Le Balancé est un pas qui se fait en place comme le Piroüetté, mais il se fait ordinairement en presence, quoiqu’il se puisse faire aussi en tournant ; mais comme ce n’est que le corps qui se tourne, & que cela ne change aucun mouvement ; c’est pourquoi je vais décrire la maniere de le faire en presence : je dirai d’abord qu’il est composé de deux demi-coupez, dont l’un se fait en avant & l’autre en arriere ; Sçavoir, en commençant vous pliez à la premiere position, & vous le portez à la quatriéme en vous élevant dessus la pointe, puis vous posez le talon à terre, & la jambe qui est en l’air s’étant aprochée de celle qui est devant, & sur laquelle vous vous estes élevé, étant en l’air vous pliez sur celle qui a fait ce premier pas, & l’autre étant plié se porte en arriere à la quatriéme position, & vous vous élevez dessus ce qui finit ce pas ; mais en faisant ce pas au premier demi-coupé l’épaule s’efface, & la tête fait un petit mouvement ; ce qui donne l’agrément à ce pas, & que j’expliqueray avec la maniere de conduire les bras dans la seconde Partie. J’ai vû plusieurs personnes le porter à côté à la deuxiéme position, mais il ne m’ont pas paru avoir la même grace ; parce qu’il paroît que le corps se dandine : outre que les mouvemens qui se doivent faire de la tête & des bras ne sont pas si avantageux ; pour ceux qui se font en tournant, c’est la maniere de plier & de s’élever, en se contenant dans la proportion du pas & la position du pied, afin que le corps se conserve dans son équilibre, d’autant que tous les pas qui se font en tournant sont d’une plus difficile execution que ceux qui se font en avant.
Mais lorsque vous êtes élevé & que vous avez tourné le quart ou demi tour, il faut poser le talon du pied où le corps est posé : afin d’être plus ferme pour en reprendre un autre ; ce pas est très-agréable lorsqu’il est fait avec soin, il doit estre accompagné d’un contour de bras, & d’une maniere de porter sa tête avec grace, ce qui fait une des plus grande perfection de ce pas ; ce qui sera expliqué plus au long dans ma seconde Partie, celle-ci n’étant que pour la maniere de former les pas, & l’autre pour la conduite des bras selon les regles de l’Art. […] Il s’en fait d’une autre maniere qui sont pliez sur les deux pieds, & qui sont placez au commencement de la seconde partie de la Bacchante ; ce pas est trés-facile à faire, parce qu’il ne faut que plier sur les deux pieds également, & se relever de même : par exemple, le pied droit étant devant à la quatriéme position, le corps posé sur les deux jambes vous pliez tous les deux genoux, & vous vous élevez également en tournant le corps un quart de tour du côté gauche, au contraire lorsque c’est le pied gauche qui est devant, ce doit être du côté droit que l’on doit se tourner. Il s’en fait un autre dans un genre different des précedens, qui se fait de cette maniere : étant à la deuxiéme ou quatriéme position, car il se prend également de l’une comme de l’autre, & le corps posé sur un seul pied, la pointe de l’autre à terre, vous pliez les deux genoux, & vous vous relevez en sautant sur le pied où le corps est posé ; mais en sautant le pied qui ne posoit qu’à demi, la jambe s’étend en suivant le corps dans le tour qu’il fait, soit à droit ou à gauche, si vous devez tourner du côté droit vous pliez, & vous sautez sur le pied gauche, & la jambe droite & le bras droit s’étend ; ce qui vous fait tourner du côté droit & de même du côté gauche.
Après vous avoir donné les moïens les plus aisez pour faire tous les chassez qui se font dans les danses de Ville ; il est necessaire aussi que je vous explique la maniere d’y faire les bras de plusieurs façons. […] Il y a une autre maniere de chassez dans l’Aimable Vainqueur, qui ne sont que des jettez-chassez dont on en fait trois de suite, qui ne renferment dans leurs trois mouvemens que le tems d’un seul pas ; mais il suffit à ce pas une seule opposition qui se commence dès le premier mouvement, & qui se contient dans les deux autres pas. […] J’ai dit aussi qu’il y avoit d’autres chassez, mais comme je n’en ai point trouvé de cette sorte dans aucune danse de Ville, je ne parlerai pas de la maniere d’y faire les bras.
