Par elle je voyais revivre les anciennes danses des tragédies.
Sans parler des Extraits que tant d’Auteurs font de leurs Ouvrages, & qu’ils insérent dans les Journaux, comme s’ils étaient d’une main étrangère ; sans parler des petites ruses en usage parmi les Littérateurs, je me contenterai de citer la Lettre qui accompagne certaine Tragédie assez connue, & dont j’ai eu la hardiesse d’insérer des fragmens dans ma missive adressée aussi à Monsieur de Voltaire.
Voilà, comme vous voyez, les ballets subordonnés en quelque sorte aux règles de la poèsie ; cependant ils différent des tragédies et des comédies, en ce qu’ils ne sont point assujettis à l’unité de lieu, à l’unité de temps et à l’unité d’action ; mais ils exigent absolument unité de dessin, afin que toutes les scènes se rapprochent et aboutissent au même but.
Je pourrois encore parler de ces acteurs tragiques qui créerent l’art de la tragédie, et dont les successeurs font encore aujourd’hui les délices de la scène Française ; si leur éloquence est secondaire, il faut avouer néanmoins que c’est un mérite de faire ressortir par la déclamation toutes les beautés de la poésie ; car combien ces belles productions ne perdent-elles pas de force et d’energie dans la bouche d’un lecteur ou d’un acteur médiocre ?
*** C’étaient, enfin, les Brach, les Volter, les Villiers, les Ribe… Et puis, la bande des rats de l’époque : Nini, Salaba, Travers, Bélardel, Jousset, Accolas, Vauthier, Desvignes ; Gauguin, qui aimait tant Régnier, de l’Ambigu ; Guénia, que Faure protégeait ; Subra, la sœur aînée de celle d’aujourd’hui, qui allait jouer la tragédie dans la banlieue sous le pseudonyme de Constance Léger, et qui joue maintenant sous son nom la comédie à l’étranger ; Pourchet qui déclarait si volontiers : « L’Empereur a dit comme ça à mon beau-frère… » Travers, qui obtenait tant de succès dans une romance de sa composition : J’avais quinze ans et j’étais jeune fille… et la petite Paillier, qui, complimentée par un abonné sur son minois de bergerette à la mode du siècle dernier, s’écriait en s’adressant aux camarades : — Comprenez-vous c’ t’ animal-là qui vient me dire que je ressemble à un Boucher !
On fit servir à ce spectacle les débris des décorations, des habits, des machines qu’on avait employés l’année précédente à la représentation de la tragédie de Mirame 113 ; ouvrage si peu fait pour réussir, que tout le pouvoir du premier Ministre ne fut pas assez fort pour l’empêcher de tomber ; mais qui, à le considérer philosophiquement, fut cependant le premier fondement de notre Théâtre.
Sa matiere est le sujet que l’on veut représenter ; sa forme est le tour ingénieux qu’on lui donne ; & sa figure se prend des différentes parties qui le composent : la forme constitue donc les parties de qualité, & l’étendue, celles de quantité ; voilà, comme vous voyez, les Ballets subordonnés en quelque sorte aux regles de la Poésie ; cependant ils différent des Tragédies & des Comédies en ce qu’ils ne sont point assujettis à l’unité de lieu, à l’unité de temps & à l’unité d’action ; mais ils exigent absolument une unité de dessein, afin que toutes les Scenes se rapprochent & aboutissent au même but.
Il y a sur l’emmelie théâtrale un doute ; on ne sait si c’était une danse qui s’exécutait dans les tragédies anciennes, ou si c’était quelque sorte de mélodie dont elles étaient accompagnées. […] Il l’exécuta lui-même avec la jeunesse de Délos ; et cette danse passa dans les tragédies des Grecs, pour y servir d’intermèdes.
Comment diable voulez-vous qu’on nous représente nos meilleures Comédies, nos meilleures Tragédies, si vous prétendez que les Acteurs ne les rendent, non plus à l’aide de leurs poumons, mais par le moyen de leurs bras & de leurs jambes ?
