Je le sens, un tel ouvrage serait probablement fort au-dessus de mes forces, mais j’ai du moins le faible mérite d’avoir entrevu ce que pourrait faire un homme de génie. […] Ils ont créé une danse toute nouvelle, majestueuse, forte et pathétique ; en un mot, les ballets, sous l’ascendant de leur génie, sont devenus une peinture vivante des passions, des mœurs, des cérémonies et des costumes de tous les peuples. […] Cet art que les anciens ont peut-être ignoré était autrefois fort simple ainsi que la danse ; mais de nos jours, les pas sont compliqués, doubles, triples même ; leur mélange, leur combinaison est immense et presque incalculable ; il est donc difficile de les écrire et plus encore de les déchiffrer. Cet art est d’ailleurs fort imparfait, il n’indique exactement que l’action des pieds, et s’il désigne les mouvements des bras, il n’exprime ni les positions, ni les contours qu’ils doivent avoir.
Deuxieme attitude ayant sauté Mais comme le mouvement que l’on prend pour sauter, est plus forcé que celui pour s’élever au demi-coupé ; cela fait qu’en vous élevant la jambe droite rejette le corps sur le pied gauche, & elle reste en l’air fort étenduë à côté, comme il est representé par cette seconde Figure, & de suite vous faites un pas de cette même jambe en la croisant jusqu’à la cinquiéme position, en posant le corps dessus, puis faites de suite un autre pas du pied gauche, en le portant à côté à la deuxiéme position, ce qui finit ce pas. […] Pour le faire du pied droit ayant le gauche devant, à la quatriéme position le corps posé dessus, il faut plier & vous relever en sautant sur le même pied, & la jambe droite qui est derriere se passe devant dans le même tems que vous pliez, & se tient en l’air fort étenduë pendant ce premier mouvement ; mais vous reprenez de suite un second mouvement en pliant sur le pied gauche, ce qui vous rejette sur le pied droit en formant un jetté : ainsi ce pas est composé de deux mouvemens differens, sçavoir, plier & sauter sur un pied ; puis plier sur le même pied, & se rejetter sur l’autre. J’ai déja dit que tous ces differens pas sont également pour les Dames, comme pour les Messieurs, à l’exception qu’elles ne doivent pas tant les sauter ; mais quant aux pliez il les faut toûjours bien marquer, surtout dans les commencemens en ce qu’ils rendent une danse plus agréable, au lieu que quand ils ne sont pas si fort marquez qu’à peine peut-on distinguer les pas, ils font paroître une danse seche, & qui n’a aucun agrément.
Ces poses sur les demi-pointes sont fort belles par le jeu harmonieux des muscles et le sentiment de l’ensemble plastique. […] J’évite les nomenclatures fastidieuses, mais il serait injuste de ne pas mentionner le succès éclatant de Mlle Niemtchinova (pointes fort remarquables, beaucoup de verve) ; celui non moindre de M.
Loret, lettre du 19 février 1661 Dans fort peu, le Ballet du Roi, Fort divertissant, sur ma foi, Qu’on intitule (que je pense) Le Ballet de l’Impatience, Dans le Louvre se dansera, Et, sans doute, admiré sera : Car c’est chose très véritable Qu’il est beau, qu’il est admirable ; J’en vis (dont je fus ébaudi) La Répétition, Jeudi, Où, sans vanité, je puis dire Que j’étais placé comme un Sire ; Et, foi de sincère Normand, Le tout me parut si charmant, Que, du Roi, l’auguste prestance, Des Princes et Seigneurs la Danse, Et les concerts mélodieux Me semblèrent dignes des Dieux.
Nous disons qu’un homme est jarreté, lorsque ses hanches sont étroites et en dedans, ses cuisses rapprochées l’une de l’autre, ses genoux gros et si serrés qu’ils se touchent et se collent étroitement, quoique ses pieds soient distans l’un de l’autre ; ce qui forme à peu près la figure d’un triangle depuis les genoux jusqu’aux pieds ; j’observe encore un volume énorme dans la partie intérieure de ses chevilles, une forte élévation dans le cou-de-pied ; et le tendon d’Achille est non seulement en lui grêle et mince, mais il est fort éloigné de l’articulation. […] J’ai connu des danseurs qui ont trouvé l’art de dérober ce défaut à tel point qu’on ne s’en seroit jamais apperçu, si l’entrechat droit et les temps trop forts ne les avoient décelés. […] Rien n’est si difficile, à mon sens, que de masquer ces défauts, surtoût dans les instans d’une exécution forte, où toute la machine est ébranlée, où elle reçoit des secousses violentes et réitérées, et où elle se livre à des mouvemens contraires et à des efforts continuels et variés. […] Communément ils sont forts et vigoureux ; il ont par conséquent moins de souplesse dans les muscles, et leurs articulations jouent avec moins d’aisance. […] Je dis donc que cette pésanteur n’étant pas dans une proportion aussi exacte dans les danseurs arqués, qu’elle l’est dans les danseurs jarretés qui ont extraordinairement le cou-de-pied élevé et fort ; ces premiers ont nécessairement moins de facilité à se hauser sur l’extremité des pointes.