De la maniere de faire les bras avec les Pirouettez. […] Figure preste à faire le piroëté Mais comme ce pas est ordinairement prevenu par un autre pas qui vous prepare à faire le suivant, comme un coupé : par exemple, en posant la pointe du pied, ou une ouverture de jambe qui se termine la jambe en l’air, ces differens pas vous conduisant à faire le Piroüetté, je vais donc vous donner la maniere d’en faire les bras : aussi pour que vous soyez instruit plus intelligiblement, j’ai mis cette Figure qui en exprime les parties les plus essentielles & par laquelle vous devez comprendre plus facilement les mouvemens, que les bras doivent faire. […] Mais lorsque vous pliez sur le pied droit & que le gauche du même tems se croise (ainsi que je l’ai deja dit dans la maniere de le faire) en vous relevant sur la pointe des pieds, le bras s’étend en faisant un rond du coude & du poignet : de même que ces mots, rond du bras fait entier, l’expriment, ce qui accompagne le corps dans le tour qu’il fait, & le bras se tournant doucement de bas en haut un tour entier, revient dans la même attitude qu’il est dans cette figure.
De la maniere de faire les bras avec les Contre-tems de Gavote. […] Pour les faire en arriere, c’est la maniere & pour les bras aussi. […] De la maniere de faire les bras avec les Contre-tems ouverts ou de Chaconne. […] De la maniere de faire les bras avec les Contre-tems Balonnez. […] La maniere d’en faire les bras n’est pas fort embarrassante, & on ne doit faire qu’une opposition, il est vrai, qu’il n’a qu’un pas ; mais dans ce seul pas il y a deux mouvemens, comme je l’ai déja dit ; ce qui le rend vif & brillant.
Il faut avoir été premier danseur pour être un bon maître ; tout autre sans cela n’enseignera que par routine, machinalement, et n’aura jamais rien de certain dans ses leçons et dans la manière de les démontrer. […] Il faut qu’il lui démontre bien sa différence qu’il y a d’un genre de danse à l’autre, qu’il en fixe bien précisément l’exécution et qu’enfin il apprenne à l’écolier quelles sont les diverses manières de danser qu’exigeront l’habit et les costumes dont il devra se revêtir selon l’occurrence77. […] Je trouvai en lui une autre manière de démontrer dans ses leçons, et l’art de la danse me parut changé. J’y découvris un charme séduisant, mais avec de nouvelles difficultés, et la manière de les surmonter m’encouragea dans le travail, en me faisant espérer que mes efforts ne seraient pas inutiles. […] Je connais un maître qui jouit à Paris d’une grande réputation, et qui a le défaut de faire danser les hommes de la même manière que dansent les femmes, de sorte que tous ses élèves sont maniérés et affectent une sorte de grâce qui a quelque chose de répugnant.
De la maniere de faire les bras avec les pas Tombez & les pas de Gaillarde. Comme dans ma premiere Partie j’ai fait une démonstration du pas tombé & du pas de Gaillarde qui étant un pas composé, en ce qu’il renferme dans son étenduë plusieurs autres pas, & plusieurs mouvemens me donnent lieu aussi que je vous explique la maniere de faire les bras convenables à ces differens pas. Par exemple, si c’est un pas tombé simple, tel que je l’ai deja dit dans la maniere de le faire, il faut que vous le commenciez par vous élever sur la pointe des pieds, les bras étant à la hauteur que le represente la Figure qui est au commencement de cette deuxiéme Partie : ainsi lorsque votre pied se tire derriere en tombant, les bras quoique étendus se baissent ; ce qui se fait par le mouvement de l’épaule qui se d’étend, en laissant baisser les bras & les relever dans le moment : vous voyez par là, la conformité des jambes avec les bras ; puisque dans le tems que vous tirez votre pied derriere, & que les genoux se plient, comme si les forces vous manquoient (ce qui fait votre pas tombé) les bras se baissent aussi & se relevent, lorsque vous faites votre second pas qui termine votre pas tombé, qui est un demi jetté : ainsi pour ce pas, les bras ne font que se baisser & se relever, ce qui est le mouvement de l’épaule, puisque ce n’est que par cette jointure que les bras s’émouvent.