Aussi ne font-ils rien qu’un même Dedans ce Spectacle suprême, Puisque cet admirable ROI L’y représente, en noble arroi, Chassant, dans la première Entrée, L’Hiver glacé, de la Contrée, Par ses Rayons tout éclatants, Et rappelant en même temps La riante et brillante Flore, Que le tendre Zéphire adore. MADAME, qui, par son Teint frais Et par tous ses jeunes Attraits, Ressemble plus à la Déesse, Sans la bienheureuse Grossesse, Aurait été là, trait pour trait, Son incomparable Portrait ; Mais, au défaut de son Altesse, De SULLY la belle Duchesse Tient illec son illustre Rang, Par un honneur tout à fait grand, Et forme la seconde Entrée, Ayant pour sa Troupe admirée La Jeunesse, avec la Beauté, L’Abondance et Félicité, Que représentent quatre Belles,107 Que l’on peut bien prendre pour Elles, Et chacune séparément Pour toutes quatre mêmement. […] Le Dieu des Divertissements et de la Galanterie, représenté par le Duc de S. […] représentée par Madlle Hilaire, qui chante.
Loret, lettre du 11 février 1662 Le sept du mois, Mardi passé, Le Ballet du Roi fut dansé, Mêlé d’un Poème tragique, Chanté, tout du long en musique, Par des Gens Toscans et Romains, La plupart légers de deux grains ; Et, même, par l’illustre Hilaire, Qui ne saurait chanter sans plaire, Et la Barre pareillement, Dont la voix plaît infiniment, Et dont la personne excellente La Beauté même représente (Assez convenable rôlet) Dans ce beau Poème, ou Ballet ; Lequel Poème s’intitule En Français, Les Amours d’Hercule, Et dans sa naturalité Se nomme Ercole Amante. […] Il représentait en sa danse, En l’une, la Maison de France ; Puis Pluton, Mars et le Soleil, Le dernier dans un appareil Assez conforme à la manière Que l’on peint ce Dieu de lumière : Mais, surtout, furent admirés De son chef les cheveux dorés, Agencés d’une main habile, Et d’une façon si subtile, Que jusqu’à présent nul Mortel N’avait admiré rien de tel ; Notre cher Porte Diadème Le prisa fort, dit-on, lui-même, Et tous les Gens de qualité Etant près de Sa Majesté. […] En ce Ballet que nul n’égale, Dont la dépense est si Royale, Monsieur que Dieu conserve, amen, Représente, en dansant, l’Hymen. […] Ces Belles, tant Femmes que Filles, Représentaient quinze Familles Toutes pleines d’honneurs divers, Des plus grandes de l’Univers, Et, certainement, leur Entrée De tant de grâces illustrée, Du grand nombre des spectateurs Fit presque autant d’admirateurs.
Des Ballets Bouffons Le premier et peut-être le meilleur ouvrage de ce genre fut représenté à Venise sur un Théâtre public85, sous le titre de la Verita raminga ; ce qui veut dire, La Vérité vagabonde, qui n’a ni feu ni lieu. […] Elle fut si bien caractérisée qu’on comprit aisément par ses pas, ses mouvements, et ses attitudes, le sujet qu’on avait projeté de représenter. […] Les Ballets de ce genre ont donné l’idée de ces Intermèdes qu’on joint en Italie aux grands Opéras, et de ces Opéras Bouffons qu’on y représente séparément sur des Théâtres publics.
Combien de fois font-ils parler le Prince qu’ils représentent avec une fierté ridicule, tandis que ce Prince ne devrait mettre que de la noblesse dans ses discours ? […] Je l’ai déjà dit, en ne faisant représenter sur nos Théâtres que des Pantomimes, ou du moins en prescrivant à tous les Acteurs l’obligation de jouer à la muette, si l’on veut conserver les Poèmes immortels qui font tant d’honneur au Théâtre Français. […] Comment diable voulez-vous qu’on nous représente nos meilleures Comédies, nos meilleures Tragédies, si vous prétendez que les Acteurs ne les rendent, non plus à l’aide de leurs poumons, mais par le moyen de leurs bras & de leurs jambes ? […] J’avoue d’abord qu’il serait à souhaiter qu’on ne représentât par gestes que les Pièces nouvelles, attendu que, pour l’ordinaire, elles ne font pas aussi-bien écrites que celles de Corneille, Molière, Racine, Voltaire, &c. […] Les Orateurs ou Avocats romains, dans les Causes criminelles, & lorsqu’il s’agissait de quelque malheureux opprimé, se contentaient souvent de montrer aux Magistrats un tableau qui représentait l’événement dont il était question, afin, par cette peinture muette, d’émouvoir plus sûrement le cœur des Juges.