Cependant l’Amour ordonne à celles-ci de combattre & de vaincre ces Sauvages ; elles les attaquent avec les armes du sentiment ; ceux-ci ne font plus qu’une foible résistance. […] Leurs yeux se cherchent & s’évitent, s’enflamment & s’attendrissent ; Inès tire une lettre de son sein ; Fernand l’imite ; chacun y lit les sentiments de l’amour le plus tendre, mais tous deux se croyant trompés, déchirent avec dépit ces premiers gages de leur amour. […] A ce spectacle, Fernand demeure immobile & sans sentiment, & n’écoutant soudain que son désespoir il s’y livre tout entier & tente de s’arracher la vie. […] Les Grands Comédiens seront du sentiment de Mr. […] Faut-il qu’un Auteur abandonne ses sentiments & renonce sans cesse à la nature pour se livrer à des féeries & à des bambochades, ou ne peut-on être ému que par un Spectacle continuel de Dieux & de Héros introduits sur la Scene ?
220. 19. le sentiment, lisés : de sentiment.
Si notre Art, tout imparfait qu’il est, séduit & enchaîne le Spectateur ; si la Danse dénuée des charmes de l’expression cause quelquefois du trouble, de l’émotion, & jette notre ame dans un désordre agréable ; quelle force & quel empire n’auroit-elle pas sur nos sens, si ses mouvements étoient dirigés par l’esprit & ses Tableaux esquissés par le sentiment ! […] S’il veut persuader, qu’il dessille les yeux trop fascinés des jeunes danseurs, & qu’il leur dise : « Enfants de Terpsichore, renoncez aux cabrioles, aux entrechats & aux pas trop compliqués ; abandonnez la minauderie pour vous livrer aux sentiments, aux graces naïves & à l’expression ; appliquez-vous à la Pantomime noble ; n’oubliez jamais quelle est l’ame de votre Art ; mettez de l’esprit & du raisonnement dans vos pas de deux ; que la volupté en caractérise la marche & que le génie en distribue toutes les situations ; quittez ces masques froids, copies imparfaites de la nature ; ils dérobent vos traits, ils éclipsent, pour ainsi dire, votre ame, & vous privent de la partie la plus nécessaire à l’expression ; défaites-vous de ces perruques énormes & de ces coëffures gigantesques, qui font perdre à la tête les justes proportions qu’elle doit avoir avec le corps ; secouez l’usage de ces paniers roides & guindés qui privent l’exécution de ses charmes, qui défigurent l’élégance des attitudes, & qui effacent la beauté des contours que le buste doit avoir dans ses différentes positions. […] Si leurs gestes & leurs physionomies sont sans cesse d’accord avec leur ame, l’expression qui en résultera sera celle du sentiment, & vivifiera votre ouvrage.
Tout Ballet qui dénué d’intrigue, d’action vive & d’intérêt, ne me déploie que les beautés méchaniques de l’Art, & qui décoré d’un titre ne m’offre rien d’intelligible, ressemble à ces Portraits & à ces Tableaux que les premiers Peintres firent, au bas desquels ils étoient obligés d’écrire le nom des personnages qu’ils avoient voulu peindre, & l’action qu’ils devoient représenter ; tant l’imitation étoit imparfaite, le sentiment foiblement exprimé, la passion mal rendue, le dessein peu correct, & le coloris peu vraisemblable. Lorsque les Danseurs animés par le sentiment, se transformeront sous mille formes différentes avec les traits variés des passions ; lorsqu’ils seront des prothées, & que leur physionomie & leurs regards traceront tous les mouvements de leur ame ; lorsque leurs bras sortiront de ce chemin étroit que l’école leur a prescrit ; & que parcourant avec autant de grace que de vérité un espace plus considérable, ils décriront par des positions justes les mouvements successifs des passions ; lorsqu’enfin ils associeront l’esprit & le génie à leur Art ; ils se distingueront ; les récits dès-lors deviendront inutiles ; tout parlera, chaque mouvement dictera une phrase ; chaque attitude peindra une situation ; chaque geste dévoilera une pensée ; chaque regard annoncera un nouveau sentiment ; tout sera séduisant parce que tout sera vrai, & que l’imitation sera prise dans la nature. […] Les connoisseurs la regardent avec les mêmes yeux que Pigmalion lorsqu’il contemploit son Ouvrage ; ils font les mêmes vœux que lui, & ils desirent ardemment que le sentiment l’anime, que le génie l’éclaire, & que l’esprit lui enseigne à s’exprimer.
