Ce genre ne demande que des teintes légères propres à peindre l’amour. […] Je vais établir une comparaison propre a étayer d’une manière solide mes observations et mes principes. […] Ils ne peuvent ni l’un ni l’autre se livrer à l’arbitraire et à la fantasie : ils doivent avoir une exécution mâle et nerveuse, observer toutes les nuances et le clair-obscur propres à augmenter le charme de l’exécution, sans toutefois ajouter ou diminuer au noté du compositeur ni au tracé du maître de ballets. […] Rameau avoit posé les limites sages qui convenoient au genre de musique propre à la danse ; ses chants étoient simples et nobles : en évitant la monotonie des airs et des mouvemens aux quels ses prédécesseurs s’étoient livrés, il les avoit variés ; et ayant senti que les jambes ne pouvoient se mouvoir avec autant de vitesse que les doigts, et que le danseur étoit dans l’impossibilité de faire autant de pas que les airs présentent de notes, il les phrâsoit avec goût.
L’imitation constitue donc l’essence de chacun de ces Arts ; et la Danse en particulier, qui est, dès son origine, une expression naïve des sensations de l’homme, pécherait, contre sa propre nature, si elle cessait d’être une imitation.
XI J’admire en riant comme ma solution est de nature à satisfaire tous les amours propres.
Avant de vous nommer, Monsieur, le peuple qui aime le mieux la musique, qui la cultive avec passion, et qui en fait l’agrément de ses loisirs, je me permettrai de vous faire quelques observations relatives à cet art, et particuliérement sur la manière leste et frivole que nous employons communément pour en juger les productions ; jugement bien propre à prouver que le peuple, qui aime le mieux la musique, n’est pas celui qui sait le mieux en apprécier les beautés. […] je ne le peux croire ; parce que ces goûts nés de la fantaisie et du caprice, sont bien plus propres à décourager le vrai mérite qu’à le soutenir et à l’encourager.