Appollonius, Zamblique, Porphire, & Michel Psellus, tous grands Philosophes, mais un peu suspects de magie, au sentiment du peuple, & non pas de Saint Jérôme, assurent qu’il y a quatre sortes de Démons ou d’Esprits élémentaires, dont l’explication se trouve dans le Livre du Comte de Gabalis ; c’est un récit parfait de tout ce qui se peut dire de plus plaisant sur cette matiere, pour tâcher de persuader l’éxistance des Esprits élémentaires, de même que la réalité des apparitions des phantômes, à laquelle néanmoins beaucoup de gens bien sensez n’ont point de foi, & encore moins ceux qui se picquent d’esprits forts, non plus qu’aux apparitions diaboliques, quoiqu’il y ait quantité d’Auteurs qui prétendent qu’elles étoient assez communes au tems du Paganisme ; témoin l’éxemple qu’on en trouve dans Elian, Liv. 8. […] Suétone rapporte dans la vie de Jules-César, qu’étant sur les bords du fleuve Rubicon, incertain s’il le passeroit ou non, attendu que ce passage étoit contraire aux ordres du Sénat, un prodige ou phantôme ressemblant à un homme, fort haut & beau par excellence, s’apparut à lui jouant d’un chalumeau fait de canne ; plusieurs Bergers y accoururent, & des soldats abandonnerent leurs postes pour l’ouir, entre autres les trompettes, à qui ce phantôme en arracha une, & se jetta dans la riviere qu’il passa à la nage, en sonnant l’allarme d’une grande force avec cette trompette ; il parut pendant quelque tems sur l’autre bord de la riviere : alors César dit à son armée, allons où les prodiges des Dieux nous appellent ; cette résolution, dit Suétone, lui procura l’Empire. […] L’on voit aussi dans les Annales de Nuremberg, qu’un certain jour qui est marqué, il passa dans cette grande Ville une espece de phantôme ou de grand homme, d’une figure prodigieuse, qui jouant du flageolet, parcourut toutes les rues, & tous les enfans qui l’entendirent, se mirent à le suivre comme par enchantement ; il en assembla jusqu’à 800 des deux séxes, & les conduisit hors de la Ville : ils se perdirent ensuite si absolument, que quelques diligences que purent faire les parens de ces enfans, l’on n’a jamais sçû ce qu’ils étoient devenus ; mais l’on a depuis trouvé au milieu de la Hongrie une Ville assez belle, dont les habitans ont le langage & toutes les manieres des Bourgeois de Nuremberg, mais fort différentes de celles des autres Hongrois ; ce qui fait présumer qu’ils proviennent de cet enlévement. […] Les Entrepreneurs commencerent cet ouvrage avec quantité de travailleurs ; mais cette grande entreprise fut troublée par des prodiges extraordinaires : entre autres on entendoit les nuits des voix qui sortoient de dessus les travaux, qui faisoient des mugissemens épouventables ; d’autres voix qui sortirent du fond du canal, dont les tons étoient fort agréables & fort harmonieux, ce qui étonna tous les travailleurs qui campoient autour du canal. Charlemagne qui étoit sçavant dans les Lettres, traita cela de chimere, & ordonna de continuer les travaux le lendemain : mais quand les ouvriers voulurent ouvrir la terre, il se forma un orage si prodigieux, accompagné d’éclairs, de tonnerre, de vents, de grosse grêle, & de pluie, que les ouvriers furent contraints de se retirer dans leurs cabannes toute la journée ; cet orage fut si violent, qu’il renversa tous les travaux ; l’Empereur attribua encore cet événement aux effets ordinaires de la nature, & ordonna de les recommencer le lendemain, quoiqu’on entendît encore les mêmes voix de ces esprits souterrains pendant toute la nuit, bien que le tems fût fort serein : mais aussitôt que les travailleurs voulurent se mettre à l’ouvrage, l’orage recommença comme le jour précédent, ce qui obligea les Entrepreneurs de venir faire leur remontrance à l’Empereur, & lui faire entendre que cette entreprise étoit apparemment désagréable à Dieu qui avoit réglé l’ordre de la nature dans le tems de sa création.
Deux très-agréables Pouponnes, Deux très-ravissantes Mignonnes, Au plus, de six et de dix ans, Et qui, bref, charment tous les Gens, Par leurs beaux Vers et par leurs grâces, Y sont, de Vénus, deux des Grâces, Dont à côté, voici les noms :154 Et deux petits Gars, fort mignons, En qualité d’Amours d’élite, Sont pareillement, à sa Suite. […] Un Zéphire fort goguenard, Et qui, d’aimer, sait, très-bien, l’Art Aide à l’Amour : et c’est, pour rire, Molière, qui fait ce Zéphire. […] Jupiter, termine la Pièce, Et remet, par tout, la liesse, En immortalisant Psiché, Après avoir, un peu, prêché Vénus, sa trop colère fille, De sa Machine qui fort brille : Et ce Dieu là, c’est du Croisy, Qui hautement, couronne ainsi, L’Oeuvre, de la belle manière.
