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23. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Lettre première. » pp. 8-13

Personne assurément ne s’avisera de citer comme une preuve de goût de notre nation pour le chant, ces insipides rapsodies dont les Troubadours modernes assourdissent tous les jours nos oreilles, et qui pourtant font les délices de la majeure partie du peuple : mais si vous aviez parcouru comme moi les principales villes d’Italie, vous auriez entendu à Vénise de simples gondoliers chanter en ramant les beaux vers du Tasse, de l’Orlande Furioso, de Métastase, avec plus de grace et de justesse que l’on ne chante à l’opéra de Paris ; vous eussiez été surpris de rencontrer le soir dans les rues des ouvriers de toutes les classes, formant entre eux des concerts plus mélodieux et plus touchans que le Sabbat musical dont retentissent nos Cafés des Boulevards et nos catacombres du Palais Royal. Alors vous auriez été convaincu, Monsieur, qu’en Italie, les personnes riches ne sont pas les seules qui cultivent la musique ; que le goût de cet art y est généralement plus pur, plus répandu, plus éclairé qu’à Paris ; et que les paroles n’y sont pas plus négligées qu’en France, ou le plus bel opéra ne se soutient que par la perfection du poëme, l’empire de la musique, des décorations et des ballets : quant aux paroles, on ne les entend point et la plupart de nos chanteurs et de nos chanteuses se sauvent par les cinq voyelles. […] Est-ce donc cette quantité prodigieuse de partitions gravées sans choix, et ce mélange du beau et du médiocre, qui peut faire pencher la balance en faveur de notre goût musical ? […] Les Italiens sont à cet égard bien plus sages que les Français ; mais à défaut de graveurs il y a un grand nombre de copistes, tous musiciens ; et comme il paroît toutes les années soixante opéras nouveaux, les copistes voyagent, correspondent entre eux, font des échanges, et n’écrivent que les Ariettes, les Duo, les grands Récitatifs avec accompagnemens, les Cavatines, les Trio, les Quatuors, les Finales, c’est à dire, tous les morceaux qui ont été vivement applaudis par le public, et qui portent avec le caractère de la nouveauté, l’empreinte du goût et le cachet brulant du génie.

24. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre deuxième — Chapitre VII. Des Bals publics »

On vit au Palais-Royal et à Sceaux des Bals masqués où régnèrent le goût, l’invention, la liberté, l’opulence. […] La nouveauté de ce spectacle, la commodité de jouir de tous les plaisirs du Bal sans soins, sans préparatifs, sans dépense, donnèrent à cet établissement un tel succès, que dans un excès d’indulgence, que j’ai vu durer encore, on poussa l’enthousiasme jusqu’à trouver la salle belle, commode, et digne en tout du goût, de l’invention et de la magnificence Française. […] Avec un peu de soin, une imagination médiocre, et quelque goût, on rendrait ce Spectacle le fond et la ressource la plus sûre de l’Opéra, une école délicieuse de Danse pour notre jeune Noblesse, et un objet d’admiration constante pour cette foule d’Étrangers, qui cherchent en vain dans l’état où ils le voient, le charme qui nous le fait trouver si agréable.

25. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre premier — Chapitre III. Objet de cet Ouvrage. »

Ils ont des goûts exclusifs pour certains genres ; et le bon goût les admet tous ; il ne rejette que le mauvais, dans quelque genre qu’il puisse être : ils ont enfin des préjugés, et les préjugés sont le poison le plus subtil de l’esprit. Un Traité fondé sur l’expérience de tous les temps, serait par conséquent le moyen le plus sûr, de leur ouvrir les yeux sur l’injustice de leurs préférences, sur le peu de justesse de leurs goûts, sur les erreurs de leurs opinions.

26. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE VIII. » pp. 129-194

Non, Monsieur, mais un Poëte doit avoir de l’esprit & du goût. […] Ne peut-il pas encore sentir les défauts qui se rencontrent dans les vêtements par des négligences ou un faux goût, qui s’éloignant du Costume détruit toute illusion ? […] Que signifient tous ces corps sans ame, qui se promenent sans graces, qui se déploient sans goût, qui pirouettent sans à-plomb, sans fermeté, & qui se succedent d’Acte en Acte avec le même froid ? […] Je bannirois tout arrangement symmétrique dans les habits ; arrangement froid qui désigne l’Art sans goût & qui n’a nulle grace. […] Il est certain qu’il n’appartient qu’au mérite supérieur d’innover & de changer dans un instant la forme des choses auxquelles l’habitude, bien moins que le goût & la réflexion nous avoient attachés.

27. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre V. » pp. 32-39

De quoi peut-on être capable sans le secours du génie, de l’imagination et du goût ? […] C’est principalement dans leurs pantomimes, genre trivial, sans goût, sans intérêt, d’une intrigue basse, que les chefs-d’œuvre du mécanisme se déploient. On peut dire que ce spectacle, qui entraîne après lui des dépenses immenses, n’est fait que pour des yeux que rien ne peut blesser, et qu’il réussiroit médiocrement sur nos théatres, où l’on n’aime la plaisanterie qu’autant qu’elle est associée à la décence, qu’elle est fine et délicate, et qu’elle ne blesse ni les mœurs ni le goût. […] Le chant des airs est-il uniforme et sans goût, le ballet se modèlera sur ce chant ; il sera froid et languissant. Par le rapport intime qui se trouve entre la musique et la danse, il n’est pas douteux, Monsieur, qu’un maître de ballets retirera des avantages certains de la connoissance-pratique de cet art ; il pourra communiquer ses idées au musicien ; et s’il joint le goût, au savoir, il composera ses airs lui-même, ou il fournira au compositeur les principaux traits qui doivent caractèriser son action : ces traits étant expressifs et variés, la danse ne pourra manquer de l’être à son tour.

28. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre VII. » pp. 72-80

En admirant l’immensité des chefs-d’oeuvre, que la poésie, la peinture, la sculpture et la musique ont enfantés, je dois regarder le ballet comme le frère cadet de cette illustre et antique famille qui doit son origine à l’imagination et au génie ; elle seule peut prodiguer à ce frère nouveau-né toutes ses richesses ; il y trouvera l’intelligence, le goût, et les graces ; la régularité des belles proportions, le charme et la puissance de l’éxpréssion ; il y trouvera encore, l’art de placer, de distribuer, de groupper les personnages, celui enfin de régler leurs gestes, et leurs attitudes à la mesure plus ou moins grande des sensations qu’ils éprouvent, et des passions qui les agitent. En vous entretenant des beaux arts, je ne prétends pas, Monsieur, me donner un air scientifique ; je veux en parler par goût, par sentiment et comme un amant passionné et ébloui des charmes de sa maîtresse, parle d’elle avec enthousiasme. Les Savans, dit Quintillien, connoissent les principes des arts ; les ignorants en éprouvent les effets ; la phrase de Quintillien fixe les limites qui séparent le goût de la science. Une organisation assez heureuse, de fréquens voyages tant en Italie, qu’en Allemagne et en Angleterre, ont développé le goût inné que j’ai pour les arts. […] Je désire, Monsieur, pour les progrès de mon art que ceux qui se destinent à la danse et à la composition des ballets en action, suivent la marche que j’ai observée ; qu’ils sachent enfin que sans l’amour et étude des beaux arts, ils ne pourront enfanter que des ouvrages imparfaits, privés de goût, de grace, d’élégance, et dénués, tout à la fois, d’esprit, de variété, et de cette imitation de là nature, qui est l’âme des beaux arts.

29. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre III. Des différentes espèces de Ballets »

L’amour de la Musique se répandit ainsi avec une rapidité surprenante, et l’Opéra fut reçu en Italie avec cette passion vive qu’inspirent aux hommes sensibles toutes les nouveautés de goût. […] Les Anciens, qu’un goût exercé guidait toujours dans leurs Spectacles, avaient eu une attention singulière à employer des Symphonies et des Instruments différents, à mesure qu’ils introduisaient dans leurs Danses des caractères nouveaux : ils s’appliquaient avec un soin extrême, à bien peindre les mœurs, les âges, les passions qu’ils mettaient en Scène. […] Elles furent plus ou moins soignées, selon le plus ou le moins de goût des Compositeurs de ces grands ouvrages, ou des Souverains pour lesquels ils furent préparés.

30. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Seconde lettre. Sur le même sujet. » pp. 14-18

Les jeunes gens qui n’étudient point la musique, peuvent fort bien ne pas connoître les chefs-d’œuvre de ces compositeurs estimables ; mais ceux qui se destinent a l’étude de cet art, et qui sont admis aux conservatoires, ne cessent de méditer les leçons que les grands maîtres leur ont laissées ; ils étudient toutes leurs partitions ; ils les comparent, et, lorsqu’ils sont en état d’apprécier le style, la couleur, l’énergie, le goût, les graces et le génie de ces maîtres célèbres, ils butinent dans cette foule de chefs-d’œuvres ; ils se livrent à l’impression de leur génie, et, l’imagination embrasée et remplie de grandes images, ils composent à leur tour, et enfantent des productions qui réunissent aux charmes séducteurs de la mélodie, toutes les richesses de l’harmonie. […] Au commencement du règne de Louis XIV. nous étions dans l’enfance de cet art, et sans le goût et le génie de Mazarin, nous n’aurions peut-être ni opéra, ni musiciens, ni compositeurs célèbres. […] Rameau créa un nouveau genre ; son génie triompha des vieilles rubriques ; ses riches compositions étoient alors d’une exécution difficile : en effet le Trio des parques de l’opéra, d’Hypolite et d’Aricie ne put être exécuté qu’après six semaines de répétitions : cependant-il étoit confié aux seconds chanteurs de l’opéra, en 1773 Rameau donna son opéra des Indes galantes, ouvrage rempli tout à la fois de science, de goût et d imagination ; le tremblement de terre fait pour le second acte de cet ouvrage , ne put jamais être exécuté par l’orchestre de l’opéra ; cependant des musiciens habiles et de bonne volonté jouèrent ce morceau à la seconde lecture avec infiniment d’ensemble et de précision ; et l’effet qu’il produisit, entraina les auditeurs au sentiment de l’admiration.

31. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre VI. Des Ballets Moraux »

Ces Spectacles au surplus réunissaient toutes les parties, qui peuvent faire éclater le goût et la magnificence d’un Souverain. Ils exigeaient des recherches fines pour le choix des habits, des idées vives pour l’assortiment des personnages, de l’habileté pour donner aux Danses l’expression convenable, du génie pour l’invention générale, du talent pour la composition des symphonies ; du goût, de l’ordre, de la variété dans les décorations, de l’imagination, de l’adresse dans les machines, et une dépense immense, pour mettre en mouvement une composition si compliquée.

32. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Lettre X. » pp. 64-66

Cette salle très-sale et très-ridiculement construite, étoit enterrée dans les batimens du Palais Royal et annonçoit la plus antique barbarie, à une époque, où l’esprit et le goût, les connoissances et les lumières avoient été portés à leur perfection. […] Ce théâtre fut machiné par Arnoud, qui avoit du goût et de l’imagination.

33. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre troisième — Chapitre III. Fêtes de Louis XIV relatives à la Danse, depuis l’année 1643 jusqu’en l’année 1672 »

Fêtes de Louis XIV relatives à la Danse, depuis l’année 1643 jusqu’en l’année 1672 La Minorité de Louis XIV fut en France l’aurore du goût et des beaux Arts. […] Le Cardinal Mazarin avait de la gaieté dans l’esprit, du goût pour le plaisir, et dans l’imagination moins de faste, que de galanterie. […] Le P… de P*** avait réellement de l’esprit, des connaissances, et du goût, autant qu’il en faut pour sentir les beautés d’une composition théâtrale, pour éclairer un Auteur, pour décider même de son degré de talent ; mais bien moins que n’en exige l’invention, la charpente, l’assemblage, en un mot, d’un grand ouvrage. […] On regardait le succès comme infaillible, le P… de P*** comme la ressource unique, et Benserade comme un homme médiocre, sans goût, sans imagination et presque sans talent.

34. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Lettre xvi » pp. 89-95

Gardel, il ne peut se flatter de posséder à lui seul tous les genres, tous les goûts et toutes les manières de faire. […] C’est dans ces délicieux climats et sous un ciel heureux que le génie et le goût placèrent le berceau des arts imitateurs ; c’est là qu’ils étalérent les chefs-d’œuvre de la peinture, de la sculpture et de l’architecture ; c’est-là que les jeunes artistes, enflammés à la vue de tant de merveilles, les étudient et les copient ; le génie de ces hommes illustres embrâse le leur ; ils trouvent dans les uns le brillant et l’entente harmonieuse des couleurs ; dans les autres, la pureté et l’élégance du dessin : Celui-ci se distingue par la grace de ses figures et le moëlleux de leurs contours ; celui-là étonne par la richesse et la belle ordonnance de sa composition et par la distribution heureuse de ses personnages. […] Je sais que les divertissemens ou les ballets que les poëtes cousent maladroitement à leurs poëmes, ne disent rien au goût ni à l’esprit ; qu’ils absorbent tous les momens d’un compositeur, et l’empêchent de se livrer plus souvent aux grandes compositions. […] Des gens d’esprit et de goût m’ont assuré, que la partie dansante de ces deux compositions, étoit brillante et remplie de charmes ; mais que l’action pantomime et l’expression qui en est l’âme, n’avoient pu se déployer dans deux sujets également mal-choisis, totalement dénués d’intrigues et incapables de fournir au compositeur de grands traits et d’heureuses situations.

35. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre deuxième — Chapitre IV. Des Bals »

Des Bals Un Tableau de Philostrate100, nous représente Comus dans un Salon éclairé avec autant de goût que de magnificence. […] Le goût moderne ne produit rien de plus élégant. […] On donna des Bals de cérémonie jusqu’au temps où le génie trouva des moyens plus ingénieux, de signaler la magnificence et le goût des Souverains ; mais ces belles inventions n’anéantirent point un usage si connu ; les Bals subsistèrent et furent même consacrés aux occasions de la plus haute cérémonie. […] Le Roi en fit l’ouverture ; les cardinaux de Saint-Séverin et de Narbonne y dansèrent ; les dames les plus aimables y firent éclater leur goût, leur richesse, leurs grâces. […] Voici celle où je trouve le plus de variété, de goût et d’invention103.

36. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre VIII. » pp. 65-96

non, Monsieur ; mais un poète doit avoir de l’esprit et du goût. […] Ne peut-il pas encore sentir les défauts qui se rencontrent dans les vêtemens par des négligences ou un faux goût qui, l’eloignant du costume, détruit toute illusion ? […] que signifient tous ces corps sans âme, qui se promènent sans graces, qui se déploient sans goût, qui pirouettent sans à plomb, sans fermeté, et qui se succèdent d’acte en acte avec le même froid ? […] Plus un habit est garni de colifichets, de paillettes, de gaze et de réseau, et plus il a de mérite aux yeux de l’acteur et du spectateur sans goût. […] Je bannirois tout arrangement symétrique dans les habits ; arrangement froid qui désigne l’art sans goût et qui n’a nul grace.

37. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre XI. » pp. 107-114

La beauté de la taille, celle des proportions, et l’élégance qui résulte de cet heureux ensemble relevé encore par le charme de la figure, seront insuffisantes pour le succès, si l’homme qui possède ces qualités, n’est appellé par goût et par inclination à la pratique de son art, et aux soins pénibles et journaliers qu’il exige impérieusement. […] Il en est d’autres, qui sans dispositions, sans goût, sans intelligence, et sans figure languissent dans l’obscurité ; on les place à l’arrière-garde des ballets, et comme le fond des décorations offre souvent des rochers et l’aspect de la mer, on les appelle Gardes-Côtes. Je crois pouvoir avancer comme vérité incontestable, que l’homme apporte en naissant un germe précieux susceptible de produire en se développant, un goût déterminé pour un art, ou une science quelconque ; ce germe miraculeux jetté par la providence dans toutes les créatures ne se développe pas également dans tous les hommes. […] or, si le grand peintre est obligé de se donner tant de soins pour attacher à une tête, le caractère, la grâce et l’expression qu’elle doit avoir ; combien les maîtres en tous genres ne doivent-ils pas s’appliquer, à leur tour, à connoitre l’organisation des têtes de leurs élèves, les goûts, les penchants et les inclinations de chacun-d’eux.

38. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur les fêtes nationales] — Lettre iv. sur le même sujet. » pp. 129-136

Lorsque le gouvernement s’occupera de donner une grande fête, pour célébrer un événement qui fixera le bonheur et la prospérité et la France, tel que celui d’une paix générale, il faut alors qu’elle soit, par la réunion du goût à la magnificence, digne de l’objet intéressant qui la détermine ; il faut que les etrangers de toutes les parties de l’Europe en payent les frais en s’amusant ; il faut que cette fête soit grande, parce que c’est une grande nation entourée de victoires et de triomphes, qui la donne. […] Vous avouerez que tant de merveilles réunies par le goût et la puissance des arts, le frapperoient d’étonnement et exciteroient ses applaudissemens. […] Lorsque le peuple auroit vu passer cette marche pompeuse et triomphale, qu’il auroit examiné la forme et le goût des accessoires, considéré l’elégance, la richesse, et le bel ordre de cette marche ; que lui resteroit-il de mieux à faire, que d’aller manger, boire, chanter et danser ? […] Avouez, Monsieur, que tant de belles choses réunies par le goût et par le génie des arts, offriroient un ensemble vraiment miraculeux, un spectacle unique et ravissant, une fête absolument neuve, où tout brilleroit sans se heurter et sans se détruire, et qui honoreroit autant la nation qui la donneroit, que les artistes qui l’exécuteroient.