Le sentiment, cet être imaginaire dont on parle tant, qu’on veut placer partout, qu’on décompose sans cesse sans l’éprouver, sans le définir, sans le connaître, le sentiment a prononcé en faveur des hautes-contre. […] (S) Le chant est l’une des deux premières expressions du sentiment, données par la nature. […] C’est le ton propre au sentiment, à la situation, au caractère de chacune des parties du sujet qu’on traite. […] ne suffit-il pas qu’un chant pour être bon, soit beau, facile, noble, et qu’il fasse passer agréablement à l’oreille des paroles, qui par elles-mêmes expriment le sentiment? […] Un chant, quelque beau qu’il soit, doit paraître difforme, lorsqu’appliqué à des paroles qui expriment un sentiment, il en exprime un tout contraire.
Et j’éprouvai le sentiment ce jour-là que la foule était vraiment la plus puissante des souveraines. […] Certains sentiments, eux aussi, sont rois. […] Moi, de mon côté je pensais à lui beaucoup plus que je ne voulais l’avouer, mais je fus tout de même assez raisonnable pour lui déclarer, au prix d’un grand effort de volonté, qu’il était trop jeune pour que notre sentiment mutuel pût se perpétuer sans danger et qu’il devait m’oublier.
Les figures symétriques de la droite à la gauche ne sont supportables, selon moi, que dans les corps d’entrée, qui n’ont aucun caractère d’expression, et qui, ne disant rien, sont faits uniquement pour donner le temps aux premiers danseurs de reprendre leur respiration, elles peuvent avoir lieu dans un ballet général, qui termine une fête ; elles peuvent encore passer dans des pas d’exécution, de quatre, de six, etc. quoique, à mon sens, il soit ridicule de sacrifier dans ces sortes de morceaux l’expression et le sentiment à l’adresse du corps, et à l’agilité des jambes ; mais la symétrie doit faire place à la nature dans les scènes d’action. Un exemple, quelque foible qu’il soit, me rendra peut-être plus intelligible, et suffira pour étayer mon sentiment. […] L’esquisse de ce tableau détermine naturellement la composition de l’autre : je vois alors des nymphes qui flottent entre le plaisir et la crainte ; j’en apperçois d’autres qui me peignent par le contraste de leurs attitudes, les différents mouvemens dont leur âme est agitée ; celles-ci sont plus fières que leurs compagnes ; celles-là mêlent à leur frayeur un sentiment de curiosité, qui rend le tableau plus piquant ; cette diversité est d’autant plus séduisante, qu’elle est l’image de la nature.
Leur trouble accroit & augmente sans cesse ; de la tendresse elles passent à la jalousie, de la jalousie à la fureur, de la fureur à l’abattement, de l’abattement à l’inconstance, elles éprouvent en un mot, successivement tous les sentiments divers dont l’ame peut être agitée & il les rappelle toujours à celui du bonheur. […] L’expression de celle-ci, l’air satisfait de ceux-là peignent avec des couleurs ménagées dans un passage bien exprimé de la Chaconne, les tableaux de la volupté coloriés par le sentiment & la décence. […] L’instant où le Grand Seigneur se décide, celui où il emmene la Sultane favorite, le combat des femmes, le grouppe qu’elles forment à l’arrivée du Sultan, ce changement subit, cette opposition de sentiments, cet amour que toutes les femmes témoignent pour elles-mêmes & qu’elles expriment toutes différemment, sont autant de contrastes que je ne peux vous faire saisir. […] Or, Monsieur, dans un Ballet bien conçu il faut peu de dialogues & peu de moments tranquilles ; le cœur doit y être toujours agité ; ainsi comment décrire l’expression vive du sentiment & l’action animée de la Pantomime ? […] Galathée par un sentiment de jalousie arrache des mains de sa rivale les dons qu’elle vient de recevoir ; elle s’en pare un instant, elle les jette de nouveau.