Il plut si fort aux Romains, que Capitolin l’Historien dit que le Sénat en ordonna un qui fut représenté dans le Circle, pour honorer le triomphe des Empereurs Marc-Aurele & de Lucius Verus, où ils assisterent en habits de triomphes ; & qu’ils firent mettre des matelats étendus sous la corde, parce qu’un petit garçon de la troupe s’étoit laissé tomber en dansant devant eux : ce qui fut cause aussi que jusqu’au régne de Dioclétien, on tendit toujours des filets sous la corde, crainte de pareil accident, surtout quand les Empereurs honoroient les Danseurs de corde de leur présence. […] J’ai vû à Naples un Turc danser sans contrepoids, sur une corde qui traversoit une rue fort large, & attachée aux fenêtres d’un cinquiéme étage ; il ne paroissoit qu’un enfant à ceux qui le regardoient de la rue : aussi avoit-il pour se rassurer, des matelats sur le pavé, de la longueur de la corde. […] Néanmoins quand elle me rendit la mienne, dont la garde étoit fort pesante, je remarquai que la pointe étoit un peu ensanglantée. […] C’est pourquoi on peut regarder Sylene & Bacchus comme des excellens danseurs de l’Antiquité, de même, dit Pindare, qu’Apollon fut nommé Sauteur par admiration, & que les nommez Bulbo, Cratine & Callian ont aussi passé pour de très-fameux danseurs & sauteurs chez les Grecs ; c’étoit des qualitez fort estimables chez les Egiptiens, les Grecs & les Toscans dans l’Antiquité. Tuccaro, comme je l’ai déja dit, attribue la corruption de la danse Théâtrale aux Danseurs de corde, qui joignirent à leur troupe des danseurs, des bouffons & des farceurs, pour représenter sur leur Théâtre des danses qui tendoient à la corruption des mœurs, & surtout par des danses aussi impudiques qu’indécentes, qui furent si fort au goût de la jeunesse Romaine, que les Maîtres de Danses établirent dans Rome pour leur plaire, les danses Nuptiales pour la célébration des noces, qui étoient très-licentieuses, & dont les mouvemens exprimoient les devoirs maritals ; ce qui dura jusqu’au régne de Tibere, qui pour en réformer les abus, fit bannir de Rome par un Arrest du Sénat, la troupe des Danseurs de corde, & tous les Maîtres de Danses qui étoient établis dans Rome depuis un fort long-tems pour l’éducation de la jeunesse ; desorte que la danse y fut interdite jusqu’au régne de Caligula qui succéda à l’Empire.
Un jeune AVOCAT la suivait,89 Que fort versé l’on tient au Droit, Et qui, par un très digne zèle, Ne le pratique que pour Elle. […] La brune COMTESSE de GUICHE, À qui Nature fut peu chiche De ce qui des Cœurs est l’Aimant, Y parut fort, pareillement.
La Courante étoit autrefois fort à la mode : aussi est-elle une danse très grave, & qui inspire un air de Noblesse plus que les autres danses, qui ont un air enjoüé, & beaucoup diversifiez dans leurs Figures ; mais la Courante par ses mouvemens graves est distinguée, inspire un air de Noblesse ; aussi LOUIS XIV. d’heureuse memoire, n’a pas dédaigné de la preferer, puis qu’après les Branles qui sont, ou qui étoient les danses par où les Bals de la Cour se commençoient, comme je l’ai deja dit, Sa Majesté ensuite de ces Branles dansoit la Courante : il est vrai, qu’il la dansoit mieux que personne de la Cour, & qu’il lui donnoit une grace infinie. […] Quant aux danses qui sont en usage aujourd’hui, & dont les figures & les pas sont si fort diversifiez, qu’elles meritent que l’on y donne quelque application, c’est ce qui m’engage de fournir les moyens les plus faciles, pour faire tous ces differens pas chacun à leur particulier : afin que les Maîtres puissent avoir le plaisir, que par ces moyens aisez, cette jeunesse se trouve plus en état de profiter de leurs leçons.
En formant un Spectacle public, on n’eut pour ressources que quelques Maîtres à danser dont toute la science consistait à montrer les Danses nécessaires dans les Bals de cérémonie, ou un nombre fort borné de pas de caractère, qui entraient dans la composition des grands Ballets. […] Ce beau génie qui avait eu des idées si vastes, si nobles, si vraies sur le genre qu’il avait créé, n’eut que des vues fort bornées sur le Ballet qu’il n’avait que défiguré. […] On pouvait l’atteindre plus aisément dans le Ballet où il était fort au-dessous de lui-même ; ainsi on l’imita dans sa partie défectueuse, où on l’égala ; mais on ne fit que le copier dans sa partie supérieure, où peut-être ne l’égalera-t-on jamais.
Mademoiselle Sallé cependant qui raisonnait tout ce qu’elle avait à faire, avait eu l’adresse de placer une action épisodique fort ingénieuse dans la passacaille de l’Europe Galante. […] Dans un Opéra, genre faiblement estimé, fort peu connu, et de tous les genres de Poésie Dramatique, le plus difficile, les plus petites parties, ainsi que les plus grandes, doivent être dans un mouvement continu. […] Le pas des Lutteurs est certainement fort agréable ; mais je doute qu’il y en ait jamais eu aucun aussi lourdement déplacé.
Le Public de son côté aime à se faire une douce illusion, & à se persuader que le goût & les talents de son siecle sont fort au-dessus de ceux des siecles précédents ; il applaudit donc avec fureur aux cabrioles de nos Danseurs, & aux minauderies de nos Danseuses. […] Les applaudissements sont les aliments des Arts, je le sais, mais ils cessent d’être salutaires, s’ils ne sont distribués à propos : une nourriture trop forte, loin de former le tempérament, le dérange & l’affoiblit ; les commençants au Théatre sont l’image des enfants qu’un amour trop aveugle & trop tendre perd sans ressource. […] Rien n’intéresse si fort l’humanité que l’humanité même. […] En vain espérera-t-on de lui donner une forme nouvelle, tant que l’on sera esclave des vieilles méthodes & des anciennes rubriques de l’Opéra ; nous ne voyons sur nos Théatres que des copies fort imparfaites des copies qui les ont précédées ; n’exerçons point simplement des pas ; étudions les passions.