39. (1725) Le maître à danser [graphies originales] « Préface. » pp. -

Nous pouvons dire à la gloire de notre Nation, qu’elle a le veritable goût de la belle Danse. […] Le goût qu’il avoit pour la Danse l’engageoit dans les momens paisibles de son Regne, à donner de ces Ballets magnifiques, où ce Souverain ne dedaignoit pas de paroître lui-même avec les Princes & les Seigneurs de son Roïaume. […] Ce dernier avoit un goût infini & une legereté prodigieuse. […] Il y avoit dans ce Ballet une Scene très singuliere où un Maître à danser vient vanter en chantant tous les avantages de son Art, & comme il executoit en même tems les divers caracteres de Danse qui se trouvent dans les Ballets, & qu’il avoit un peu de voix & beaucoup de goût pour le chant, il entreprit de faire ce rôle, & le remplit si bien qu’il engagea dès ce jour-là le public à remarquer avec plus d’attention les talens qu’il avoit pour la Danse, où il a soûtenu constamment ce qu’il fit attendre de lui.

40. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre troisième — Chapitre II. Des Fêtes du même genre dans les autres Cours de l’Europe »

[Voir Fête (Beaux-Arts)] Ce Durand, Courtisan sans talents d’un très grand Ministre sans goût, avait imaginé et conduit le plus grand nombre des Fêtes de la Cour de Louis XIII. Les Français qui avaient du génie trouvèrent les accès difficiles et la place prise : ils se répandirent dans les Pays Étrangers, et ils y firent éclater l’imagination, la galanterie et le goût qu’on ne leur avait pas permis de déployer dans le sein de leur patrie. […] Un Bal éclairé avec beaucoup de goût, dans des Salles préparées avec grande magnificence termina cette première nuit.

41. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur les fêtes nationales] — Lettre ii. sur le même sujet. » pp. 116-121

Oui, Monsieur, je l’ai vue cette fête des victoires, qui n’étoit point celle du goût et de l’imagination. […] Ce sont les arts réunis, enfans du goût et de l’imagination, qui doivent y déployer leur magie enchanteresse, et transporter, par leur puissance, les spectateurs dans des règions célestes. […] Servandoni aimoit l’argent, mais il avoit du génie et du goût ; jamais il n’auroit compromis sa réputation ; jamais il n’auroit consenti à suivre des idées aussi plattement conçues ; le sourire du mépris eût accompagné son réfus.

42. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre second — Chapitre III. Des Danses des Anciens dans les Fêtes des Particuliers »

Un simple particulier à Paris, qui sait unir le goût à l’opulence, est le maître de rassembler chez lui plus de commodités, d’agréments et de plaisirs que n’en ont imaginé la délicatesse d’Athènes, ou le luxe de Rome, et sur ce point les peuples contemporains les plus polis de l’Europe sont encore à notre égard, ce qu’ont été les Grecs et les Romains. […] Dans le temps que la bonne chère et le vin excitaient et flattaient le goût des Convives, la Musique et la Danse occupaient agréablement leurs autres sens.

43. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre IV. Des Ballets poétiques »

Le goût lui tint lieu de crédit et de pouvoir. […] Il ne jouit point de la douceur, dont il était digne, de faire passer dans l’âme de ses contemporains un goût utile.

44. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Lettre IV. Sur le même sujet. » pp. 24-29

L’Oratorio d’Hayden, intitulé la création du monde fut donné sur le théâtre de l’opéra ; cet ouvrage rempli de science et de goût, de beautés musicales et imitatives, étonna par l’abondance et la richesse des plus savantes combinaisons ; mais il ne fut bien apprecié que par les connoisseurs, et malheureusement ils sont en petits nombre. […] Je dois dire cependant, à la justification du public, que plusieurs sottises n’ont pas peu contribué a refroidir son goût. […] Ma lettre, Monsieur, est déjà bien longue, il faut, pour vous prouver mon assertion que je remonte aux causes premières qui ont nécessité chez ce grand peuple, le goût et l’étude de la musique : permettez moi donc de remettre à un autre instant, mes réfléxions sur cet objet, intéressant peut-être pour l’histoire de cet art enchanteur.

45. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Avant-propos » pp. 5-17

Cependant la décadence de certaines puissances dans ce royaume, fit encore éprouver une chute à la danse et aux ballets ; les Italiens perdirent leur goût pour ces spectacles ; mais Louis XIV en embellit la cour de France. […] La danse est en effet un art difficile, et qui ne peut pas être apprécié par tout le monde ; car nous voyons très souvent de mauvais sauteurs « plaire à un public aveuglé par des tours de force, par des gambades et par de ridicules pirouettes » ; tandis qu’un véritable danseur, qui danse en suivant toutes les règles, qui se dessine avec sentiment, avec intelligence, avec grâce, et qui donne de l’âme, de l’expression à ses mouvements, à ses pas, de la souplesse et une délicate légèreté à sa danse en général, ne produit de vives sensations que sur les gens de goût, les seuls (en trop petit nombre malheureusement) qui puissent bien sentir tout ce qu’il vaut. […] Lorsqu’ils seront parvenus à s’assujettir à ce travail, que j’oserai dire mathématique, à cause de sa rigueur, ils seront sûrs de se bien placer, et ils donneront des preuves qu’ils sortent d’une bonne école, dans laquelle ils ont acquis un goût pur7. [9] On ne saurait trop recommander aux jeunes gens qui se destinent à cet art d’imitation, la vue des chefs-d’œuvre de la peinture et de la sculpture, surtout dans l’antique : ces enfants immortels du génie des beaux-arts, ces modèles du beau idéal, formeront leur goût.

46. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre III. » pp. 17-24

Mais, par un malheureux effet de l’habitude, ou de l’ignorance, il est peu de ballets raisonnés ; on danse pour danser ; on s’imagine que le tout consiste dans l’action des jambes, dans les sauts élevés, et qu’on a rempli l’idée, que les gens de goût se forment d’un ballet, lorsqu’on le charge d’exécutans qui n’éxecutent rien ; qui se mêlent, qui se heurtent, qui n’offrent que des tableaux froids et confus, dessinés sans goût, groupés sans grace, privés de toute harmonie, et de cette expression, fille du sentiment, qui seule peut embellir l’art, en lui donnant la vie. […] Le tableau péchera ou par la composition, où par le coloris ; ou s’il est dessiné correctement, il n’en sera peut-être pas moins sans goût, sans grâce et sans imitation. […] Si l’uniformité règne dans un ballet, si l’on ne découvre pas cette diversité d’expression, de forme, d’attitude et de caractère, que l’on rencontre dans la nature ; si ces nuances délicates, mais vraies, qui peignent les mêmes passions avec des traits plus ou moins marqués et des couleurs plus ou moins vives, ne sont point ménagées avec art, et distribuées avec goût et intelligence, alors le tableau est à peine une copie médiocre d’un excellent original ; et comme il ne présente aucune vérité, il n’a la force, ni le droit d’émouvoir ni d’affecter.

47. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE III. » pp. 30-46

Mais par un malheureux effet de l’habitude ou de l’ignorance, il est peu de Ballets raisonnés ; on danse pour danser ; on s’imagine que le tout consiste dans l’action des jambes, dans les sauts élevés, & qu’on a rempli l’idée que les gens de goût se forment d’un Ballet, lorsqu’on le charge d’exécutants qui n’exécutent rien, qui se mêlent, qui se heurtent, qui n’offrent que des Tableaux froids & confus, dessinés sans goût, grouppés sans grace, privés de toute harmonie, & de cette expression, fille du sentiment, qui seule peut embellir l’Art, en lui donnant la vie. Il faut convenir néanmoins que l’on rencontre quelquefois dans ces sortes de compositions, des beautés de détail, & quelques étincelles de génie ; mais il en est très-peu qui forment un tout & un ensemble parfait : le Tableau péchera ou par la composition, ou par le coloris ; ou s’il est dessiné correctement, il n’en sera peut-être pas moins sans goût, sans grace & sans imagination. […] Si l’uniformité regne dans un Ballet, si l’on ne découvre pas cette diversité d’expression, de forme, d’attitude & de caractere que l’on rencontre dans la nature ; si ces nuances légeres, mais imperceptibles, qui peignent les mêmes passions avec des traits plus ou moins marqués, & des couleurs plus ou moins vives, ne sont point ménagées avec Art & distribuées avec goût & délicatesse, alors le Tableau est à peine une copie médiocre d’un excellent Original, & comme il ne présente aucune vérité, il n’a ni la force, ni le droit d’émouvoir ni d’affecter.

48. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre troisième — Chapitre I. Naissance du Théâtre »

Naissance du Théâtre Soit que le hasard ou le goût, ait guidé les Anciens dans l’arrangement de leurs plaisirs, et dans l’ordonnance de leurs Fêtes, on a pu remarquer, que leurs Danses eurent toutes un caractère très distinct les unes des autres. […] Devenue en France une partie essentielle d’un nouveau spectacle, que les Romains auraient jugé digne de leur magnificence ; et qui aurait flatté le goût délicat des Grecs, il est inconcevable que ses progrès aient été si lents.

49. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre cinquième. Positions principales et leurs dérivés ; » pp. 64-70

* [2] * Dessinez-vous avec goût et naturellement dans la moindre des poses49 ; il faut que le danseur puisse, à chaque instant, servir de modèle au peintre, au sculpteur50.  […] L’exécution gracieuse appartient toute au goût de l’artiste, et c’est à lui à en savoir faire un bon usage, et à bien les approprier au genre et au caractère de sa danse. […] Les artistes doivent aussi apprendre à se dessiner d’après ces sculptures et ces peintures, remplies d’esprit et de grâces ; c’est à cette source qu’il faut toujours recourir pour former son goût à l’élégance et à la pureté du dessin.

50. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur la musique] — Réponse à la question proposée. — Lettre xvii » pp. 96-101

Ces deux plaisanteries, l’une poëtique, l’autre rimaillée, ont fait sur les lecteurs des impressions différentes ; la première excita le sourire, mais scandalisa les amis des mœurs ; l’autre fit bailler les gens de goût ; elle fut jettée au feu, sans produire ni flamme ni éteincelles : Quant à moi, Madame, qui n’ai pas la hardiesse de prononcer sur les ouvrages d’esprit, et qui n’en juge que par sentiment, j’ai regardé le premier pamphelet, le mieux écrit, comme une étourderie d’autant moins excusable que l’auteur n’avoit pas besoin de cette futile production pour faire preuve de talent. […] Mais les amateurs de cet art et les hommes de goût trouvent qu’elle abuse de ses moyens, et que par une imitation pernicieuse, elle se livre à des courses, à des gambades qui dégradent, la sagesse que ce genre exige. […] J’ai loué tout ce qui mérite de l’être et je me suis dispensé d’encencer les écarts et les erreurs qui sopposent à la perfection d’un art qui fait les délices de toutes les nations de l’Europe, et dont le temple pompeux s’élève avec majesté au centre de la capitale des sciences, des arts, des talens et du goût.

51. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Errata du tome I. » pp. 241-242

id. 27. j’étois en but, lisés : j’étois en butte iii. 3. dont le goût, lisés : dont le goût.

52. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Avant-propos »

Un goût vif pour un art est inséparable du désir de son accroissement, de sa perfection, de sa gloire : et le moyen que ce qu’on désire ne se présente pas comme un objet important ? […] La vérité seule peut être la base d’un bon Livre, elle règne avec le sentiment, la bonne métaphysique, et le goût dans ses deux premiers volumes. […] Les personnes qui tiennent pour l’ancien goût allèguent les excès où tombent les Artisans qui outrent ce qu’ils sont, lorsqu’elles veulent prouver que le goût nouveau est vicieux […] mais le public s’est si bien accoutumé à la nouvelle Danse théâtrale, qu’il trouverait fade aujourd’hui le goût de Danse lequel y régnait autrefois.

53. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre IV. » pp. 27-36

Les Grecs imitèrent les Egyptiens ; et les Romains à leur tour prirent les Athéniens pour modèle ; ils héritèrent de leur goût pour les arts et les sciences, de leur inconstance et de leur injustice ; ils les surpassèrent dans l’amour qu’ils eûrent pour les théâtres ; mais la passion qu’ils montrèrent pour la pantomime fut portée jusqu’à l’enthousiasme, et dégénéra insensiblement en frénésie. […] Auguste aimoit ces pantomines moins par goût, que par politique ; il connoissoit le peuple de Rome, il savoit qu’il étoit inquiet, turbulent, et toujours prêt à se porter à l’insubordination : les pantomines occupant entièrement sa pensée, étouffoient en lui l’esprit de parti. […] Pylade ne représentoit que des sujets héroïques ; il se pénétroit si puissament des grands personnages, qu il avoit à peindre, qu’il en prenoit dans sa vie privée la hauteur, la rudesse et la fierté ; il étoit dur et insolent avec ses camarades, ne faisoit point sa cour aux grands, et insultoit même étant en scène au goût, et aux decisions du public. […] Le goût cessa de présider aux productions des arts ; les théatres n’eurent plus de modèles et les spectacles n’offrirent que les tableaux dégoûtants de la crapule, et du libertinage ; les Romains perdirent leur moralité ; les grands associèrent leurs débauches à celles de ces bas farceurs, les dames Romaines, et leurs filles joüoient avec eux les scènes les plus indécentes, et se prostituèrent sans aucun ménagement, libère successeur farouche d’Auguste n’aimoit ni les talons, ni les théâtres ; il chassa de Rome tous les Baladins, et fit fermer les théâtres ; mais la passion éffrénée que les Grands avoient pour les représentations licencieuses, les détermina à donner azile dans leurs palais à tous ces crapuleux histrions.

54. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre huitième. Danseur sérieux, danseur demi-caractère. Danseur comique » pp. 88-95

Le sérieux est le genre le plus difficile de la danse ; il demande un grand travail, et n’est véritablement apprécié que par les connaisseurs et les gens de goût. […] La confusion des genres qui ternit l’art de la danse, le peu de constance des danseurs pour l’étude, et le goût corrompu du public dans certains théâtres, en sont les véritables causes. […] Ce serait pourtant à l’artiste qu’il appartiendrait de ramener le public au goût du beau, du vrai, en persistant dans l’exécution des vrais principes de l’art.

55. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre II. Origine des Ballets »

Le Cardinal Camerlingue Riari [Riario], neveu du Pape Sixte IV avait tenté d’inspirer à ce Souverain Pontife du goût pour ces beaux établissements, mais Sixte reçut avec assez de froideur quelques Spectacles ingénieux que Riari lui avait donnés sur un Théâtre mobile dans le Château Saint-Ange. […] Bergonce de Botta [Bergonzio di Botta], Gentilhomme de Lombardie, signala son goût par une fête éclatante qu’il prépara dans Tortone, pour Galeas Duc de Milan, et pour Isabelle d’Aragon sa nouvelle épouse.

56. (1725) Le maître à danser [graphies originales] « Le maître a danser. premiere partie — Chapitre III. Des Positions, & de leur origine. » pp. 9-10

J’ai sçu de lui que suivant les regles de son tems on comptoit cinq pas dans la danse, desquels dérivent les autres pas, qui se pratiquent dans la danse ; & comme il avoit beaucoup de goût pour le Dessein, (ce qui est très-necessaire pour un Compositeur de Ballet aussi-bien que la Musique,) ce rare génie trouva que rien n’étoit plus important pour maintenir le corps dans une attitude gracieuse, & les pas dans une grandeur mesurée, que d’introduire ces cinq Positions ; aussi on doit les regarder comme des regles indispensables que l’on doit suivre.

57. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE PREMIERE. » pp. 2-14

Cet Art entiérement soumis au goût & au génie, peut s’embellir & se varier à l’infini. […] Un Maître de Ballets, sans intelligence & sans goût, traitera ce morceau de Danse machinalement, & le privera de son effet, parce qu’il n’en sentira pas l’esprit. […] Quant aux Figures, elles ne sont en droit de plaire que lorsqu’elles sont présentées avec vîtesse, & dessinées avec autant de goût que d’élégance.

58. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre troisième — Chapitre I. Des Fêtes dont la Danse a été le fond à la Cour de France, depuis l’année 1610 jusqu’en l’année 1643 »

La basse plaisanterie, les danses ridicules, les pas d’un comique grossier qui occupaient les Courtisans dans les Fêtes d’éclat, devaient nécessairement lui déplaire ; mais c’était moins par goût pour le bon, que par antipathie pour le bas. […] Le goût l’aurait arrêté dans le milieu de ces deux extrémités également vicieuses. […] « Quand je considère (dit un auteur112 qui avait approfondi cette matière) que le sujet de ce ballet est La Prospérité des Armes de la France, je cherche ce sujet dans les entrées des Tritons, des Néréides, des Muses, d’Apollon, de Mercure, de Jupiter, de Cardelin, des Rhinocéros, etc. » Cette composition rassemble en effet tout le désordre d’une imagination aussi grande que déréglée, des idées nobles noyées dans un fatras d’objets puérils et sans rapport, un désir excessif d’attirer l’admiration, des recherches déplacées, de l’érudition sans grâces, de la Poésie inutile, beaucoup de magnificence perdue, et pas la moindre étincelle de goût. […] Il leur dit en les voyant entrer : Eh bien, les Français n’auront jamais du goût pour les belles choses.

59. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre premier. Instructions générales aux élèves » pp. 19-39

Dessinez-vous avec goût et naturellement, dans la moindre des poses. […] Un figurant médiocre, et même un homme sans avoir un goût parfait, pourront vous donner un conseil salutaire ; « Écoutez tout le monde, assidu consultant ; Un fat quelquefois ouvre un avis important. » Boileau. […] Les anciens eux-mêmes nous ont donné l’exemple de cette sévérité par la finesse de leur goût. […] On croit que ce goût a été apporté par les Maures, ou Arabes, d’où ce genre d’ornement a pris son nom. […] « Il en est de la danse comme de la musique, et des danseurs comme des musiciens ; notre art n’est pas plus riche en pas fondamentaux que la musique l’est en notes ; mais nous avons des octaves, des rondes, des blanches, des noires, des croches, des temps à compter, et une mesure à suivre ; ce mélange d’un petit nombre de pas et d’une petite quantité de notes, offre une multitude d’enchaînements et de traits variés ; le goût et le génie trouvent toujours une source de nouveautés en arrangeant et en retournant cette petite portion de notes et de pas de mille sens et de mille manières différentes ; ce sont donc ces pas lents et soutenus, ces pas vifs, précipités, et ces temps plus ou moins ouverts, qui forment cette diversité continuelle (c). » [NdE J. 

60. (1909) Une vie de danseuse. Fanny Elssler « Chapitre premier. les années d’apprentissage  » pp. 1-36

Le goût de la vie joyeuse était encouragé dans les classes moyennes par la reprise des affaires. […] C’était répondre au goût et aux aptitudes que les Viennois ont toujours eus pour ce charmant exercice. […] Ce milieu populaire d’où sortait Fanny était pénétré d’un goût très vif pour les arts. […] Cela ne signifie pas que le frère ait désapprouvé les sœurs, mais tout au plus qu’il y avait divergence de goûts. […] Son goût délicat d’Autrichienne, affiné par l’éducation française, la préserva des vulgarités du réalisme.

61. (1757) Articles pour l’Encyclopédie « Sur les artistes de l’opéra »

Nous jouissons de nos jours d’un chanteur et d’une chanteuse qui ont porté le goût, la précision, l’expression, et la légèreté du chant, à un point de perfection qu’avant eux on n’avait ni prévu ni cru possible. […] Les petits Musiciens se sont d’abord élevés contre ; plusieurs admirateurs du chant ancien, parce qu’ils n’en connaissaient point d’autre, ont été révoltés, en voyant adapter une partie des traits difficiles et brillants des Italiens, à une langue qu’on n’en croyait pas susceptible ; des gens d’un esprit étroit, que toutes les nouveautés alarment, et qui pensent orgueilleusement que l’étendue très bornée de leurs connaissances est le nec plus ultrà des efforts de l’art, ont tremblé pour le goût de la nation. […] Le nombre des sujets dont l’opéra de Paris est composé, son établissement stable, ses ressources, ses revenus, et le goût des Français pour ce spectacle, sont de grands moyens pour le porter à un point de perfection et de magnificence auquel il n’est point encore parvenu, et qui semble ne dépendre maintenant que de très peu de circonstances.

62. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre deuxième — Chapitre II. Des Fêtes de la Cour de France, depuis 1560 jusqu’en l’année 1610 »

Il avait la pente la plus forte au libertinage, un goût excessif pour le plaisir, l’esprit léger, le cœur gâté, l’âme faible. […] Tout cela fut beau et plaisant ; mais la grande excellence qui se vit les jours de Mardi et Jeudi, fut la Musique de voix et d’instruments la plus harmonieuse et la plus déliée qu’on ait jamais ouïe (on la devait au goût et aux soins de Baïf) furent aussi les feux artificiels qui brillèrent avec effroyable épouvantement et contentement de toutes personnes sans qu’aucun en fût offensé. » La partie éclatante de cette fête qui a été saisie par l’Historien que j’ai copié, n’est pas celle qui méritait le plus d’éloges. […] Trait singulier et de caractère, qui serait sans doute une sorte de mérite, si le goût des plaisirs, sous un Roi efféminé95, n’y avait été poussé jusqu’à la licence la plus effrénée96 ; ce qui est toujours une tache pour le Souverain, une flétrissure pour les courtisans, et une contagion funeste pour le Peuple.

63. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre première. » pp. 2-8

Cet art enfant du génie, et du goût peut s’embellir, se varier à l’infini. […] Un maître de ballets, sans intelligence et sans goût, traitera ce morceau de danse machinalement, et le privera de son effet, parce qu’il n’en sentira pas l’esprit. […] Quant aux figures, elles ne sont en droit de plaire que lorsqu’elles sont présentées avec rapidité, et dessinées avec autant de goût que d’élégance.

64. (1757) Articles pour l’Encyclopédie « Sur les machines de théâtre » p. 458

Qu’on s’occupe à sonder avec quelque soin la marche, l’ordre et la mécanique des opéras de Quinault, malgré la modestie de ce poète, qui n’a cherché à nous donner ni par des explications, ni par des préfaces, ni par des détails raisonnés, aucune idée de ses études, de ses connaissances, de sa fécondité, de son invention et de ses travaux ; il est impossible de ne pas s’assurer qu’il possédait à fond toute cette matière, et que jamais homme peut-être avant lui n’avait su la mettre en pratique avec tant de méthode, d’intelligence, de variété et de goût. […] Il le distraira ensuite de ce spectacle par celui d’un temple auguste : toutes les parties de la belle architecture des anciens rassemblées dans cet édifice, formeront un ensemble majestueux ; et des jardins embellis par la nature, l’art et le goût, termineront d’une manière satisfaisante une représentation dans laquelle on n’aura rien négligé pour faire naitre et pour entretenir l’illusion. […] Le goût seul peut-il suffire pour empêcher qu’on ne s’égare ? et le goût lui-même est-il autre chose qu’un sentiment exquis, que la connaissance des matières auxquelles il s’applique, la comparaison, l’expérience peuvent seules rendre sûr ? […] On dit plus : il n’y a point d’opéra de Quinault, dans lequel un homme de goût versé dans l’étude des différents arts nécessaires à l’ensemble de pareils spectacles, ne trouve à produire en machines et en décorations des beautés nouvelles, capables d’étonner les spectateurs et de rajeunir les anciens ouvrages.

