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6. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre premier — Chapitre IV. Origine de la Danse, définition qui en a été faite par les Philosophes. »

Ces sons inarticulés qui étaient une espèce de chant ; et (si on peut s’exprimer ainsi) la Musique naturelle, en se développant peu à peu, peignirent d’une manière non équivoque, quoique grossière, toutes les différentes situations de l’âme, et ils furent précédés et suivis à l’extérieur de gestes relatifs à toutes ces diverses situations. Le corps fut paisible ou s’agita, les yeux s’enflammèrent ou s’éteignirent ; le visage se colora ou pâlit ; les bras s’ouvrirent ou se fermèrent, s’élevèrent vers le ciel ou retombèrent vers la terre ; les pieds formèrent des pas lents ou rapides ; tout le corps enfin répondit par des positions, des attitudes, des sauts, des ébranlements aux sons dont l’âme peignait ses mouvements. […] Observez cette pâleur subite, ces contorsions vives, ces cris perçants, lorsque leur âme est affectée d’un sentiment de douleur. […] Les différentes affections de l’âme sont donc l’origine des gestes, et la Danse qui en est composée, est par conséquent l’Art de les faire avec grâce et mesure relativement aux affections qu’ils doivent exprimer.

7. (1908) Quinze ans de ma vie « Préface » pp. -

Cette éblouissante artiste se révèle une dame d’un sens juste et délient, douée d’une pénétration merveilleuse des âmes, qui sait découvrir la signification profonde des choses insignifiantes en apparence et voir la splendeur cachée des âmes simples. […] Au contraire, elle pénètre avec facilité dans les âmes les plus hautes des artistes et des savants. […] Un jour vous retrouverez cette apparition dans la réalité de la vie, éteinte et cachée sous ces voiles plus épais dont s’enveloppent les mortels, et vous vous apercevrez que c’est une personne pleine d’esprit et de cœur, une âme un peu mystique, philosophique, religieuse, très haute, très riante et très noble.

8. (1921) Danse et musique « Danse et musique, par André Suarès — I » p. 134

Tout ballet laisse un regret : l’âme un instant ravie n’est pas satisfaite : elle retombe ou le spectacle l’a prise, d’où la musique l’a relevée, l’invitant à la suivre, mais ou la danse ne lui a pas permis de se fixer. […] Et qu’est-ce donc, pour l’art et la suprême convoitise de l’homme, que le corps même le plus charmant, s’il est sans âme ?

9. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 24 mai. « Pétrouchka » et « Lâcheté » ou l’histoire vue par le ballet. »

Il reste juste assez d’âme en ce monde changé pour en meubler les corps de cinq êtres humains ; et quelle âme, juste Dieu ! […] Et le jour est proche — on le sent de toute son âme crispée par l’appréhension — où cette masse inerte, aveugle, écrasante, se ruera sur la Russie pantelante.

10. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre XI. » pp. 107-114

La seconde que l’on nomme danse en action est, si j’ose m’exprimer ainsi, l’âme de la première ; elle lui donne la vie et l’expression, et en séduisant l’oeil elle captive le coeur, et l’entraine aux plus vives émotions ; voila, ce qui constitue l’art. […] J’avoüerai, avec regret, que cette réunion si précieuse est bien rare à rencontrer, parceque les danseurs mettent toute leur étude dans le mouvement des pieds et des jambes, que loin d’exercer leur esprit et leur âme, ils négligent le langage des passions, l’action animée et parlante que doit avoir le geste ; mais en confondant l’action avec le mouvement, ils se trompent, et s’égarent sans cesse. J’ai dit ailleurs, et je dois le répéter, que le devoir d’un acteur pantomime est de faire passer dans l’âme du spectateur par l’expréssion vraie de ses mouvemens, de ses gestes, et de sa physionomie, les sentimens, les passions dont il est agité. […] Si ces acteurs célèbres étoient. consultés, ils ne pourroient rendre compte des moyens heureux, que leur âme leur a fournis, pour exprimer avec des teintes justes les passions et les sentimens qui les embrâsoint. […] demandez lui raison de sa foiblesse, et du froid qui s’est répandu dans sa déclamation et dans son jeu ; il vous répondra qu’il étoit mal disposé, que ses efforts étoient superflus, et. que son âme sembloit lui refuser l’énergie qu’il avoit la veille.

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