Elle est fort simple, et l’exécution en est aussi sure que facile. […] Cette machine est fort simple, et fait illusion. […] Cette machine pourrait être fort utile à l’Opéra, si elle y était employée avec soin, et qu’on eût surtout attention à la façon de peindre les différents petits châssis dont elle est composée. […] La première regarde le poète lyrique, et il doit avoir une connaissance fort étendue de la seconde et de la troisième, pour pouvoir avec fruit et sans danger donner une libre carrière à son imagination. […] Le bandage étant d’une très grande longueur, il ne saurait jamais être assez fort pour que la ferme soit bien stable ; en sorte que pour peu qu’on la touche en passant, elle remue, et paraît prête à tomber.
de même celles de nos bons maîtres français d’aujourd’hui sont fort supérieures à celles qu’on admirait sur la fin du dernier siècle. […] Lully qui a quelquefois excellé dans l’expression de son récitatif, mais qui fort souvent aussi l’a manquée, a été très fort au-dessous de lui-même dans l’expression de presque toutes les autres parties de sa musique. […] On sait que Quinault était un homme modeste et tranquille, que Lully n’avait pas honte de laisser croire à la cour et au public, fort au-dessous de lui. […] Les efforts redoublés de cette divinité barbare cèdent encore la victoire à un penchant plus fort. […] car il est certain que ce morceau et tout l’acte produisent un fort grand effet.
Robinet, lettre du 7 février 1671 Le fameux Ballet de Psiché, Qu’assez bien, l’on trouva touché, Dans ma pénultième Epître, Où j’en fis un fort long Chapitre, Ce spectacle, plein de beautez, Est, encor, de Leurs Majestez, Le cher Ebat Carnavaliste, Et le principal, sur la Liste, Des autres Divertissements.
Rameau, qui est celui de tous ses ouvrages le plus original et le plus fort de génie, décidera sans doute la question au préjudice des Fêtes Vénitiennes et des Fêtes de Thalie, peu goûtées dans leurs dernières reprises. […] Il est d’ailleurs fort singulier qu’il n’ait pas donné un plus grand nombre d’ouvrages d’un genre si aimable. […] Pluvinel, un des écuyers du roi, en fit exécuter un fort beau dans le fameux carrousel de Louis XIII. […] Il y a une sorte de pantomime noble de cette espèce dans la troisième entrée des Talents Lyriques, qui a beaucoup réussi, et qui est d’une fort agréable invention. […] Le premier, qui était né en Cilicie, imagina de représenter par le seul secours de la danse, des actions fortes et pathétiques.
Ie m’amusois vn iour à considerer d’où procedoit le malheur de plusieurs qui escriuent, que ceux en faueur de qui ils ont employé vne bonne partie de leur vie, ne payent ordinairement tant de sueurs & de veilles que de mocquerie & d’ingratitude, & apres auoir pezé les raisons que ie croyois la cause de ceste iniurieuse mescognoissance ; ie n’en trouuay point de plus forte que ceste naturelle dispatie qui a de tout temps tyrannisé les humeurs des hommes, & qui a donné credit à ce vieil dire, autant d’aduis que de testes. […] Ce que i’en ay peu apprendre se voit chez Scaliger, qui asseure y auoir autre fois eu quatre sortes de Danses, vne fort graue appellée Emelie, vne gaye dicte Cordax, vne autre qui mesloit à la gayeté quelque graue contenance & se nommoit Siccenix, la derniere s’appelloit Perrichie ou danse armee ainsi dicte d’vn certain Pirrhus qui en fut l’inuenteur, & ces danses ont depuis esté comparees aux modernes par Arena Prouençal, sçauoir l’Emelie, aux Pauanes & Bassedanses tant reguliere qu’irreguliere, le Cordax, aux Gaillardes, Tordions & Voltes, le Siccenix aux Bransles, la Perrichie aux Bouffons & Matassins, & c’est ceste cy que les Saliens instituez par Numa dansoient au nombre de douze aux festes Sacrees de Bellonne. […] Quant aux Canaries elles y sont aussi fort en vsage, mais leur origine est incertaine, les vns disent qu’aux Isles de ce nom là ceste danse est ordinaire, mais i’ayme mieux ceste opinion, que comme plusieurs de nos airs de Courante ont este tirez de quelques Balets, les Canaries viennent aussi d’vn Balet où les Danseurs representoient les Roys & Reynes de Mauritanie desguisez en Sauuages couuerts de plumages de diuerses couleurs.
Robinet, lettre du 8 août 1666 Au COLLÈGE des JÉSUITES, Pères Savants, bons Casuites, Bref, Artisans des beaux Esprits, MARDI, l’on délivra les Prix Fondés par le Roi notre SIRE, Qui des LETTRES chérit l’Empire, Pour animer les STUDIEUX, Qui se font grands Hommes chez Eux, Une TRAGÉDIE excellente, Dont la Scène était fort brillante, Et même le BALLET du TEMPS, Des plus moraux et plus galants, Cette Action accompagnèrent Et tous les Spectateurs charmèrent.
Loret, lettre du 1er mars 1664 Ce Ballet si bien ordonné, De divers agréments orné, Et d’invention singulière, Avec l’ordinaire lumière, Fut vers le soir, Jeudi passé, Pour la dernière fois dansé ; Et comme il est très véritable Que j’aime fort le délectable, J’allai dans cet aimable Lieu, Le revoir, et lui dire adieu Et d’autant que par bon rencontre J’étais placé presque tout contre, Le considérant de plus près, J’en remarquai les beaux attraits, De la Reine, et de chaque Belle, Qui faisaient Entrée avec Elle.
Robinet, lettre du 31 août 1669 Notre belle et riante COUR Des mieux se grandit chaque jour, Et maintenant elle s’égaie, AU CHÂTEAU SAINT GERMAIN EN LAYE, Dans son Spectacle très charmant, Composé magnifiquement De ravissantes Mélodies, De Ballets et de Comédies, Où la digne TROUPE du ROI Fait miracle, en très bonne foi, Jouant la PRINCESSE D’ÉLIDE, Pièce d’un style fort fluide, Partie en Prose et l’autre en Vers, Et pleine d’Ornements divers, Que, par l’ordre de notre SIRE, MOLIÈRE a faite, et c’est tout dire.