65. (1757) Articles pour l’Encyclopédie « Sur les fêtes modernes »

Voici celle où je trouve le plus de variété, de goût, et d’invention. […] Un bal éclairé avec beaucoup de goût, dans des salles préparées avec grande magnificence, termina cette première nuit. […] Telle fut la nuit profonde, dont le goût fut enveloppé à la cour de Louis XIII. […] On fit les mêmes illuminations les vendredi, samedi, et dimanche suivants, et chaque fois dans un goût différent. […] La salle et le théâtre étaient ornés avec autant de magnificence que de goût.

66. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre VI. » pp. 40-55

Ce seroit avilir les hommes que de le penser, et dépriser le goût et l’esprit de notre siècle que de le croire. […] Les couleurs des draperies et des habillemens doivent trancher sur la décoration ; je la compare à un beau fond : s’il n’est tranquille, il n’est harmonieux, si les couleurs en sont trop vives et trop brillantes, il détruira le charme du tableau ; il privera les figures du relief quelles doivent avoir ; rien ne se détachera, parce que rien ne sera ménagé avec art, et le papillotage qui résultera de la mauvaise entente des couleurs, ne présentera qu’un panneau de découpures enluminé sans goût et sans intelligence. […] Dans les décorations de goût et d’idée, comme Palais Chinois, Place publique de Constantinople, ornés pour une fête, genre bizarre qui ne soumet la composition à aucune règle sevère, qui laisse un champ libre au génie, et dont le mérite augmente à proportion de la singularité que le peintre y répand ; dans ces sortes de décorations, dis-je, brillantes en couleurs, chargées d’étoffes rehaussées d’or et d’argent, il faut des habits drapés dans le Costume, mais il les faut simples et dans des nuances entièrement opposées à celles qui éclatent le plus dans la décoration si l’on n’observe exactement cette règle, tout se détruira faute d’ombres et d’oppositions ; tout doit être d’accord, tout doit être harmonieux au théâtre : Lorsque la décoration sera faite pour les habits, et les habits pour la décoration, le charme de la représentation sera complet. Les artistes surtoût et les gens de goût sentiront la justesse et l’importance de cette observation. […] Ce ballet a été depuis donné à Paris et à Londres, avec des habits pleins de goût, de la composition du sieur Boquet, dessinateur de l’Academie Royale de musique.

67. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE VI. » pp. 78-109

Ce seroit avilir les hommes que de le penser, & dépriser le goût & l’esprit de notre siecle que de le croire. […] Une telle distribution dans les couleurs éclipsera le Tableau ; le tout ne formera qu’un Camaïeux, genre froid & monotone, que les gens de goût regarderont toujours comme un enfant illégitime de la Peinture. […] Il privera les Figures du relief qu’elles doivent avoir ; rien ne se détachera, parce que rien ne sera ménagé avec Art, & le papillotage qui résultera de la mauvaise entente des couleurs, ne présentera qu’un panneau de découpures, enluminé sans goût & sans intelligence. […] Dans les décorations de goût & d’idée, comme Palais Chinois, Place publique de Constantinople, ornés pour une Fête, genre bizarre qui ne soumet la composition à aucune regle sévere, qui laisse un champ libre au génie, & dont le mérite augmente à proportion de la singularité que le Peintre y répand ; dans ces sortes de décorations, dis-je, brillantes en couleurs, chargées d’étoffes, rehaussées d’or & d’argent, il faut des habits drapés dans le costume, mais il les faut simples & dans des nuances entiérement opposées à celles qui éclatent le plus dans la décoration. […] Ce Ballet a été donné à Paris & à Londres, avec des habits pleins de goût, de la composition du sieur Boquet, Dessinateur de l’Académie Royale de Musique.

68. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre troisième — Chapitre III. De la Danse théâtrale des Romains »

De la Danse théâtrale des Romains Au moment que les Romains montrèrent du goût pour les Arts, on les vit accourir en foule à Rome. […] Tous les trésors de la mémoire, de l’esprit et de l’Art, suffisaient à peine à la multitude des compositions nouvelles qu’exigeait d’eux le goût éclairé des Romains.

69. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre troisième — Chapitre IX. Du Ballet Moderne »

Cette nouveauté plut, et en 1681, le Roi et toute sa Cour exécutèrent à Saint-Germain le Triomphe de l’Amour, ouvrage fait dans le même goût, dont le succès anéantit pour jamais le grand Ballet, qui avait été si longtemps le seul Spectacle de notre Cour. […] Ce genre, dans sa nouveauté, balança le succès du grand Opéra, parce que le goût est exclusif parmi nous, et que c’est un défaut ancien et national, dont, malgré les lumières que nous acquérons tous les jours, nous avons bien de la peine à nous défaire.

70. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Lettres sur les fêtes nationales] — Lettre v. sur le mème sujet. » pp. 137-140

Cet événement fut célébré par des fêtes brillantes, dont la partie intéressante fut confiée au goût et à l’imagination de Mr. […] Cependant il a déployé dans ces fêtes, du goût, de l’intelligence, de la variété ; et en amusant agréablement les yeux, elles eurent le mérite trop rare de parler à l’esprit.

71. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 28 décembre. Les Ballets Léonidoff. »

Aucune nouveauté de conception, aucune qualité solide d’exécution qui aurait pu suppléer au manque de trouvailles inédites. « L’arracheur de dents », pantomime vénitienne n’est pas sans charme ; il y a là un décor simplifié avec goût.

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