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7. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE IV. » pp. 47-60

Qu’il en puise quelques-uns dans les Tragédies qu’il voit représenter tous les jours, & qu’il abandonne tout ce qui est au-dessous du galant & du voluptueux à tous Maîtres de Ballets subalternes & plagiaires. […] S’il veut persuader, qu’il dessille les yeux trop fascinés des jeunes danseurs, & qu’il leur dise : « Enfants de Terpsichore, renoncez aux cabrioles, aux entrechats & aux pas trop compliqués ; abandonnez la minauderie pour vous livrer aux sentiments, aux graces naïves & à l’expression ; appliquez-vous à la Pantomime noble ; n’oubliez jamais quelle est l’ame de votre Art ; mettez de l’esprit & du raisonnement dans vos pas de deux ; que la volupté en caractérise la marche & que le génie en distribue toutes les situations ; quittez ces masques froids, copies imparfaites de la nature ; ils dérobent vos traits, ils éclipsent, pour ainsi dire, votre ame, & vous privent de la partie la plus nécessaire à l’expression ; défaites-vous de ces perruques énormes & de ces coëffures gigantesques, qui font perdre à la tête les justes proportions qu’elle doit avoir avec le corps ; secouez l’usage de ces paniers roides & guindés qui privent l’exécution de ses charmes, qui défigurent l’élégance des attitudes, & qui effacent la beauté des contours que le buste doit avoir dans ses différentes positions. […] renoncez au Théatre ; abandonnez un Art qui n’est pas fait pour vous.

8. (1797) Essai ou principes élémentaires de l'art de la danse, utiles aux personnes destinées à l'éducation de la jeunesse « Du menuet »

Du menuet On a abandonné depuis longtemps le menuet, et il n’est plus d’usage dans les danses de société, cependant il renferme tous les principes de l’art ; et il est facile de démontrer qu’on ne peut parvenir à danser, je ne dis pas bien, mais même médiocrement sans s’y être appliqué : cette danse développe les membres, leur donne des contours gracieux, du moelleux et de la justesse dans les mouvements, de l’aplomb et du soutien dans l’équilibre du corps ; et si la plupart des danseurs ont des attitudes forcées, des mouvements durs et un équilibre mal assuré, c’est qu’ils ignorent ou qu’ils n’ont pas assez pratiqué ces premiers principes ; aussi voit-on la plupart des danseurs modernes se placer comme des mannequins et se mouvoir comme des automates ; j’invite donc les amateurs à ne point le négliger ; il est très-important de s’appliquer à le bien apprendre, d’autant plus qu’il est à l’art de la danse ce qu’est l’a, b, c, à l’égard des mots et des discours.

9. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — La Descente d’Orphée aux Enfers. Ballet héroï-pantomime. » pp. 215-224

La vue d’un mortel étonne les ombres heureuses : de jeunes amans morts d’amour quittent leurs berceaux de myrthe et d’amarantes ; des héros qui ont versé leur sang pour la défense et la gloire de leur patrie abandonnent leurs allées ombragées de lauriers : Les poètes qui ont chanté leurs victoires, quittent les monts fleuris et les eaux argentés qui en découlent. […] Orphée désespéré croit qu’Euridice l’a abandonné, ou que l’enfer jaloux de son bonheur la lui a ravie ; il se retourne et la voit. […] Orphée inconsolable de la double perte d’Euridice cherche la solitude pour s’abandonner entièrement à sa douleur.

10. (1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Enée et Didon. Ballet tragique. » pp. 135-147

Didon, qui s’étoit rangée du côté des Troyens, et qui aimoit même leur courage en combattant à côté de son amant, le reçoit tendrement dans ses bras, Enée regarde son triomphe comme l’ouvrage de l’Amour, et il en abandonne toute la gloire à Didon. […] La scène est dans la nuit, un riche baldaquin couronne une couchette, sur la quelle Enée s’abandonne aux douceurs du sommeil. […] Enée se réveille, et ne voulant point résister aux impressions de sagesse qu’il vient de recevoir, il se lève et sort avec la ferme résolution d’abandonner Didon et de quitter Carthage. […] Didon abandonnée n’écoute plus que la voix du désespoir.

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