[…] Père Darrouy, profond Docteur, En est le noble et digne Auteur : Cette Histoire, des mieux traitée, Fut assez bien représentée, Et les Ballets entrelacés Fort agréablement dansés, Se trouvant, illec, d’assurance, Un des adroits Danseurs de France.
Loret, lettre du 25 août 1663 […] Trois Enfants, de même famille, Deux fils, une fort jeune Fille, Y donnent un plaisir de Roi, Par de charmantes mélodies, Par de petites Comédies, Et par d’agréables Ballets, Un peu plus graves que follets, Dansés avec grande justesse, Et qu’on voit, avec allégresse, Moyennant quelque argent comptant Que l’on ne plaint point en sortant : Bref, les trois Enfants que j’allègue, Dont le cadet est un peu bègue, N’ont pas, encor, je crois tous trois, Plus de dix-huit ans et dix mois.
Robinet, lettre du 20 décembre 1670 […] Enfin, leurs Confidents, aussi, Dont à côté, les Noms voici141 Y font très bien leur Personnage, Et dans un brillant Equipage, Ainsi que tous, pareillement, Dont l’on ne doute nullement, Font dans le Bourgeois gentilhomme, Où La Grange, en fort galant Homme, Fait le Rôle qui lui sied mieux, Savoir celui d’un Amoureux.
Un des reproches que l’on faisoit à Muréna, étoit qu’il avoit dansé en Asie : cette accusation parut à Cicéron si grave et si forte, qu’il n’eut garde de justifier Muréna, supposé qu’il eût dansé, comme s’il n’avoit rien fait en cela de bien répréhensible ; mais il nia constamment le fait : ce qu’il dit à ce sujet est tout-à-fait remarquable. […] S’il lui fait avec vérité ce reproche, c’est une accusation bien forte et bien grave ; mais s’il est faux, c’est un sanglant outrage fait à Muréna.
Je crois voir, Monsieur, la grenouille de la fable : elle crève en faisant des efforts pour s’enfler, et les danseurs se rompent et s’estropient en voulant imiter l’Italien fort et nerveux. […] Ce seroit encore une autre erreur que de se persuader qu’un homme fort et vigoureux doit s’élever davantage qu’un homme foible et délié : l’expérience nous prouve tous les jours le contraire. […] D’un autre côté, nous avons des hommes foibles dont l’exécution est moins nerveuse, plus propre que forte, plus adroite que vigoureuse, et qui s’élévent prodigieusement. […] Plus la pression est forte, plus la réaction est grande, et, par conséquent plus le saut a d’élévation. […] Nous voyons journellement des danseurs forts et vigoureux qui n’ont ni à-plomb, ni fermeté, et dont l’exécution est déhanchée.
Si ces précautions opérent efficacement sur des animaux robustes, combien une vie sage & réglée n’influeroit-elle pas sur des êtres naturellement foibles, mais appellés par leur fortune & par leur état à un exercice violent & pénible qui exige la complexion la plus forte & la plus robuste. […] Je crois voir, Monsieur, la grenouille de la Fable : elle creve en faisant des efforts pour s’enfler, & les Danseurs se rompent & s’estropient en voulant imiter l’Italien fort & nerveux. […] Ce seroit encore une autre erreur que de se persuader qu’un homme fort & vigoureux doit s’élever davantage qu’un homme foible & délié. […] Elle est, si j’ose le dire, feinte & ne dépend entiérement que de l’adresse ; d’un autre côté, nous avons des hommes foibles dont l’exécution est moins nerveuse, plus propre que forte, plus adroite que vigoureuse, & qui s’élevent prodigieusement. […] Nous voyons journellement des Danseurs forts & vigoureux qui n’ont ni à-plomb ni fermeté, & dont l’exécution est déhanchée.
Après que l’esprit intérieur nous a presque entièrement abandonnés dans un siècle marqué à tant de traits qui le déshonorent, et qui nous rapprochent si fort du paganisme, les danses seroient-elles moins dangereuses qu’elles ne l’étoient du temps des saints Pères, où un grand nombre de chrétiens vivoient encore dans la ferveur du christianisme ; au lieu qu’il n’y en a presque plus aujourd’hui qui en connoissent et en sentent la sainteté et les devoirs ? […] Car aussitôt, considérant les danses de la manière dont elles se font aujourd’hui, il ajoute « que ces divertissemens penchent fort du côté du mal, et sont très-dangereux ». […] Et un des grands dangers qu’il y trouve, « c’est que l’amour profane et impur s’y engendre fort aisément » : c’est pourquoi il croit pouvoir dire des danses ce que tous les médecins disent des champignons. […] Aussi, ce saint a-t-il cru devoir prescrire différentes considérations bonnes et fort saintes, auxquelles il dit « qu’il faut avoir recours après les danses, pour empêcher les impressions dangereuses que le vain plaisir qu’on a reçu seroit capable de faire. » Et quelles sont ces considérations ?
Robinet, lettre du 11 janvier 1670129 Toujours la Cour, nombreuse et gaie, Gîte en son Saint Germain en Laye, Dont à Paris, il déplaît fort, Ne pouvant avoir un doux Sort, Sans voir son Grand, et charmant Sire.
Maintenant, l’on le danse encore, Durant qu’un chagrin me dévore De n’y pouvoir me transporter Pour ce rare plaisir goûter, Par ce qu’à présent je travaille, Et si je ne fais rien qui vaille Dans mon Epître, d’aujourd’hui, Lecteur, prends-t’en à mon ennui À ce mien labeur fort contraire, Et qui ne fait que me distraire.
