Du tems du feu Roy, c’étoit la Reine avec qui Sa Majesté figuroit, au deffaut, c’étoit la premiere Princesse du Sang que Sa Majesté prenoit, & se plaçoient les premiers, & chacun se venoit placer derriere leurs Majestez à la file, chacun selon leur rang. Sçavoir, Monseigneur & Madame la Dauphine, Monsieur & Madame ; ainsi des autres Princes & Seigneurs ; tous les Seigneurs sont d’un côté à la gauche, & les Dames à la droite : & dans ce même ordre on se fait la reverence l’un devant l’autre, ensuite Sa Majesté & sa Dame mene le branle, qui étoit la danse par où les Bals de la Cour se commençoient, tous les Seigneurs & Dames suivent leurs Majestez, chacun de leur côté, & à la fin du couplet, le Roy & la Reine se mettoient à la queuë, & celui & celle qui étoient derriere leurs Majestez menent le branle à leur tour ; ensuite se vont placer derriere le Roy & la Reine, & successivement des autres de deux en deux, jusqu’à ce que leurs Majestez soient revenus les premiers : après quoy ils dansent la Gavotte, qui se danse dans le même ordre du branle, qui est de se remettre à la queuë jusqu’à ce qu’ils soient revenus devant, & les branles finis on se fait de pareilles reverences en se quittant, que celles que l’on a fait avant de danser. […] C’est pourquoi après que le Roy a dansé le premier menuet, il va se placer, & tout le monde pour lors s’asseoit, d’autant que lorsque Sa Majesté danse tout le monde est debout ; après quoy le Prince qui doit danser lorsque Sa Majesté est placée, il lui fait une très-profonde reverence, ensuite il vient à l’endroit où est la Reine, ou premiere Princesse, & font ensemble les reverences que l’on fait avant de danser, & de suite ils dansent le menuet, & aprés le menuet on fait de pareilles reverences que celles que l’on a fait devant.
Opposition singulière des Mœurs des Grecs avec les nôtres Lorsque Agamemnon partit pour le siège de Troie, il laissa auprès de Clytemnestre qu’il aimait, et dont il était aimé, un Danseur célèbre40, qu’il établit l’écuyer de la jeune reine. […] Il avait l’attention d’exercer la Reine par des Danses nobles qu’il composait exprès pour elle. […] Égisthe cependant, prince ambitieux, occupé sans cesse de tous les tendres soins qu’inspire le désir de paraître aimable, osait soupirer pour la Reine ; mais toujours dissipée par un exercice, et par des représentations qui remplissaient ses moments et qui suffisaient à son oisiveté, elle n’apercevait les regards, les soins, ni les soupirs d’Égisthe.
Notre MONARQUE et notre REINE, Dont la Puissance Souveraine Fait notre bienheureux Destin, Et leurs admirable DAUPHIN Vinrent à cette belle Fête, Étant, des pieds jusqu’à la Tête, Vêtus en Perses éclatants, Des fins joyaux tout bluettants121, La REINE, ayant sur sa Personne, Et si divine et si mignonne, Pour dix-sept millions et plus De ces clairs Effets de Phœbus.
Loret, lettre du 21 janvier 1662 J’étais prié d’y comparaître, Mais comme on ne saurait pas être En même temps, en divers lieux, Durant ce jour-là j’aimai mieux Aller à la suite des Reines, Voir sans embarras et sans peines, Sans passe-port et sans billet, Les Machines du Grand Ballet, Dont on essaya quelques-unes ; Mais telles et si peu communes, Qu’en extase je fus ravi De trois seulement que je vis. Pareils spectacles sont ma vie, De les voir j’ai toujours envie, J’y courrais bien plutôt qu’au feu ; Puis il faut que j’en parle un peu, Et que de ses pompeux mélanges J’instruise les Pays étranges21 De tous côtés, de bout en bout, Par mes Vers qui courent par tout ; Que si la Reine débonnaire, Dont ma Muse est pensionnaire, La Reine Mère de mon Roy, Ayant un peu de soin de moi, Me faisait l’honneur et la grâce (Ainsi que jadis dans Bourbon) Lors-que ce sera tout de bon : Quoi que j’aie déjà pour Elle Grand bienveillance et grand zèle, Je jure que mon amitié En augmenterait de moitié.
Comme dans les Bals reglez il y a un Roy & une Reine ; pour en suivre la regle, ce sont eux qui commencent à danser, & lorsque leur premier menuet est fini, la Reine convie une autre Cavalier de venir danser avec elle, & après qu’ils ont dansé, il va reconduire la Reine, & lui demande poliment qui elle souhaite qu’il prenne, & après lui avoir fait une reverence, il va en faire une autre à la personne avec qui il doit danser, pour la convier de venir danser.
La Reine qui voulait donner une haute idée de son administration donna le Bal deux fois le jour, Festins sur Festins, Fête sur Fête. […] Dans une petite île située dans la rivière de Bayonne et qui était couverte d’un bois de Haute Futaie, la Reine fit faire douze grands Berceaux qui aboutissaient à un Salon de forme ronde qu’on avait pratiqué dans le milieu. […] La Table du Roi, des Reines, des Princes et des Princesses du Sang était dressée dans le milieu du Salon, en sorte que rien ne leur cachait la vue des douze Berceaux, où étaient les Tables destinées au reste de la Cour. […] Les Filles d’honneur des deux Reines, vêtues élégamment partie en Nymphes, partie en Naïades, servirent la Table du roi. […] Le Roi en sortit à onze heures avec le Roi d’Angleterre, la Reine et les Princes du Sang pour aller souper.