Ce compositeur ingénieux a enrichi ce spectacle de ses brillantes productions ; il a écrit savament sur son art ; et personne n’est plus en état que lui d’apprécier le mérite de ceux qui se sont empressés de contribuer aux succès de ses ouvrages, soit par leur action, soit par le brillant de leur voix, soit enfin par le goût et l’expression de leur chant.
Il y avoit dans ce Ballet une Scene très singuliere où un Maître à danser vient vanter en chantant tous les avantages de son Art, & comme il executoit en même tems les divers caracteres de Danse qui se trouvent dans les Ballets, & qu’il avoit un peu de voix & beaucoup de goût pour le chant, il entreprit de faire ce rôle, & le remplit si bien qu’il engagea dès ce jour-là le public à remarquer avec plus d’attention les talens qu’il avoit pour la Danse, où il a soûtenu constamment ce qu’il fit attendre de lui.
Les peintures animées, les récits pittoresques, le style vivant en quelque sorte, qu’on retrouve dans tous les écrits qui ont conservé et transmis les traditions originelles des peuples, attestent la présence de ce drame, dont l’instinct a été donné à l’homme en même temps que la voix et le geste, en même temps que la parole et le mouvement. […] Ce même compositeur, devenu maître de la musique de Saint-Marc à Venise, y introduisit cette manière de représentations qui depuis sont devenues si célèbres par la magnificence des théâtres et des habits, la délicatesse des voix, l’harmonie des concerts et les savantes compositions de Montevre, de Soriano, de Giovanelli, de Teofilo et de plusieurs autres grands maîtres. […] Comme théâtre, sa naissance est toute religieuse : un cardinal fut son parrain ; un abbé fut son père nourricier ; l’Église lui fournit son premier compositeur et ses premières voix. […] Il était exprimé dans un édit : « que tous gentilshommes, demoiselles, et autres personnes, puissent chanter (il n’est pas fait mention de la danse) audit Opéra, sans que pour cela ils dérogent au titre de noblesse, ni à leurs priviléges, droits et immunités. » Il était fait prohibition positive à tous les comédiens français et étrangers de se servir de la salle de l’Opéra, d’employer des musiciens au-delà du nombre de douze ; plus tard on réduisit à deux le nombre des voix, et a six celui des violons ; les danseurs leur furent interdits. […] Vienne, Naples et Milan sont, sous ce rapport, les tributaires de Paris, qui, à son tour, emprunte à l’Allemagne et à l’Italie les merveilles de leurs voix, mais qui, seul en Europe, fait, défait et soutient les réputations lyriques.
On ne sait jusqu’où cela pourrait aller, si la sonnette du régisseur, dominant le tumulte de sa voix perçante, ne calmait soudain l’effervescence générale, en forçant chacun de se rendre à son poste. — Ce qu’est devenue pendant cette scène la pauvre Paquita, est-il besoin de le dire ? […] Cependant, au moment d’entrer chez la veuve, Cléofas sent une main se poser sur son bras, et entend une voix qui lui crie dans la langue du ballet : « Halte-là, beau cavalier ! […] Cléofas est un peu sceptique, nous l’avons dit, et quoiqu’il n’ait pas lieu de douter de la bonne foi du diable, il veut mettre à l’épreuve la vertu du talisman ; il agite la sonnette, et la petite langue d’argent n’a pas plutôt fait entendre sa voix, qu’Asmodée, qui avait disparu, jaillit soudainement de terre, quoiqu’il fût déjà aux antipodes ou plus loin.
A la vue d’Oreste Iphigénie se sent troublée ; la voix du sang se fait entendre, et elle conçoit le dessein de soustraire Oreste a la mort. […] Iphigénie, entrainée, sans le savoir, par la voix du sang, annonce qu’Oreste partira, et que Pylade sera sacrifié.
Telles sont ses deux causes primitives : « On voit par là, que le chant et la danse ne sont pas moins naturels à l’homme que la voix et le geste, et que l’une et l’autre n’ont été, pour ainsi dire, que les instruments qui leur ont donné lieu.