. — L’effet d’un souvenir. — Le diable. — M. […] III Je demande la permission de m’arrêter pour me livrer à l’éclat de rire insensé que m’arrache ce souvenir d’horlogerie poétique. […] Les souvenirs de jeunesse ont cela de particulier, c’est qu’en les remuant on y trouve toujours une impression qui ressemble beaucoup aux giboulées de mars.
Je n’ai qu’à jeter un regard derrière moi, à travers la cité du souvenir, pour que les images enfantines, émues par mon art, se lèvent en masses extasiées. […] Mon souvenir, ou plutôt le souvenir de mes danses, demeurait si vif en lui, résumait si bien l’idée qu’il se faisait de la beauté et de l’art qu’il en devint « poète ». […] — Oui, je m’en souviens.
J’ai pesté des fois plus de mille Contre ma mémoire débile, Et je jure qu’à l’avenir (Quoi que peu dans son souvenir) J’aurai toujours soin de sa gloire, Et d’en embellir mon Histoire.
Une femme, passe encore ; mais il me souvient avec horreur d’un danseur scandinave : je ne sais rien de plus ridicule, de plus laid et de plus lourd que ce Lapon gras, fessu, aux larges cuisses, au ventre mou qui faisait la femme, bien pis l’almée.
De ces danseuses cambodgiennes, que nous n’avions qu’entrevues, minuscules et distantes, sur le plateau de l’Opéra, il nous était resté, avec le souvenir d’une aventure prodigieuse, ce malaise salutaire que nous cause l’évidence bien nette de notre infériorité. Ce souvenir s’étiolant peu à peu, le javanais Raden Mas Jodjana, qui vient de danser pour quelques invités dans un atelier de la rive gauche, est venu renouveler, quelque chose de cette joie et raviver les mêmes préoccupations.