J’appuierai ensuite ce sentiment par des exemples vivants que l’on ne pourra rejetter si l’on est enfant de la nature, si la simplicité séduit, si le vrai semble préférable à cet Art grossier qui détruit l’illusion & qui affoiblit le plaisir du Spectateur. […] Celui qui joindra aux difficultés & aux graces de l’Art cette Pantomime vive & animée, & cette expression rare de sentiment, recevra avec le titre d’excellent Danseur, celui de parfait Comédien ; les éloges l’encourageront, les avis & les conseils des connoisseurs le conduiront à la perfection de son Art. […] Je suis de ce sentiment, & je ne fais pas plus de cas d’un visage triste, froid & inanimé que d’un masque ; mais comme il y a trois genres de Danse, réservés à des tailles & à des physionomies différentes, les Danseurs en s’éxaminant avec soin, & en se rendant justice, pourront tous se placer avantageusement. […] Le caractere de la beauté est beaucoup moins nécessaire à la physionomie que celui de l’esprit ; toutes celles qui, sans être régulieres, sont animées par le sentiment, plaisent bien davantage que celles qui sont belles, sans expression & sans vivacité. […] Voilà mon sentiment, & si l’on suivoit exactement la route que je viens de tracer, on briseroit les masques, on fouleroit aux pieds l’idole pour se vouer à la nature, & la Danse produiroit des effets si frappants, que l’on seroit forcé de la placer au niveau de la Peinture & de la Poésie.
Elle était comme une espèce de langage trouvé et convenu parmi les hommes, pour peindre ces deux sentiments.
Les grands et petits Violons, Qui sont comme autant d’Apollons, Là pareillement vous ravissent, Et, sous leurs tons, les Sens languissent, Par le sentiment du plaisir Qui vient doucement les saisir.
Le corps s’est alors agité, les bras se sont ouverts ou resserrés, les pieds ont formé des pas lents ou rapides, les traits du visage ont participé à ces mouvements, tout le corps enfin a répondu par des positions, des sauts et des attitudes, aux sons dont les oreilles étaient frappées ; et c’est ainsi que le chant, qui était l’Expression d’un sentiment, en a fait développer une seconde qui existait chez l’homme, à laquelle on a donné le nom de Danse ou de Ballet. […] La danse est en effet un art difficile, et qui ne peut pas être apprécié par tout le monde ; car nous voyons très souvent de mauvais sauteurs « plaire à un public aveuglé par des tours de force, par des gambades et par de ridicules pirouettes » ; tandis qu’un véritable danseur, qui danse en suivant toutes les règles, qui se dessine avec sentiment, avec intelligence, avec grâce, et qui donne de l’âme, de l’expression à ses mouvements, à ses pas, de la souplesse et une délicate légèreté à sa danse en général, ne produit de vives sensations que sur les gens de goût, les seuls (en trop petit nombre malheureusement) qui puissent bien sentir tout ce qu’il vaut. […] Il serait à souhaiter que les hommes à talent n’eussent pour juges que ceux dont l’opinion a pour base le sentiment, l’intelligence, et non de certains partisans, et la nombreuse troupe des Midas, « Connaisseurs aux belles oreilles ».
Lorsque je me proposai d’écrire sur un art, objet constant de mes études et de mes réflexions, j’étois loin de prévoir le succès et l’effet de mes lettres sur la danse ; quand elles parûrent en 1760, Elles fûrent accueillies avec intérêt par les gens de lettres et par les personnes de goût ; mais en même temps avec un sentiment de dépit et d’humeur de la part de celles pour qui elles étoient principalement composées. […] Cependant, comme dans tous les arts les observations et les principes puisés dans la nature finissent toujours par l’emporter, en criant que j’avois tort, en combattant mes idées, on les adoptoit par dégrès, on se rapprochoit de moi pas à pas, on faisoit insensiblement des réformes ; et je me vis bientôt secondé par des artistes dont le goût et l’imagination étant au dessus de leur art, se trouvèrent bien supérieurs au sentiment de l’envie et de la jalousie. […] En mettant sous les yeux du musicien les différens détails du tableau que je venois d’esquisser, je lui demandois alors une musique adoptée à chaque situation et à chaque sentiment.
Ce sera sous votre nom, que le public, indulgent pour votre fils, votre élève, recevra cet ouvrage ; et cette dédicace sera le sentiment profond de la reconnaissance, du respect et de l’amour, etc., etc., de Votre Fils affectionné Charles Blasis.
La période est une révolution verbale du sentiment dans la pensée : la voici qui part, qui fait route et qui achève son beau circuit : elle s’accomplit dans le retour de la figure.
