/ 162
5. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE X. » pp. 261-289

L’action en matiere de Danse est l’Art de faire passer par l’expression vraie de nos mouvements, de nos gestes & de la physionomie, nos sentiments & nos passions dans l’ame des Spectateurs. […] Tout doit peindre, tout doit parler chez le Danseur ; chaque geste, chaque attitude, chaque port de bras doit avoir une expression différente ; la vraie Pantomime en tout genre, suit la nature dans toutes ses nuances. […] Que les Danseurs qui commencent ne confondent pas cette Pantomime noble, dont je parle, avec cette expression basse & triviale que les Bouffons d’Italie ont apporté en France & que le mauvais goût semble avoir adopté. […] Selon lui, dit Quintilien, l’Art du Pantomime consiste dans la bonne grace & dans l’expression naïve des affections de l’ame ; elle est au-dessus des regles & ne se peut enseigner ; la nature seule la donne. […] ils cessent dès-lors d’être aimables & de plaire ; la voix de la nature & l’expression fidelle du sentiment jetteront toujours l’émotion dans les ames les moins sensibles, le plaisir est un tribut que le cœur ne peut refuser aux choses qui le flattent & qui l’intéressent.

6. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE III. » pp. 30-46

Il est bien singulier, que l’on ait comme ignoré jusqu’à présent que le genre le plus propre à l’expression de la Danse est le genre tragique ; il fournit de grands Tableaux, des situations nobles & des coups de théatre heureux ; d’ailleurs, les passions étant plus fortes & plus décidées dans les Héros que dans les Hommes ordinaires, l’imitation en devient plus facile, & l’action du Pantomime plus chaude, plus vraie & plus intelligible. […] Il est aisé de concevoir d’après mes idées, que le Ballet Pantomime doit toujours être en action, & que les Figurants ne doivent prendre la place de l’Acteur qui quitte la Scene, que pour la remplir à leur tour, non pas simplement par des figures symmétriques & des pas compassés, mais par une expression vive & animée, qui tienne le Spectateur toujours attentif au sujet que les Acteurs précédents lui ont exposé. […] Un Maître de Ballets doit s’attacher à donner à tous les Acteurs dansants une action, une expression & un caractere différents ; ils doivent tous arriver au même but par des routes opposées, & concourir unanimement & de concert à peindre par la vérité de leurs gestes & de leur imitation, l’action que le Compositeur a pris soin de leur tracer. […] Nulle ressemblance d’ailleurs dans le Tableau ; on avoit prêté aux Nymphes le caractere & la fureur des Bacchantes qui déchirerent Orphée ; Diane avoit moins l’expression d’une amante que d’une Furie ; Endimion peu reconnoissant & peu sensible à la scene qui se passoit en sa faveur, paroissoit moins tendre qu’indifférent ; l’Amour n’étoit qu’un enfant craintif, que le bruit intimide & que la peur fait fuir : tels sont les caracteres manqués, qui affoiblissoient le Tableau, qui le privoient de son effet, & qui dégradoient le Compositeur. […] Cette différence du Tableau au Portrait devroit être également reçue dans la Danse ; le Ballet, comme je le sens, & tel qu’il doit être, se nomme à juste titre Ballet ; ceux au contraire qui sont monotones & sans expression ; qui ne présentent que des copies tiedes & imparfaites de la nature, ne doivent s’appeller que des divertissements fastidieux, morts & inanimés.

7. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre IX. » pp. 97-129

Cette expression est cent fois plus animée, plus vive et plus précieuse, que celle qui résulte du discours le plus véhément. […] La physionomie est donc la partie de nous-même la plus utile à l’expression ; or, pourquoi l’éclipser au théatre par un masque, et préférer l’art grossier à la belle nature. […] Deux raisons me le feroient adopter : premièrement, la difficulté de conserver longtems cette physionomie boursoufflée ; secondement, le peu d’expression de ce genre. […] Nulle diversité dans les traits, nulle expression, nul caractère : tout languit, et la nature gémit sous un masque mort et désagréable. […] Aussi mettent-elles plus d’ame, plus d’expression et plus d’intérêt dans leur exécution que les hommes.

8. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE IX. » pp. 195-260

Cette expression est cent fois plus animée, plus vive & plus précise que celle qui résulte du discours le plus véhément ? […] La physionomie est donc la partie de nous-mêmes la plus utile à l’expression ; or pourquoi l’éclipser au Théatre par un masque & préférer l’Art grossier à la belle nature ? […] Premiérement, la difficulté de conserver long-temps cette physionomie boursoufflée ; secondement, le peu d’expression de ce genre. […] Aussi mettent-elles plus d’ame, plus d’expression & plus d’intérêt dans leur exécution que les hommes. […] La noblesse de sa taille, le caractere aimable de sa figure, la tendresse de son expression, ne l’auroient pas servi dans des rôles où il n’est pas nécessaire de ressembler à un homme de condition.

9. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre III. » pp. 17-24

Il est bien singulier que l’on ait comme ignoré jusqu’à présent, que le genre le plus propre aux expressions de la danse, est le genre tragique ; il fournit de grands tableaux, des situations nobles, et des coups de théatre heureux ; dailleurs les passions étant plus fortes et plus décidées dans les héros que dans les hommes ordinaires, l’imitation en devient plus facile, et l’action du pantomime plus chaude, plus vraie, et plus intelligible. […] Il est aisé de concevoir, d’après mes idées, que le ballet pantomime doit toujours être action, et que les figurans ne doivent prendre la place de l’acteur qui quitte la scène, que pour la remplir à leur tour, non pas simplement par des figures symétriques et des pas compassés, mais par une expression vive et animée, qui tienne le spectateur toujours attentif au sujet que les acteurs précédens ont exposé. […] Un maître de ballets doit s’attacher à donner à tous les acteurs dansans une action, une expression et un caractère différens ; ils doivent tous arriver au même but par des routes diverses, et concourir unanimement et de concert, à peindre, par la vérité de leurs gestes, et de leur imitation, l’action que le compositeur a pris soin de leur tracer. […] Cette quantité prodigieuse de combattans, de vaincus et de vainqueurs, partage agréablement les regards, et concourt unanimement à la beauté, et à la perfection de ces chefs d’œuvre ; chaque tête a son expression, et son caractère particulier ; chaque attitude a de la force et de l’énergie ; les groupes, les terrassemens, les renversemens sont aussi pittoresques, qu’ingénieux : tout parle, tout intéresse, parce que tout est vrai ; parce que l’imitation de la nature est fidelle ; en un mot, parce que tout concourt à l’effet général. […] Le ballet, comme je le sens, et tel qu’il doit être, se nomme à juste titre ballet ; ceux, au contraire, qui sont monotônes et sans expression, qui ne présentent que des copies tiédes et imparfaites de la nature, ne doivent s’appeller que des divertissemens fastidieux et inanimés.

10. (1757) Articles pour l’Encyclopédie « Sur l’interprétation du chanteur »

De là il est évident que le chant a son expression propre, indépendante de celle de l’articulation des paroles. Voyez Expression. […] Cette espèce de déclamation n’est et ne doit être autre chose que l’expression en chant du sentiment qu’expriment les paroles. Voyez Expression. […] Le volume plus large, s’il est permis de se servir de cette expression, en fait une seconde différence.

/ 162