaires, qui donnent vn facile acheminement à ceste perfection, qui consiste à voir faire vn bon Maistre, sont des impossibilitez que ie feray voir imaginaires en ce traicté, duquel non seulement plusieurs qui se meslent d’enseigner, mais les Escoliers mesme peuuent tirer vn grand soulagement.
Les mouvements des jambes, comme l’apprend le chapitre précédent, doivent nécessairement participer de cet ensemble harmonieux.
Mais comme rien n’est plus capable de nous apprendre que de repeter souvent ce que nous voulons sçavoir ; c’est à cette occasion que j’exhorte sur tout cette illustre Jeunesse qui demeure dans les Academies & les Colleges de s’appliquer à bien faire ces reverences, plus exposée qu’elle est que par-tout ailleurs par les frequentes rencontres qu’elle fait, & qu’elle ne peut éviter en allant & venant, soit de leurs Maîtres ou de leurs Regents, qu’elle elle obligée indispensablement de saluer ou de leur rendre le salut.
Dieu qui vouloit apprendre aux filles de tous les siècles combien un tel désir est mauvais à ses yeux, et qu’on ne sauroit prendre trop de précautions contre une passion qu’il est facile d’exciter, mais très-difficile de réprimer, quand une fois elle est excitée, permit que Sichem conçût pour elle une passion sans mesure, et que Dina en fut la malheureuse victime. […] Si en chantant on n’articule aucune parole, les airs qui se jouent sur les instrumens rappellent souvent à l’esprit des chansons très-mauvaises qu’on a eu le malheur d’apprendre, et qu’on n’a pas oubliées ; et, supposé que, dans ce temps même de la danse, ni les chansons, ni le son des instrumens et des airs qu’on y joue, n’aient pas fait d’impression, peut-on nier que cela n’ait jeté dans le cœur une mauvaise semence qui, étant demeurée cachée pendant un temps, y germe, paroît au moment qu’on s’y attend le moins, et produit enfin des fruits de mort ?
Monsieur, tous ces génies rares n’avoient point appris la musique. […] avoient-ils appris à être éloquens à l’école de Lully et de Rameau ?
J’ai appris l’union de deux Amants dignes de vivre l’un pour l’autre, et j’ai senti pour la première fois, depuis mon malheur, quelque mouvement de joie.