Le premier témoignage direct que nous ayons des sentiments de Gentz pour Fanny est du 9 mars 1830. […] Ce dont je suis sûr, c’est que ni le temps, ni l’éternité ne sauraient éteindre le sentiment que tu as éveillé dans mon cœur. […] « Une chose est certaine, lui écrit-il le 3 juillet 1830, c’est que, au moment où je t’ai quittée hier, un sentiment de paix s’est éveillé en moi, comme je ne l’avais plus connu depuis longtemps, et que ce sentiment avait passé de ton âme tranquille dans la mienne. […] La perspective de ce départ avait éveillé en lui des sentiments contraires. […] Gentz avait éprouvé ce sentiment ; il était flatté d’être aimé d’une jeune danseuse.
Lorsque les danseurs animés par le sentiment, se transformeront sous mille formes différentes avec les traits variés des passions ; lorsqu’ils seront des Prothée, et que leur physionomie, et leurs regards traceront tous les mouvemens de leur âme ; lorsque leurs bras sortiront de ce chemin étroit que l’école leur a prescrit, et que, parcourant avec autant de grace que de vérité un espace plus considérable, ils décriront par des positions justes les mouvemens successifs des passions ; Lorsqu’enfin ils associeront l’esprit et le génie à leur art, ils se distingueront ; les récits dès lors deviendront inutiles ; tout parlera, chaque mouvement sera expressif, chaque attitude peindra une situation, chaque geste dévoilera une intention, chaque regard annoncera un nouveau sentiment ; tout sera séduisant, parceque tout sera vrai, et que l’imitation sera prise dans la nature. […] Les connoisseurs la regardent avec les mêmes yeux que Pigmalion, lorsqu’il contemploit son ouvrage ; ils font les mêmes vœux que lui, et ils désirent ardemment que le sentiment l’anime, que le génie l’éclaire, et que l’esprit lui enseigne à s’exprimer.
Les beaux mimes faisant voir l’action, les voix invisibles faisant entendre les sentiments et les âmes, quel spectacle ce pourrait être.
Cette espèce de déclamation n’est et ne doit être autre chose que l’expression en chant du sentiment qu’expriment les paroles. […] Mais ce chant formé de sons qui tiennent de la nature l’expression du sentiment qui leur est propre, a plus ou moins de force, plus ou moins de douceur, etc. […] Il n’est et ne doit être qu’une agréable imitation de la nature ; ainsi le chant réduit en règles, soumis à des lois, ne peut être qu’un embellissement du son de la voix humaine ; et ce son de la voix n’est et ne doit être que l’expression du sentiment, de la passion, du mouvement de l’âme, que l’art a intention d’imiter : or il n’est point de situation de l’âme que l’organe, tel que la nature l’a donné, ne puisse rendre. […] [Voir Geste (Danse)] Il faut, pour peindre sur cette toile animée et changeante, un sentiment juste, le tact fin et prompt, le talent enfin qui seul peut peindre, parce qu’il peut seul exprimer. […] ) Le geste au théâtre doit toujours précéder la parole : on sent bien plutôt que la parole ne peut le dire ; et le geste est beaucoup plus preste qu’elle ; il faut des moments à la parole pour se former et pour frapper l’oreille ; le geste que la sensibilité rend agile, part toujours au moment même où l’âme éprouve le sentiment.
Ces poses sur les demi-pointes sont fort belles par le jeu harmonieux des muscles et le sentiment de l’ensemble plastique.
Appollonius, Zamblique, Porphire, & Michel Psellus, tous grands Philosophes, mais un peu suspects de magie, au sentiment du peuple, & non pas de Saint Jérôme, assurent qu’il y a quatre sortes de Démons ou d’Esprits élémentaires, dont l’explication se trouve dans le Livre du Comte de Gabalis ; c’est un récit parfait de tout ce qui se peut dire de plus plaisant sur cette matiere, pour tâcher de persuader l’éxistance des Esprits élémentaires, de même que la réalité des apparitions des phantômes, à laquelle néanmoins beaucoup de gens bien sensez n’ont point de foi, & encore moins ceux qui se picquent d’esprits forts, non plus qu’aux apparitions diaboliques, quoiqu’il y ait quantité d’Auteurs qui prétendent qu’elles étoient assez communes au tems du Paganisme ; témoin l’éxemple qu’on en trouve dans Elian, Liv. 8. […] Ces sortes d’habitans, dit Lucrece tome 2., se plaisent à augmenter ces merveilles, par la maniere dont ils les récitent ; & ils sont toujours écoutez favorablement, par l’avidité qu’ont les hommes de sçavoir tout ce qui leur est nouveau, soit vrai ou fabuleux, quoique généralement contraire aux opinions des Physiciens, qui n’admettent que ce qui est naturellement possible & conforme au bon sens ; c’est aussi le sentiment des Philosophes modernes. […] Outre que Platon demeure d’accord, après avoir bien approfondi cette matiere, qu’elle n’est pas moins difficile à connoître qu’à persuader : son sentiment a beaucoup de rapport à celui d’Hérodote, ce fameux Historien de l’Antiquité, parlant des Oracles dans son Liv.