Les Danseurs du BALLET DU TEMPS Donnèrent bien du passe-temps ; Ils dansèrent tous d’importance, Et le Maître de cette danse, L’adroit CHICANEAU, qu’on vanté, Fort dignement s’en acquitta.
Je crains fort que la tendance à extérioriser la musique par la danse ne soit en elle-même abusive. […] Cependant l’une de ces jeunes filles, dont la belle tenue, discrète et grave, a conféré une noblesse réelle à un spectacle fort mince quant au fond, l’une de ces jeunes filles, dis-je, aura dû attirer l’attention du spectateur clairvoyant.
Loret, lettre du 25 février 1662 Le Grand Ballet d’Hercule Amant, Si magnifique et si charmant, Fut Lundi, pour la fois dernière, Dansé de la belle manière : Je ne l’avais point encor vu D’un si brillant éclat pourvu ; Et du Dieu Mars la seule Entrée, Digne, certes, d’être admirée, Avec ses nobles Combattants, Surprit fort tous les Assistants. […] Quoi que ce ne fût qu’un ébat, Il s’y fit un fort beau combat, Avec diverses sortes d’armes, Qui pour nous étaient de doux charmes ; Dans ce Camp, le Roi secondé24 De l’Altesse du Grand Condé25 (Un des preux Héros de la Terre)26 Y parut en foudre de guerre, En Dieu triomphant et vainqueur ; Saint-Aignan, dont le brave cœur Eut toujours la Valeur pour guide, Et qui se porte en intrépide Dans les périls et les hasards, Faisait le premiers des Césars ; Rassan (qui sait l’art de combattre) L’illutre Amant de Cléopâtre, Et quantité d’autres Humains, De Chefs guerriers, Grecs et Romains.
Loret, lettre du 20 août 1661 Mais il ne faut pas que je die Le reste de la Comédie, Car bientôt Paris la verra, On n’ira pas, on y courra ; Et chacun prêtant les oreilles À tant de charmantes merveilles, Y prendra plaisir, à gogo, Et rira tout son saoul ; ergo, Pour ne faire, aux Acteurs, outrage Je n’en dirai pas davantage, Sinon qu’au gré des Curieux, Un Ballet entendu des mieux, Qui par intervalles succède, Sert à la Pièce, d’Intermède, Lequel Ballet fut composé Par Beauchamp, Danseur fort prisé, Et dansé de la belle sorte Par les Messieurs de son Escorte ; Et, même, où le sieur d’Olivet, Digne d’avoir quelque Brevet, Et fameux en cette Contrée, A fait mainte agréable Entrée.
Loret, lettre du 26 août 1662 Mardi, le vingt-et-deux tout juste, Du mois nommé du nom d’Auguste, Dans ce Collège tant vanté Que tu vois écrit à côté, Les Ecoliers des Jésuites, Dont les Personnes sont instruites Aux Sciences, soir et matin, Représentèrent en Latin, Sur un Théâtre magnifique, D’Egeric, l’Histoire tragique, Dont les Vers, à ce que m’on dit Des Gens d’esprit et de crédit, (Et me l’ont dit en conscience) Sont pleins d’art et d’intelligence ; Le Père Du-Bois, ce dit-on, Sage et sensé comme un Caton (Je n’ose dire davantage) Est l’Auteur du susdit Ouvrage, Tiré de Grégoire de Tours, Et rempli de fort beaux Discours.
Robinet, lettre du 26 décembre 1666 L’auguste BALLET des NEUFS SŒURS, Où l’on voit d’excellent Danseurs, Divertit toujours à merveille La COUR des Cours la nonpareille, Et, parmi les OBJETS poupons Lesquels font là des Pas mignons, TOUSSI, cette GRÂCE naissante,72 De plus en plus est ravissante , De FIENNE, qu’on ne saurait voir Sans mille Attraits apercevoir, Dedans sa Danse paraît telle Qu’on meurt de danser avec Elle, Et du LUDRE, l’ASTRE LORRAIN73 Qui des Cœurs s’empare soudain, Par sa belle et forte Influence, Les prend illec comme en Cadence.
