Outre tant d’appas précieux Que j’y vis de mes propres yeux, Cinquante autres rares Parties De Masques des mieux assorties, Nobles Vénitiens, Danois, Turcs, Espagnols et Polonais, Et, quasi, de toutes Contrées Firent-là, leurs belles entrées. […] Certainement, je ne puis pas Dire tout par ordre et compas : Mais, ô mon Lecteur débonnaire, Seulement, pour te satisfaire, Je t’assure que ce soir-là, (Car on m’a confirmé cela) Des Masques, environ deux mille, Tant de la Cour, que de la Ville, (Et peu d’entre eux sans diamant) Entrèrent en ce lieu charmant.
Les aventures que le Masque servait, ou faisait naître, les caractères divers de Danse qu’il donnait occasion d’imaginer, l’amusement des préparatifs, le charme de l’exécution, les équivoques badines auxquelles l’incognito donnait lieu, firent et devaient faire le succès de cet amusement, qui tient autant à l’esprit qu’à la joie. […] Mais ces derniers l’ont connu fort tard, et il paraît surprenant que les masques en usage aux Théâtres des uns et des autres n’en aient pas plutôt donné l’idée.
Les Masques n’étaient assujettis à aucune loi, et il leur était permis de faire jouer les airs qu’ils voulaient danser, pour répondre au caractère du déguisement qu’ils avaient choisi. […] Le Carnaval de Benserade, qu’on exécuta le 18 janvier 1668, fut la dernière, où ce Monarque Père des Arts prit le masque.
Les Grecs et les Romains avaient une raison très puissante pour s’aider du secours du masque, non-seulement dans la Danse, mais encore dans la déclamation chantée de leurs représentations tragiques et comiques. Les places immenses où s’assemblaient les spectateurs, formaient de si grands éloignements, qu’on n’aurait entendu la voix ni distingué aucun des traits du visage, si on n’avait eu recours à l’invention des masques qu’on changeait dans la même représentation, selon les divers besoins de l’action théâtrale. Le masque ne leur fit rien perdre, et il leur procura les deux avantages dont l’éloignement les aurait privés. Nous sommes dans la situation contraire : le masque nous nuit toujours, et n’est utile presque jamais. […] On convient qu’il y a quelques caractères qui exigent le masque ; mais ils sont en petit nombre ; et ce n’est pas à cause des efforts prétendus qu’il faut faire pour les bien danser, que le masque devient nécessaire, mais seulement parce qu’un visage humain y serait un contre-sens ridicule.
Robinet, lettre du 21 janvier 1668 Le lendemain, se fit un Bal Dedans le beau Palais Royal, Non à Huis clos, mais Porte ouverte, Où mainte et mainte Troupe alerte, Vint en Masque, en tant de façons, Que Callot, dans ses Visions, Gravant, de son Burin idoine, La Tentation de Saint Antoine, A moins fait de divers Portraits De tous les Diables les plus laids, Qui furent, d’une humeur fantasque, Dans son Désert lui faire frasque. […] La sage INFANTE de TOUSSI Ne ravit pas coussi coussi, Et, dès qu’elle eut levé le Casque (Non, je voulais dire le Masque), Chacun, et de loin et de près, Se recréa sur ses Attraits.
De même que lorsque l’on vous vient prier pour danser, il faut vous transporter à l’endroit où l’on commence, & faire les reverences que l’on fait avant de danser ; mais si vous ne sçavez pas danser, il faut faire vos excuses, soit sur le peu d’usage que vous en faites, ou sur le peu de tems qu’il y a que vous apprenez : ainsi vos reverences finies vous reconduisez cette Dame à sa place, & du même tems vous allez faire une reverence à une autre Demoiselle, pour la convier de venir faire la reverence avec vous, afin de ne point déranger l’ordre du Bal ; mais si l’on vous pressoit de danser, quelque instance que l’on vous fit, ayant refusé une fois, il ne faut pas danser dans tout le Bal, parce que ce seroit offenser la personne qui vous a prié d’abord, ce qui se doit observer d’un sexe comme de l’autre : comme aussi ceux qui ont la conduite d’un Bal, d’être attentif que chacun danse à son tour, afin d’éviter la confusion & le mécontentement ; comme aussi lorsqu’il arrive des Masques, de les faire danser des premiers, afin qu’ils prennent ceux de leur compagnie de suite. On doit faire honneur préferablement aux Masques, car très-souvent ce déguisement cache des Personnes du premier rang.
Robinet, lettre du 2 mars 1669 Ici, partout, on masque, on balle, Et du bel air on se régale118 Selon l’ordre du Carnaval, Cette année assez jovial.