Cette scène peinte avec les couleurs fortes et les pinceaux hardis de la tragédie, offroit une situation terrible.
Je lui demandai un jour s’il étoit vrai qu’il eût retouché les tragédies de Schakespear ; il me répondit : je ne suis ni assez imbécille, ni assez téméraire pour oser porter une main profane sur les chefs-d’oeuvre du génie, et de l’imagination.
Cette fière Romaine, désespérée d’un triomphe qui lui enlève son amant, se livre sans ménagement à ce que l’amour au désespoir peut inspirer de barbare ; elle insulte son père qui fait de vains efforts pour la calmer ; elle maudit Rome et les Romains : puis s’élançant sur son frère, avec la fureur d’une lionne, elle lui arrache l’écharpe qu’elle avoit donnée à Curiace ; elle la passe dans ses bras ; elle accable Horace de reproches ; elle abhorre ses exploits ; elle méprise sa valeur ; elle déteste son courage, et s’abandonnant aux mouvemens impétueux de son âme, elle profère les imprécations les plus horribles contre la patrie ; elle exprime avec le langage énergique des yeux, de la physionomie, des gestes et des mouvemens du corps, l’imprécation fameuse que Corneille lui fait prononcer dans sa tragédie.
Ce qui nous reste des ouvrages dramatiques des Grecs, montre assez qu’Eschyle, Euripide et Sophocle étaient mieux instruits, et mettaient une plus grande importance dans tout ce qui avait quelque rapport à la représentation de leurs tragédies.
Elle va créer là demain un « drame muet » — nous disions autrefois une pantomime, — la Tragédie de Salomé, de M.
Je vois le peuple dansant se récrier à cette proposition ; je l’entends qui me traite d’insensé : mettre des tragédies et des comédies en danse, quelle follie !
Les Demoiselles Georges et Duchenois ne nous rassurent-elles pas sur le sort de la Tragédie ?
Je vois le Peuple dansant, se récrier à cette proposition ; je l’entends qui me traite d’insensé : mettre des Tragédies & des Comédies en Danse ?
On ne voit point sans enthousiasme une tragédie intéressante, un bel opéra, un excellent morceau de peinture, un magnifique édifice, etc. ainsi la définition que je propose paraît convenir également, et à l’enthousiasme qui produit, et à l’enthousiasme qui admire.
A parler franc, Constance, l’aînée, n’avait de dispositions que pour la tragédie.
Chant II, vers Le Madrigal d’abord en fut enveloppé ; Le Sonnet orgueilleux lui-même en fut frappé ; La Tragédie en fit ses plus chères délices ; L’Elégie en orna ses douloureux caprices ; 115 Un héros sur la scène eut soin de s’en parer, Et sans pointe un amant n’osa plus soupirer ; On vit tous les bergers, dans leurs plaintes nouvelles, Fidèles à la pointe encor plus qu’à leurs belles ; &c. […] Chant III, vers La tragédie, informe et grossière en naissant, N’était qu’un simple chœur, où chacun en dansant, &c. […] Chant III, vers 5 Ainsi, pour nous charmer, la Tragédie en pleurs D’Œdipe tout sanglant fit parler les douleurs, D’Oreste parricide exprima les alarmes, Et, pour nous divertir, nous arracha des larmes. […] Ainsi la Tragédie agit, marche, et s’explique.