Le premier sentiment est un mouvement d’orgueil aveugle qui entraîne l’Artiste dans le précipice : le second est un amour vif pour la gloire qui l’élève tôt ou tard au plus haut degré.
Je vois dans ces portraits le caractère, le sentiment, la vie.
Si notre art, tout imparfait qu’il est, séduit et enchaîne le spectateur ; si la danse denuée des charmes de l’expression, cause quelque fois du trouble, de l’émotion, et jette notre âme dans un dèsordre agréable ; quelle force et quel empire n’auroit-elle pas sur nos sens, si ses mouvemens étoient dirigés par l’esprit, et ses tableaux esquissés par le sentiment ! […] Si leurs gestes et leurs physionomies sont sans cesse d’accord avec leur âme, l’expression qui en résultera sera celle du sentiment, et vivifiera votre ouvrage.
J’appuierai ensuite ce sentiment par des exemples vivans que l’on ne pourra rejetter, si l’on est enfant de la nature, si la simplicité séduit, si le vrai semble préférable à cet art grossier qui détruit l’illusion, et affoiblit le plaisir du spectateur. […] Celui qui joindra aux difficultés et aux grâces de l’art cette pantomime vive et animée et cette expression rare de sentiment, recevra avec le titre d’excellent danseur, celui de bon comédien : les éloges l’encourageront ; les avis et les conseils des connoisseurs le conduiront à la perfection de son art. […] Le caractère de la beauté est beaucoup moins nécessaire à la physionomie que celui de l’esprit : Toutes celles qui, sans être régulières, sont animées par le sentiment, plaisent bien davantage que celles qui sont belles, sans expression et sans vivacité. […] Voilà mon sentiment ; et si l’on suivoit exactement la route que je viens de tracer, on briseroit les masques, on fouleroit aux pieds l’idole, pour se vouer à la nature, et la danse produiroit des effets si frappans, que l’on seroit forcé de la placer au niveau de la peinture et de la poësie1. […] Tel est le caractère de la belle danse, qu’il faut y substituer le raisonnement à l’imbécillité, l’esprit aux tours de force, l’expression aux difficultés, les tableaux aux cabrioles, les graces aux minauderies, le sentiment à la routine des pieds, et les caractères variés de la physionomie à ces masques tiédes qui n’en portent aucun.
L’expression de ceux-ci, l’air satisfait de celles-là peignent avec des couleurs ménagées dans un passage bien exprimé de la chaconne, les tableaux de la volupté coloriés par le sentiment et la décence. […] Ainsi, comment décrire l’expression vive du sentiment et l’action animée de la pantomime ? […] Des signes extérieurs qui annoncent un sentiment, deviennent froids et languissans, s’ils ne sont subitement suivis d’autres signes indicatifs de quelques nouvelles passions qui lui succèdent ; encore est-il nécessaire de diviser l’action entre plusieurs personnages ; une même altération, des mêmes efforts des mêmes mouvemens, une agitation toujours continuelle fatigueroient et ennuieroient enfin et l’acteur et le spectateur ; il importe donc d’éviter les longueurs, si l’on veut laisser à l’expression la force qu’elle doit avoir, aux gestes leur énergie, à la physionomie son ton, aux yeux leur éloquence aux attitudes et aux positions leurs graces et leur verité. […] Lorsque les caractères sont soutenus, que celui de la nation qu’on représente n’est point altéré, et que la nature ne se perd pas sous des embellissemens qui lui sont étrangers et qui la dégradent ; lorsqu’enfin l’expression du sentiment est fidèle, que le coloris est vrai, que le clair-obscur est ménagé avec art, que les positions sont nobles, que les groupes sont ingénieux, que les masses sont belles et que le dessin est correct, le tableau dèslors est excellent et produit son effet. […] Galathée, par un sentiment de jalousie arrache des mains de sa rivale les dons qu’elle vient de recevoir ; elle s’en pare un instant, elle les jette de nouveau.
Dans presque tous les Psaumes, on trouve des traces de cette ancienne institution16, et les Interprètes de l’Écriture sont sur ce point d’un sentiment unanime.