A presques passé, tout de bon, Dans la Nacelle de Caron, Où, par feinte, on voit qu’elle passe, Au Ballet, sans qu’elle trépasse, Mais son Mal, d’abord, véhément, Se modère présentement, Et bien-tôt, étant drue, et saine, Icelle reprendra son Rôle, sur la Scène.
Il faut d’abord sçavoir que le vrai pas de Menuet est composé de quatre pas, (qui cependant par leurs liaisons, suivant le terme de l’art ne font qu’un seul pas,) ce pas de menuet a trois mouvemens & un pas marché sur la pointe du pied ; sçavoir, le premier est un demi-coupé du pied droit, & un du gauche, un pas marché du pied droit sur la pointe & les jambes étenduës ; à la fin de ce pas vous laissez doucement poser le talon droit à terre, pour laisser plier son genoüil ; qui par ce mouvement fait lever la jambe gauche, qui se passe en avant en faisant un demi-coupé échappé, qui est le troisiéme mouvement de ce pas de menuet & son quatriéme pas. […] Ayant donc le pied gauche devant, vous apportez le corps dessus, en approchant le pied droit auprès du gauche à la premiere position, & de la plier sans poser le droit à terre, & lorsque vous êtes assez pliez, vous passez le pied droit devant vous à la quatriéme position, & vous élever du même tems sur la pointe du pied en étendant les deux jambes près l’une de l’autre, de même qu’il est représenté par la quatriéme Figure des demi-coupez, que l’on nomme équilibre, & de suite vous posez le talon droit à terre, pour avoir le corps plus ferme, & plier du même tems sur le droit sans poser le gauche, & de là le passer devant, de même que vous avez fait du pied droit, jusqu’à la quatriéme position, & du même tems s’élever dessus ; & marcher les deux autres pas sur la pointe des pieds l’un du droit & l’autre du gauche, mais au dernier il faut poser le talon à terre, afin de prendre votre pas de menuet avec plus de fermeté. […] Celui en arriere se fait approchant de même que celui en avant, à l’exception qu’au premier demi-coupé du pied droit, vous laissez la jambe gauche étendue devant vous & en pliant sur le droit, pour le second le talon gauche s’approche du pied droit, où il s’arrête lorsque vous pliez jusqu’à la derniere extremité, que vous le passez derriere pour vous relever ; ce qui vous donne plus de facilité de le bien faire, au lieu que si vous le passez en pliant, vous ne vous relevez jamais si bien, & les genoux paroissent toujours pliez ; toutes ces remarques sont très-essentielles pour bien danser le menuet, sur tout.
Ayant enseigné la maniere de faire tous les differens pas, qui ne sont que pliez & élevez, je passe à present à ceux dont les mouvemens doivent estre plus forcez ; qui sont les pas sautez, & comme le pas de Sissonne m’a paru un des plus faciles, je commencerai par lui en enseignant la maniere de le faire. […] Il se fait de même en arriere, excepté qu’au lieu de prendre le mouvement de derriere pour venir en avant, il doit se prendre de la jambe de devant, pour la passer derriere en tombant sur les deux pieds, en vous relevant sur la jambe qui a passé derriere.
Le Coupé ordinaire est composé de deux pas ; sçavoir, un demi-coupé, & un pas glissé : comme je m’aperçois que le terme de glisser pourroit n’être pas connu de tout ceux qui apprennent à danser ; sur tout cette jeunesse à qui trés-souvent la trop grande vivacité leur fait oublier ce que leur Maître leur enseigne ; c’est à cette occasion que je fais la remarque suivante : Le pas glissé est de passer le pied doucement devant soi en touchant le parquet ou plancher très-legerement ; ce qui doit s’entendre que ce pas est plus lent que si l’on portoit le pied sans qu’il touchât à terre, ainsi se glisser signifie un pas trés-lent, ce qui fait en partie la perfection du coupé : il doit être plié à propos, élevé en cadence & soûtenu gracieusement. […] Ainsi pour commencer ce pas si c’est du pied droit, il faut ayant le pied gauche devant & le corps posé dessus, aprocher le pied droit auprès à la premiere position, puis plier les deux genoux également, & étant pliez, vous passez le pied droit devant jusqu’à la quatriéme position & vous élevez dessus la pointe, en étendant les genoux & du même tems le talon droit se pose, & le genou se plie, mais la jambe gauche se glisse devant jusqu’à la quatriéme position, & le corps se posant dessus ; il termine l’étenduë de votre coupé. D’autres personnes le prennent differemment ; c’est qu’après votre demi-coupé, étant élevé sur la pointe il glisse le pied dans le même tems qu’il s’éleve jusqu’à la quatriéme position ; en le passant la pointe doit être basse, la jambe bien étenduë, & à mesure que cette jambe gauche se passe devant, le genou droit se plie, & par ce mouvement renvoie le corps sur le pied gauche, ce qui termine ce pas ; ces deux manieres sont bonnes l’une & l’autre ; mais je trouve que la premiere est plus aisée, en ce que le corps est plus assuré par le talon droit que vous appuyez ; il se fait aussi en arriere, & de côté, aux positions près qui sont differentes selon le chemin que vous devez tenir. […] Ce battement fait l’équivalent du temps que l’on est à le soûtenir, lorsque vous le passez devant.
Subligny, seconde semaine, lettre du 17 février 1667 Mon style passe le galant, Ma bouche vous semblera grasse, Mais, mon charmant Époux, il faut que ce temps passe, Tout est de Carême prenant.