Il faut toutes fois notter qu’à tous les pas assemblez de ce bransle, & non ailleurs (pour ne rien forcer, & danser sans contrainte,) il faut plier tant soit peu les genoüils, mais il est sur tout necessaire de se releuer sur la pointe des pieds, & si quelquefois pour diuersifier on veut faire glisser au deuxiesme pas le pied droict derriere, en sorte que le corps tournant vn peu du costé de celuy qu’on meine, la veuë tourne aussi & non autrement, on le pourra faire, sans leur permettre, comme font plusieurs de regarder par dessus les espaules, ny certains branslemens de corps, que quelques vns y font obseruer, dont les actions sont fort des agreables. […] A ce bransle ne faut iamais plier les genoüils, que comme insensiblement aux pas assemblez, tenant tousiours le corps & la teste ferme, à fin de le couler doucement de costé, & pour empescher de tourner le dos à celuy qu’on meine (deffaut ordinaire à plusieurs) il faut porter les pointes des pieds fort ouuertes, principalement celle du droict. […] Quand elle aura faict la reuerence comme i’ay enseigné aux bransles, se resouuenant de tenir les pointes des pieds ouuertes, il luy faudra faire porter negligemment trois pas sans chasser, ny s’esleuer hors terre, mais pliant vn peu les genoüils se releuer sur la pointe du pied qui se trouuera à terre, faisant retirer auec la mesme douceur tant soit peu l’espaule du costé du pied qui aduance, & apres auoir fait chasser le troisiesme faire vn pas porté & vn pas chassé sur l’vn, puis sur l’autre pied, iusqu’à la fin, sur tous lesquels pas, faut faire plier esgalement les genoüils, à fin que le corps bien droit suiue l’action des pieds, & prendre garde que le pied qui chasse soit porté esgal au costé du chassé, & s’esleuant hors terre sur le pas porté, faut couler doucement le chassé tombant tousiours sur la pointe des pieds, il y faut pourtant obseruer vne mesure vn peu viste sans bransler la teste, aduancer le ventre, ny plier de la ceinture, & en pliant les genoüils tenir le corps droit d’vne façon esgale, sans pancher de costé ny d’autre ; au surplus ces mesmes pas seront fort aduantageux pour celles qui manquent de disposition, ne peuuent s’esleuer hors terre. […] Ie parlerois d’vne autre forte de pas qui ont bonne grace estans bien faits par vne Dame, si la negligence qu’on apporte auiourd’huy à danser la Gaillarde ne m’en empeschoit. […] Car celles-là sont fort blasmables qui par timidité ou par desdain, desobligent (par vn ie ne sçay pas danser) ceux qui leur font l’honneur de les en prier, & quoy qu’elles croyent en estre honnestement quittes par telles ou semblables paroles, qui sans doute auroient bonne grace, si elles estoient priees de quelque autre danse, ne laissent pas pourtant en celle-cy où la qualité de leur excuse se change en pur refus d’offenser la courtoisie d’vn Caualier que la honte de se veoir refusé feroit volontiers rougir, s’il n’auoit la grace assez asseuree, ou n’estoit d’humeur propre pour tourner le tout en raillerie.
Je dis donc que vous devez passer le pied doucement devant vous, en laissant le corps posé sur le pied de derriere, duquel son genouil est obligé de se plier par le poids du corps : au lieu que la jambe qui est devant doit être fort étenduë : mais l’inclination du corps se fait de suite plus ou moins profonde selon la qualité des personnes que vous saluez, & la tête même s’incline, ce qui est encore une des parties essentielles de la reverence, en vous pliant la ceinture, n’étendez pas le genouil de la jambe qui reste derriere, parce que cela feroit lever la hanche, & de plus vous feroit paroître le corps de travers, au lieu qu’étant comme je vous le démontre, toutes les parties se soutiennent par leur opposé : mais lorsque vous vous redressez, que ce soit avec la même douceur que vous vous êtes plié : & en vous redressant, laissez poser le corps sur le pied de devant, ce qui donne la liberté à celui de derriere d’agir, soit pour aller en avant, ou se porter à côté pour faire une seconde reverence qui se fait ordinairement en arriere, ce que j’expliquerai dans la maniere de faire les reverences en entrant dans un appartement. […] Autre remarque très-necessaire, c’est que lorsque vous pliez le corps, de ne pas incliner si fort la tête que l’on ne puisse vous envisager, faute d’autant plus grossiere que vous jettez la personne dans le doute de sçavoir si c’est elle que vous saluez, de même qu’avant de commencer votre reverence de regarder modestement la personne, ce que l’on appelle adresser sa reverence avant de la faire, je suis très-persuadé que lorsque l’on fera attention à ces remarques que je viens de faire on ne fasse ces reverences avec toute la grace qu’elles méritent d’être faites.
Je trouve ce pas fort gracieux lorsqu’il est bien fait, & il merite que l’on y fasse attention, il se fait aussi de côté en allant sur une même ligne, mais il se fait differemment de celui en avant. Par exemple, ayant le corps posé sur le pied gauche vous pliez, & vous élevez en sautant & assemblant le pied droit auprès du gauche à la premiere position, en tombant sur les deux pointes ; mais le corps posé sur le gauche, parce que du même tems vous portez le droit à côté à la deuxiéme position en vous élevant dessus pour faire votre pas tombé ; qui fait la seconde partie dont le pas de Gaillarde est composé ; mais comme j’ai fait une description assez étenduë touchant le pas tombé, cela me paroît inutile de le repeter une seconde fois, ce pas se prévient encore par un coupé & fait un fort bon effet par les mouvemens soûtenus que l’on doit observer pour le bien faire.
Ils chantent, ils dansent Ballets, Tantôt graves, tantôt follets ; Leurs femmes ne sont pas fort belles, Mais paraissent spirituelles, Leurs sarabandes et leurs pas Ont de la grâce et des appâts, Comme nouveau ils divertissent, Et de leurs castagnettes ravissent : Enfin, je puisse être cocu, Si je leur plaignis mon écu ; Et je crois que tout honnête Homme Leur doit porter pareille somme Pour subvenir à leur besoin, Puisqu’il sont venus, de si loin, Avecque Comédie et danse, Donner du plaisir à la France.
Faute d’avis, venus à temps, Je ne vis point ce passe-temps, Car, pour lors, j’étais à Versailles, Avec des gens levant la paille, Qui n’étaient ni Comtes, ni Marquis, Mais des Gens de mérite exquis, Et des Dames belles et bonnes, Deux desquelles sont fort Mignonnes, Et toutes, très certainement, Pleines d’esprit et d’agrément ; Nous vîmes le subtil Dédale De cette Demeure Royale, Du jardin les charmants attraits, Les belles Chambres, les Portraits, Nous fîmes grande mangerie, Nous vîmes la Ménagerie, Dont les chères commodités, Dont les belles diversités, Dont les raretés infinies Réjouissent les Compagnies, Et cela tint lieu de Ballet, À votre très humble Valet.
