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163. (1725) Le maître à danser [graphies originales] « Le maître a danser. premiere partie — Chapitre X. De la maniere d’ôter son chapeau, & de le remettre. » pp. 24-28

Voila la maniere qui m’a paru la plus séante pour le porter avec grace : on doit le poser d’abord sur le front un peu au-dessus des sourcils, & en appuyant la main moderément contre le retroussi, elle ne le fait enfoncer par derriere qu’autant qu’il le faut, devant être plus bas devant de deux ou trois lignes que derriere ; le bouton doit être du côté gauche, de même que le bec ou la pointe au-dessus de l’œil gauche, ce qui dégage le visage : car de le porter tout-à fait en arriere, cela donne un air niais & imbécile : le trop enfoncer par devant donne un air sournois, ou colere, ou rêveur, au lieu que la maniere de le porter tel que je vous l’ai representé, vous fait paroître bien sensé, modeste & temperé.

164. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — LETTRE XII. » pp. 157-180

Rien n’est si nécessaire, Monsieur, que le tour de la cuisse en déhors, pour bien danser ; et rien n’est si naturel aux hommes que la position contraire ; nous naissons avec elle : il est inutile, pour vous convaincre de cette vérité, de vous citer pour exemples les levantins, les affricains et tous les peuples qui dansent, ou plutôt qui sautent et qui se meuvent sans principes, sans aller si loin, considérez les enfans ; jettez les yeux sur les habitans de la campagne, et vous verrez que tous ont les pieds en dedans. […] Je conviens que l’œil qui n’a pas le temps d’examiner nous trompe souvent ; mais la raison et la réflexion nous dévoilent ensuite ce que la vitesse ne lui permet point d’analyser. […] Je ne dis pas qu’il soit moralement impossible de faire faire un mouvement aux jambes par un effort violent de la hanche ; mais un mouvement de cette espèce ne peut être regardé comme un temps de l’entrechat ou de la danse, je m’en suis convaincu par moi-même, et ce n’est que d’après des expériences réitérées que je hasarde de combattre une idée à la quelle on ne seroit point attaché, si la plus grande partie des danseurs ne s’appliquoit uniquement qu’à étudier des yeux. […] Ces deux arts sont frères et se tiennent par la main ; les accents tendres et harmonieux de l’un excitent les mouvemens agréables et expressifs de l’autre ; leurs effets réunis offrent aux yeux et aux oreilles, des tableaux animés ; ces sens portent au cœur les images intéressantes qui les ont affectés ; le cœur, les communique à l’ame, et le plaisir qui résulte de l’harmonie et de l’intelligence de ces deux arts, enchaîne le spectateur et lui fait éprouver ce que la volupté a de plus séduisant. […] Ce détail seroit immense ; il est inutile d’ailleurs de m’étendre sur le mécanisme de mon art ; cette partie est portée à un si haut dégré de perfection, qu’il seroit ridicule de vouloir donner de nouveaux préceptes aux artistes, une pareille dissertation ne pourroit manquer d’être froide et de vous déplaire ; c’est aux yeux et non aux oreilles que les pieds et les jambes doivent parler.

165. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE XII. » pp. 315-361

Sans aller si loin, considérez les enfants ; jettez les yeux sur les habitants de la campagne, & vous verrez que tous ont les pieds en dedans ; la situation contraire est donc de pure convention, & une preuve non équivoque que ce défaut n’est qu’imaginaire, c’est qu’un Peintre pécheroit autant contre la nature que contre les regles de son Art, s’il plaçoit son modele les pieds tournés comme ceux d’un Danseur. […] Je conviens que l’œil qui n’a pas le temps d’examiner nous trompe souvent ; mais la raison & la réflexion nous dévoilent ensuite ce que la vîtesse ne lui permet point d’anatomiser. […] Je m’en suis convaincu par moi-même, & ce n’est que d’après des expériences réitérées que je hazarde de combattre une idée à laquelle on ne seroit point attaché, si la plus grande partie des Danseurs ne s’appliquoit uniquement qu’à étudier des yeux. […] Ces deux Arts sont freres ; les accents tendres & harmonieux de l’un excite les mouvements agréables & expressifs de l’autre ; leurs talents réunis offrent aux yeux & aux oreilles les tableaux animés du sentiment ; ces sens portent au cœur les images intéressantes qui les ont affectés ; le cœur les communique à l’ame & le plaisir qui résulte de l’harmonie & de l’intelligence de ces deux Arts enchaîne le Spectateur, & lui fait éprouver ce que la volupté a de plus séduisant. […] Une pareille dissertation ne pourroit manquer d’être froide & de vous déplaire ; c’est aux yeux & non aux oreilles que les pieds & les jambes doivent parler.

166. (1887) Ces Demoiselles de l’Opéra « V. Pastels après décès. » pp. 54-87

D’aucuns tirèrent l’épée pour ou contre… Des paris considérables s’établirent… Pendant des mois, on épia un mouvement révélateur… A la fin, les parieurs députèrent chez la ballerine trois des leurs, chargés de lui demander la vérité à cet endroit… Quand ceux-ci se furent expliqués, Marie-Anne devint pourpre et baissa les yeux… Puis, dessinant une cérémonieuse révérence « pour s’efforcer de cacher son pudique embarras, » elle répondit d’une voix émue : — Hé ! […] On obéit… Les fenêtres furent ouvertes… Il était deux heures de l’après-midi… Les voisins, les passants, plusieurs milliers de personnes participèrent — des yeux — à cette sauterie sans… apparat. […] Puis, sa physionomie changeait ; ses yeux noirs devenaient pleins de provocations, et sa bouche aux lèvres minces laissait apercevoir ses dents blanches. […] Avant d’être princesse de Clermont, mademoiselle Le Duc avait eu, sinon des jours, du moins des nuits agitées ; ce qui me fait le croire, c’est que je lis dans une chronique de l’époque : « A l’occasion de mademoiselle Le Duc, dont l’éclat importun offusquait les yeux de quelques filles du même ordre, on examinait les avantages et les inconvénients d’une fortune rapide. […] Noverre disait de cette virtuose : « De ses yeux jaillissent des diamants.

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