/ 166
15. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre XIII. » pp. 122-133

Ce que je vais écrire, Monsieur, pourra servir de régulateur aux maîtres de ballets qui n’ont fait encore que quelques pas dans la carrière qu’ils se proposent de parcourir ; des réllexions mûries par le temps et éclairées par l’expérience, soixante années de travail, une foule de compositions, peut-être trop considérable, des circonstances heureuses au développement de mes idées, un nombre de sujets capables de les rendre, de grands corps de danse, de vastes théâtres, des dépenses proportionnées à la grandeur des sujets que je transportois sur la scène, des succès soutenus dans le genre que j’ai crée, tout, dis-je, jusqu’à mes fautes, pourra guider les maîtres de ballets, et j’espère que mes observations paroitront justes et utiles à ceux même, qui peuvent le plus aisément s’en passer, ou qui n’en ont pas besoin. […] Il est heureux sans doute pour les progrès de la danse en action, qu’il y ait quelques maîtres de ballets que leurs fautes et leurs chûtes corrigent insensiblement ; en écoulant la voix du public et celle de l’expérience, ils choisissent des sujets moins diffus et plus généralement connus, ils abandonnent le Romanesque pour se livrer à des compositions moins fantastiques, plus nobles et plus sages ; ils n’essayent plus d’étendre en cinq actes un sujet dont le fond ne supporte que trois actes ; cette extension affoiblit l’action, elle ne marche plus, elle se traîne et se trouve paralisée par des hors-d’oeuvres. […] Ces ombres sont heureuses, aucune passion ne trouble leur repos. […] Les ombres heureuses offrent tous les âges et toutes les conditions ; les héros, les héroïnes, les poètes, les philosophes et les orateurs agiront, l’adolescence et l’enfance danseront ; c’est à l’imagination du peintre à tracer un vaste tableau ; s’il se contente de faire une allée d’arbres, terminée comme il est d’usage par une petite montagne, le maître de ballets se trouvera dans l’impossibilité de distribuer tous ces personnages sur un fond aussi étroitement combiné ; car il lui faut des berceaux, des allées, de petites collines, des bancs placés par la nature, des eaux tombant de terreins inégaux.

16. (1845) Notice sur Ondine pp. 3-22

Comme il savait très bien de quelle manière l’Ondin s’y était pris pour se frayer passage, il fit comme ce dernier, suivit exactement le même chemin, et fut assez heureux pour retrouver la petite chambre. […] Il est vrai qu’un danseur, homme d’esprit, deux qualités qui peuvent après tout se confondre, avait fourni à la jeune danseuse un cadre heureux et digne de son talent. […] L’invention en est heureuse ; c’est un honneur pour M.  […] la fée des eaux, heureuse de son destin, veut le subir tout entier. Le sceau de la mort s’imprime sur son front : Mattéo s’en aperçoit, il hâte la célébration des noces, cérémonie que le deuil environne, et dont l’idée est heureuse et mélancolique.

17. (1845) Notice sur La Sylphide pp. 3-23

Effie, indignée, accable Gurn de ses mépris, elle rend à son ami ses grâces les plus charmantes, elle est toute prête à l’épouser, elle est heureuse et confiante. Allons, que rien ne trouble ces noces heureuses ! […] Effie est heureuse, James est triste ; Effie s’abandonne à la joie d’avoir un mari, à dix-huit ans, James s’étonne, il hésite, il regarde, il voudrait percer le nuage ; il attend celle qui doit venir, et cependant l’heure approche, il faut marcher à l’autel, il faut donner, à la jeune Effie, l’anneau du mariage. […] Heureuse et coquette, et quelque peu épouvantée de son triomphe, la Sylphide s’abandonne à ses poses les plus charmantes. […] Depuis tantôt quinze belles années de succès et de triomphes, ce beau petit récit que mademoiselle Taglioni racontait si bien, nous était une fête toujours nouvelle, la fête des yeux plus que des sens, la fête heureuse et riante, qui ne laisse après elle ni un regret ni un désir.

/ 166