Il paroît que le mot musique avoit chez les anciens une accéption très étendue et quelle offroit peut-être une idée aussi générale que notre mot harmonie. […] Il s’en suit que l’idée que nous attachons au mot musique, combinaison de sons simples et harmoniques, n’est pas celle qu il faut avoir en lisant les auteurs anciens. […] Je conclus donc que le mot musique chez les anciens, étoit employé métaphoriquement comme notre mot harmonie. On appelloit musique hypocritique, l’art du comédien ; d’où est venu le mot hypocrite, pour exprimer un mime qui contrefait l’homme de bien. […] Je vous ai déjà prouvé que les anciens avoient confondu les mots propres à désigner les choses.
Tout est confondu, jusqu’aux mots propres à désigner les objets dont on parle. […] Je vous ai dit plus haut que l’on avoit renversé le sens des mots et leurs justes significations. […] On voit encore ici le mot danse, et saltation mis à la place du mot geste ; les écoles de saltation n’enseignoient donc que les gestes d’imitation ou de convention, et les auteurs anciens employoient indifféremment le mot de saltation, tantôt pour le geste, tantôt pour la danse. […] Apulée fait la déscription d’une représentation du jugemcut de Paris, éxecutée par des pantomimes, qui jouoient sans parler ; lorsque cet auteur parle des mimes, il emploie le mot incedere, qui signifie marcher. […] En voilà plus qu’il ne faut sur l’abus des mots, je quitte cette tour de Babel, pour vous entretenir un instant de la saltation, ou de l’art du geste.
Lorsque la dame eut achevé sa lecture, ma mère entendit ces mots : — Et maintenant nous allons avoir le plaisir d’entendre notre petite amie, Loïe Fuller, réciter une poésie intitulée : « Marie avait un petit agneau. » Ma mère, au comble de la stupéfaction, était incapable de bouger ou de dire un mot. […] Je faisais des speechs, mais en prose, car j’employais des mots qui m’étaient propres, me contentant de traduire l’esprit des choses que je récitais sans me soucier beaucoup du mot à mot. […] Je l’ai prouvé par la suite en prenant au pied levé des rôles dont j’ignorais le premier mot, la veille de la première représentation.
Ils firent des mots sans nombre pour expliquer les différentes Danses qu’ils exécutaient : chacune a son nom qui la distingue. Pourquoi n’auraient-ils eu qu’un même mot pour désigner deux espèces qui auraient été tour à fait dissemblables. […] Aristote et Quintilien ont supposé les lettres, les mots, la langue, en un mot trouvée et convenue. En écrivant de la Danse, je suppose de même les pas et les figures, qui ne sont que les lettres et les mots de cet Art. […] C’est là mot à mot le système de l’Abbé Du Bos.