Cependant quoique nous n’ayions pas encore recouvré l’idée de la Peinture dans toute son étendue, & que dans son rétablissement elle n’ait pû avoir pour guides des principes aussi certains, & des ouvrages aussi parfaits qu’étoient ceux de la Poésie, rien n’empêche que nous ne puissions en concevoir une idée assez juste sur les ouvrages des meilleurs Peintres qui l’ont renouvellée, & sur ce que nous en ont dit ceux mêmes qui nous ont donné les régles de la Poésie, comme Aristote & Horace : le premier assure dans sa Poétique que la Tragédie est plus parfaite que le Poëme épique, parce qu’elle fait mieux son effet & donne plus de plaisir. […] Mais il faut bien un autre art pour exécuter la pensée d’un tableau, que pour déclamer une Tragédie : pour celle-ci, il y a peu de préceptes à ajouter aux talens extérieurs de la nature ; mais l’exécution de la Peinture demande beaucoup de réfléxion & d’intelligence : il suffit presque uniquement au déclamateur de s’abandonner à son talent, & d’entrer vivement dans son sujet : le Comédien Roscius s’en acquitoit avec tant de force, que pour cela seul il méritoit, dit Cicéron, d’être fort regreté des honnêtes gens, ou plutôt de vivre toujours.
Le glorieux poète, qui venait de mettre le sceau à sa réputation en écrivant l’admirable tragédie des Vagues de la mer et de l’amour, s’était rendu à Paris dans une de ses crises fréquentes de découragement et d’hypocondrie107. […] Son esthétique du ballet était plus romantique que ses tragédies.
Un soir la petite ne reparut pas ; la mère pleure, le père reste stoïque, impassible, endosse son ancien uniforme, et, l’épée au côté, sort, le visage sombre, l’allure d’un héros de tragédie.
Jamais assaut plus furieux n’ébranla le socle du divin archer que dans les pages de la « Naissance de la tragédie » évoquant le délire d’Isolde, ce « chant de cygne métaphysique. » Le « tout bruissant » menace Apollon comme un formidable sursaut d’hydre.
En effet, les Latins ne chantèrent point leurs poésies ; à la réserve de quelques odes et de leurs tragédies, tout le reste fut récité. […] Quoique ce que nous nommons très improprement récitatif doive exprimer réellement les paroles, et qu’il ne puisse pas porter trop loin cette qualité importante, il doit cependant être toujours simple, et tel à-peu-près que nous connaissons la déclamation ordinaire : c’est la manière dont un excellent comédien débiterait une tragédie, qu’il faut que le musicien saisisse et qu’il réduise en chant.
Henri Heine disait : « Le ballet français forme un pendant à la tragédie de Racine et aux jardins de Lenôtre.
Ce ne furent pas seulement ces chansons historiques ou fabuleuses, qui contribuerent à l’invention des Balets ; mais encore la coutume introduite dans les Fêtes & dans les festins, où des Musiciens chantoient & dansoient les Poésies d’Homere : car Aristocles écrivant des Chœurs de la Tragédie, mêlez de chants & de danses, donne le nom d’Homéristes à ces Rapsodeurs, qui chantoient les vers de l’Illiade & de l’Odyssée, avec une espece de représentation.
Nous ne voulons point de changement ; tout est bien, et l’on ne peut rien faire de plus agréable. » Mais la danse, poursuivront les gens de goût, ne vous cause que des sensations médiocres, et vous en éprouveriez de bien plus vives, si cet art étoit porté au dégré de perfection où il peut atteindre. » « Nous ne nous soucions pas, répondront-ils, que la danse et les ballets nous attendrissent, qu’ils nous fassent verser des larmes ; nous ne voulons pas que cet art nous occupe sérieusement ; le raisonnement lui ôteroit ses charmes ; c’est moins à l’esprit à diriger ses mouvemens qu’à la folie ; le bon sens l’anéantiroit ; nous prétendons rire aux ballets, causer aux tragédies, et parler petites maisons, petits soupers ét équipages à la comédie. » Voilà, Monsieur, un systême assez général.
« Nous ne nous soucions pas, répondront-ils, que la Danse & les Ballets nous attendrissent, qu’ils nous fassent verser des larmes ; nous ne voulons pas que cet Art nous occupe sérieusement ; le raisonnement lui ôteroit ses charmes ; c’est moins à l’esprit à diriger ses mouvements qu’à la folie ; le bon sens l’anéantiroit ; nous prétendons rire aux Ballets ; causer aux Tragédies ; & parler petites maisons, petits soupers & équipages à la Comédie. » Voilà, Monsieur, un systême assez général.