Les bras sont, pour ainsi dire, les ailes du corps ; ils en balancent tous les mouvemens ; ils le maintiennent en équilibre dans ses positions même les plus forcées : ce sont eux qui établissent, sans art et sans étude, ce que l’on nomme le centre de gravité ; ils préservent enfin l’homme des chûtes, et des accidens inévitables, dont il seroit sans cesse menacé. […] Le désir d’imiter les occupa sans cesse ; mais ils restèrent longtems dans l’ignorance : les progrès furent lents ; les éssais pénibles et souvent infructueux ; ils érrèrent pendant plusieurs siècles, et toujours égarés, ils ne pouvoient arriver à un but qui sembloit s’éloigner d’eux, à mesure qu’ils en approchoient.
Le bruit cesse ; la main et l’ombre disparoissent ; les caractères s’effacent ; les gouffres se ferment, et Danaüs revoit la lumière. […] Les Danaïdes restent immobiles à la vue de leur cruel attentat ; ici sortent du lieu du massacre des spectres horribles ; Tisiphone, Alecto, Mégère les accompagnent ; le Crime, la Trahison, la Perfidie et le Remords les suivent ; cette troupe infernale s’empresse à présenter aux Danaïdes les tableaux effrayans de leurs crimes ; les images, qui leur sont retracées par les enfers, leur déchirent l’ame, et leur causent à chaque instant de nouvelles épouvantes ; elles veulent fuir ; mais elles sont sans cesse arrêtées dans leur fuite par les grouppes horribles, qui les dévancent ou qui les poursuivent ; le Crime, le Remord, la Trahison et la Perfidie, conduits par les Furies, les enchaînent, pour ne les plus abandonner ; en vain veulent-elles échapper à la punition, qui les attend ; la terre s’entr’ouvre, il s’en exhale une vapeur épaisse mêlée de flammes ; un bruit sourd et confus ajoute à cette horreur ; un spectre hideux armé d’une faulx, sort à pas lents du souterrain ; son apparition glace d’épouvante l’ame des Danaïdes ; la pâleur de la mort se répand sur leurs traits ; le spectre leur montrant d’une main menaçante la route qu’il vient de leur frayer, leur ordonne d’y descendre ; c’est inutilement qu’elles tentent de se soustraire à sa puissance ; elles sont entrainées par la troupe infernale et les spectres armés de torches funéraires et lugubres les précipitent dans l’empire des morts.
On a sacrifié le beau genre au trivial ; on a secoué le joug des principes ; on a dédaigné & rejetté toutes les regles ; on s’est livré à des sauts, à des tours de force ; on a cessé de danser, & l’on s’est cru Pantomime, comme si l’on pouvoit être déclaré tel, lorsqu’on manque totalement par l’expression ; lorsqu’on ne peint rien ; lorsque la Danse est totalement défigurée par des charges grossieres ; lorsqu’elle se borne à des contorsions hideuses ; lorsque le masque grimace à contre-sens, enfin lorsque l’action qui devoit être accompagnée & soutenue par la grace est une suite d’efforts répétés, d’autant plus désagréables pour le Spectateur qu’il souffre lui-même du travail pénible & forcé de l’exécutant. […] Il n’y a rien de sensible qui n’ait sa matiere, sa forme & sa figure ; conséquemment le Ballet cesse d’exister s’il ne renferme ces parties essentielles qui caractérisent, & qui désignent tous les êtres tant animés qu’inanimés.
Il doit exister sans cesse une parfaite harmonie dans l’exécution entre toutes les parties du corps, et c’est cet ensemble charmant qui fera apprécier le mérite d’un véritable danseur. […] La musique doit être sans cesse d’accord avec votre danse ; c’est cet ensemble charmant, qui entraîne tous les cœurs24. […] Il faut travailler sans cesse et doubler l’exercice pour acquérir un vrai talent.
La bouche, charnue, décrit un arc redoutable, sans cesse bandé pour décocher les flèches roses de la moquerie. […] Nonobstant, les époux Subra cessèrent de se montrer inquiets sur l’avenir. […] Je sais qu’elle a pour grande maîtresse de sa maison l’excellente maman Sacré, qu’elle admet à l’honneur de monter dans ses carrosses et d’avoir tabouret en sa cour ; la maman Sacré, une ancienne amie de Montmartre, qui s’en va sans cesse répétant : — Ah !
Ces funestes évenemens mettent la fortune des citoyens en danger ; anéantissent les chefs d’œuvres des beaux arts, et exposent la vie de ceux qui les cultivent à des malheurs sans cesse renaissans. Si l’on ajoute à ces tableaux effrayans, les entraves perpétuelles, qui ressérrent le génie, qui captivent l’imagination, qui circonscrivent les idées, qui enchaînent la volonté, et qui forcent le peintre, le maître des ballets, le musicien, et souvent le poète, à sacrifier au rétréci du local, les grands effets de leur art ; on sentira qu’une salle construite et placée comme est celle de l’opéra, ne peut qu’exciter des craintes sans cesse renouvellées. […] L’illusion s’affoiblit, la surprise cesse et le plaisir fuit. […] Quelques architectes riront peut-être de mes idées ; peut-être ceux qui sont sans cesse occupés dé la perfection de leur art, y trouveront-ils matière à réflexion et c’est de ceux-là seuls que j’ambitionne le suffrage. […] Ils offroient sans cesse les images d’une heureuse variété ; le nouveau ne présente au contraire que les tristes tableaux de la monotonie, et la répétition fatigante des mêmes temps, des mêmes pas et des mêmes pirouettes.