Robinet, lettre du 9 mars 1669 Le lendemain, le Grand Ballet Chez le ROI joua son Rôlet, Et le lundi d’ensuite encore, S’entend bien, le Ballet de Flore, Où la Cohue et le Concours Furent tels, en ces derniers jours, Qu’à part Française Courtésie116, L’Officier, dans sa frénésie, Repoussait par de félons coups Le susdit Sexe aimant le doux, Et (dont il n’était pas en fête) Le jetait tout franc à la tête, Si qu’un Huissier en eut au Chef Fort malle bosse, par méchef.
Le public, de son côté, aime à se faire une douce illusion, et à se persuader que le goût et les talens de son siècle sont fort au dessus de ceux des siècles précédens ; il applaudit avec fureur aux cabrioles de nos danseurs, et aux minauderies de nos danseuses. […] Les applaudissemens sont les alimens des arts, je le sais ; mais ils cessent d’être salutaires, s’ils ne sont distribués à propos, une nourriture trop forte, loin de former le tempérament le dérange et l’affoiblit : Les commençans au théâtre sont l’image des enfans que l’amour trop aveugle et trop tendre de leurs parents perd sans ressource. […] rien n’intéresse si fort l’humanité que l’humanité même.
Non ; pour les jeunes personnes qui aspirent à devenir les madones de l’art… chorégraphique, il s’agit simplement de parvenir à ce degré d’élasticité — de muscles, de mœurs et de langage — dont le docteur Véron nous fournit l’exemple suivant dans le troisième volume de ses Mémoires : « Je m’aperçus que l’une de mes ballerines, quoique dans une position intéressante, n’en continuait pas moins son service, fort pénible à cette époque. […] … Et les rendrait fort heureuses, en somme. […] — Mademoiselle, lui dit-il, votre mère était une fort honorable commerçante.
Du Théâtre les changements, Décorations, ornements, Augmentent la magnificence De cet Ouvrage d’importance, Et les talents particuliers De l’esprit de Monsieur MOLIÈRE, Par un Concert incomparable, La rendent fort recommandable.
Quoique le Menuet le plus uni selon le goût de beaucoup de personnes, soit le mieux dansé : cependant, j’y ai vû faire quelques agrémens, qui lui donnent plus d’enjoüement, & plus de grace, & comme je vois qu’ils sont fort en usage, c’est ce qui m’engage de vous donner l’intelligence de les faire, afin que l’on puisse les mettre en pratique, soit en donnant la main, ou dans d’autres endroits. […] Ayant fini votre pas de Menuet en avant, & le corps posé sur le pied gauche, vous approchez le pied droit auprès vous pliez, & vous vous relevez du même tems, ensuite vous glissez le pied droit devant jusqu’à la quatriéme position, & vous élevés dessus, & faites un jetté échapé du pied gauche, & reprenez votre pas de Menuet ; mais pour se mettre dans l’habitude de le faire facilement, c’est de s’exercer, d’en faire plusieurs alternativement avec un pas de Menuet, & lorsque vous avez acquis cette facilité de les faire, vous les placez dans les endroits convenables, où ils font un effet tout des plus gracieux : par exemple, en presentant la main lorsque vous avez fini votre pas de Menuet en revenant du côté gauche, & en allant à la Demoiselle, vous levez le bras droit, comme je l’ai déja dit, dans la maniere de presenter les mains dans ce même tems à la place d’un pas de Menuet en avant, vous faites ce tems qui doit être fort soûtenu, on peut dans ce même tems faire un petit mouvement du corps, & la tête fait aussi une legere inclination, & le corps & la tête se redressent en faisant le jetté échapé, & vous reprenez de suite vôtre pas de Menuet, en continuant la Figure que vous devez faire.
Une forte matrone, qui tient les balances, le regard dans les frises, sans voir où elle pose le pied, c’est la justice ; et l’on devine aisément qu’elle va boiter dans la coulisse ; car elle ne sortira pas de scène, sans avoir trébuché.
D’autre part, un Marquis Français, Qui soupire dessous ses Lois, Se servant de tout stratagème Pour voir ce rare Objet qu’il aime (Car, comme on sait, l’Amour est fin), Fait si bien qu’il l’enlève enfin, Par une Intrigue fort jolie.
Cette premiere est d’avoir les jambes fort étenduës, les deux talons l’un près de l’autre & les pieds en dehors également.
Robinet, lettre du 7 juillet 166899 Mais, avant que l’on en soit là (Et toute la Cour dit cela), La REINE pourra, sans obstacle, Voir l’incomparable Spectacle Que notre susdit SOUVERAIN ; De qui le Sort est surhumain, Fait préparer en son VERSAILLE, Où, nuit et jour, fort on travaille.
Et si nous signalons dans la petite variation de Mlle Soulé quelques entrechats — cinq de volée brillants, si nous constatons les aptitudes plastiques, fort appréciables, de M.
J’en puis rendre ce témoignage, Grâce aux Dieux, je vis cet Ouvrage, Ouvrage fin et délicat, Dont Monsieur l’Éminent Légat, Eut dans une superbe Salle À Fontainebleau le Régale ; Il la vit attentivement, Il y prit grand contentement ; Et malgré son humeur hautaine, Quittant la gravité Romaine, Il rit fort aux endroits plaisants, Aussi bien que nos Courtisans.
Il consistait en Sept Entrées, Qui furent fort considérées, Mais, surtout une, des Plaisirs, Qui flattent les jeunes Désirs, Où paraissait leur Source même Dans le GRAND PORTE DIADEME, Puisque c’est aux soins glorieux De ce plus puissant Fils des Dieux, Qu’on doit notre Heur, & notre Joie, Et ces beaux jours filez de soie.