Vous conviendrez cependant que la perfection de l’ouvrage dépend en partie de la beauté de l’ébauche ; mais un Ecolier que l’on présente au Public est comme un tableau qu’un Peintre expose au Sallon ; tout le monde le voit, tout le monde l’admire & l’applaudit, ou tout le monde le blâme & le censure ; figurez-vous donc l’avantage que l’on a d’être constamment à l’affût des Sujets agréables formés dans la Province, dès qu’on peut se faire honneur des talents qu’on ne leur a pas donnés. […] En honneur les talents de notre siecle sont surprenants. […] Je me fais un honneur & un devoir de leur donner ici le tribut d’éloges que je leur dois ; quiconque a contribué long-temps aux plaisirs d’un Public aussi éclairé que celui de Paris, est & sera toujours cher à celui qui aime & qui chérit les Arts ; or quelle source inépuisable de principes ?
Moïse, après la délivrance des Hébreux et après le passage de la Mer Rouge, institua des fêtes et des danses ; David dansa devant l’Arche sainte : Socrate apprit à danser d’Aspasia ; Épaminondas tenait à honneur de danser habilement ; les soldats de Crête et de Sparte allèrent à l’assaut en dansant.
On écoute avec attention les airs de Bravoure, les Duo, les Cantabiles, les Cavatines et les Récitatifs à grand orchestre ; tous ces morceaux ressuscitent l’attention, réveillent l’oreille et l’œil assoupis ; ils sont applaudis avec enthousiasme ; les sonnets imprimés sur du satin, pleuvent de toutes les parties de la salle ; ce sont des brevets d’honneur que l’amour de la musique distribue tantôt aux compositeurs, tantôt aux acteurs, et aux maîtres des ballets.
Montespan, Merveille visible, Pour qui nul coeur n’est insensible, Astre d’honneur, astre d’amour, Et l’un des plus beaux de la Cour.
Mais, comme elle a le cœur fâché Des Honneurs rendus à Psyché,146 Au préjudice de ses Charmes, N’en pouvant cacher ses alarmes, Elle fait, bientôt, bande à part, Et restant seulette, à l’écart Avec son Fils, en conférence, Elle l’anime à sa Vengeance, Puis s’éclipse, jusqu’au Succès, Qu’aura son amoureux Procès.
Or, pour avoir le mariage avec cette pureté et cet honneur, il le faut avoir tel dès le commencement : car si l’impureté s’y attache en quelque sorte ; on ne peut pas l’effacer bientôt ; et le péché est un hôte fort difficile à faire déloger quand on l’a reçu. […] En un mot, les noces ne sont point un théâtre de folie et de turpitude, mais une solennité sainte d’une chose sacrée, pour mener la vertu, la modestie, la chasteté, l’honneur, Dieu même avec toutes ses grâces dans la maison des époux. » Que répondront au jour du jugement à Dieu, tant de chrétiens qui connoissent si peu la sainteté du mariage, et qui, y entrant sans aucune vue de servir Dieu et sans le moindre sentiment de piété, célèbrent leurs noces d’une manière toute païenne, lorsque Jésus-Christ leur opposera ce qu’en ont écrit les docteurs protestans dont je viens de rapporter les paroles, et qu’il leur reprochera que dans le sein même de l’Eglise, ils ont moins sainement pensé des choses de la Religion et de la sainteté de nos sacremens, que des hommes qui avoient le malheur d’en être séparés par l’hérésie, et qui ne regardoient point la célébration du mariage comme un vrai sacrement ?
Si quelqu’un de ceux de cette première classe me fait l’honneur de suivre le fil de cet Ouvrage, il saisira sans peine dans la suite des faits, les marques de vérité qui m’ont frappé moi-même.