/ 157
26. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE XII. » pp. 315-361

Rien n’est si nécessaire, Monsieur, que le tour de la cuisse en dehors pour bien danser, & rien n’est si naturel aux hommes que la position contraire. […] Les moyens les plus simples & les plus naturels sont toujours ceux que la raison & le bon sens doivent adopter lorsqu’ils sont suffisants. […] La raison en est simple, naturelle & évidente lorsque l’on considere que les temps & les mouvements du Danseur sont exactement subordonnés aux temps & aux mouvements de la Musique. […] Ce principe posé, la précision manque à celui qui ayant de l’oreille, ne sait pas prendre ses temps avec vîtesse ; l’élasticité du coudepied & le jeu plus ou moins actif des ressorts ajoutent à la sensibilité naturelle de l’organe & prêtent à la Danse de la valeur & du brillant. […] Ce goût naturel & inné pour la Musique entraîne après lui celui de la Danse.

27. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre premier. Instructions générales aux élèves » pp. 19-39

[10] Il faut prouver, par de la facilité et de l’aisance dans l’exécution générale de votre danse, que vous avez vaincu les plus grandes difficultés de votre art, et que cet exercice vous est naturel : le comble de l’art est de cacher l’art20. […] L’Apollon du Belvédère, le Laocoon, la Vénus de Médicis, le Mercure que l’on appelle l’Antinoüs, et quelques autres chefs-d’œuvre les plus étonnants de la sculpture grecque, sont des modèles sublimes de la perfection des formes humaines et de l’expression la plus naturelle. […] Dans l’art du chant la chose est différente ; une belle voix, de la facilité naturelle dans le gosier, et quelques années d’un travail peu fatigant, suffiront pour faire parvenir l’élève au but qu’il s’est proposé. […] Nos maîtres d’école de danse auront aussi introduit dans l’art cette expression, à raison des tableaux ressemblants aux arabesques de la peinture, par les groupes qu’ils ont formé de danseurs et de danseuses, s’entrelaçant de mille manières, avec des guirlandes, des couronnes, des cerceaux ornés de fleurs, et mélangés quelquefois d’instruments antiques propres à la pastorale ; et ces attitudes qui rappellent les belles Bacchantes que l’on voit sur les bas-reliefs antiques ; par leur légèreté presque aérienne, à laquelle se réunit eu même temps la vigueur et le contraste des oppositions, ont en quelque sorte rendu naturel à notre art le mot arabesque. […] Je pourrais ajouter que le danseur qui aura été assez heureux pour joindre à l’étude de son art celle du dessin, sous un maître éclairé, qui surtout l’applique à la connaissance du beau idéal, que ce danseur, dis-je, à mérite égal en dons naturels, et de ceux qu’il aura acquis dans une bonne école de danse, s’il est placé dans les mêmes circonstances que ses émules, aura toujours sur eux une grande supériorité.

28. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Appendice à l’ouvrage — Traduction des passages italiens parsemés dans cet ouvrage » pp. 115-118

Il n’y a que trop de gens qui, abusant de l’ingénuité du peuple, pour s’emparer de son vœu, foulant aux pieds la raison et outrageant le mérite, savent adroitement se servir du penchant naturel qu’a l’homme d’être imitateur, de courir où il voit les autres se porter, de répéter ce qu’il entend dire, surtout de la bouche des savants ou des grands qu’il suppose plus sages que lui, et aux opinions desquels il s’asservit par cette raison, religieusement ; et comme les plaisirs qui s’offrent aux yeux sont plus faciles à comprendre que ceux qui frappent l’esprit, ces gens abusent de l’ascendant qu’ils ont pris ; mais ces prestiges artificieux et trompeurs n’ont pas une longue durée. […] — Ne mettez jamais la tête droite sur les épaules, mais un peu tournée de côté à droite ou à gauche, soit que vous fassiez regarder votre figure en haut, ou en bas, ou devant elle, parce qu’il importe que vous donniez à vos têtes un mouvement qui annonce de la vivacité naturelle, et qu’elles ne paraissent pas endormies.

29. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 16 janvier. Une soirée à l’hôtel Charpentier. »

Les pas exécutés : marche rythmée, accentuée par le fléchissement des genoux ou par des mouvements plongeant du corps, sont d’un archaïsme aisé et persuasif ; la tenue des élèves de Mme Chasles reste naturelle et très gracieuse sans l’ombre d’un cabotinage précoce.

30. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre premier — Chapitre III. Objet de cet Ouvrage. »

La flatterie les a persuadés de la supériorité de leur être : la médiocrité leur baise servilement les pieds, et ils la protègent ; le grand talent, à qui la fierté est si naturelle les néglige, et ils le dédaignent.

31. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Première partie — Livre second — Chapitre VIII. De la Danse des Anciens considérée comme exercice. »

Tous les hommes ont un penchant naturel à l’imitation, de là le progrès rapide des usages, le succès étonnant des modes, l’établissement ferme des préjugés ; mais comme ce penchant tient d’une manière intime à la vanité, et qu’elle n’est jamais frappée que de ce qui lui en impose, c’est toujours vers des objets plus élevés que soi qu’il nous pousse et nous entraîne.

32. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre quatrième — Chapitre VI. Preuves de la possibilité de la Danse en action »

Qu’on se persuade que le siècle qui a produit, dans les Lettres, L’Esprit des lois, la Henriade, l’Histoire naturelle, et l’Encyclopédie, peut aller aussi loin, dans les Arts, que le siècle même d’Auguste.

33. (1908) Quinze ans de ma vie « Quinze ans de ma vie — VI, lumière et danse » pp. 60-71

Tout ceci nous prouve le résultat naturel des causes qui ont d’abord poussé les hommes à danser. […] Mais les sensations naturelles et violentes seules peuvent être exprimées par les mouvements naturels et c’est tout ce que je tente de faire.

34. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre II » pp. 10-20

Si j ajoute à toutes ces merveilles la variété des traits de la physionomie, leur mobilité à se ployer, et à se déployer pour exprimer énergiquement les sensations, et les affections de l’âme ; si je parle du langage des yeux, du feu qui en animant les regards, embrase, éclaire et vivifie tous ses traits, et les grouppes variés, que les passions y impriment ; si je joins à tant de facultés sublimes la variété des sons et des infléxions de la voix, ses modulations naturelles, la finesse de l’oreille, son tact et sa sensibilité ; enfin les gestes éloquents qui en résultent, et forment un langage universel, on trouvera dans cette richesse de moyens, les principes innés de la danse, et de la pantomime sans règle, de la musique, et de la mélodie sans étude. […] Pourroit-on se dispenser de nommer cette action franche et vive, danse naturelle, ou danse primitive ? […] Les chants jusqu’alors vagues, insignifiants, et barbares, furent assujetis à une mesure quelconque, à des modulations plus simples, et plus naturelles.

35. (1725) Le maître à danser [graphies originales] « Le maître a danser. Seconde partie. — Chapitre VI. De l’opposition des bras aux pieds. » pp. 210-213

De tous les mouvemens qui se font en dansant, c’est l’opposition ou contraste du bras au pied qui nous est la plus naturelle, & à laquelle on fait le moins d’attention.

36. (1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1663 — 8 janvier : Ballet des Arts — La Muse Historique de Loret — Loret, lettre du 24 février 1663 »

Les autres Beautés renommées, Qu’ailleurs j’ai, toutefois, nommées, C’étaient Saint-Simon, Cévigny, De mérite presque infini, La Vallière, autre Fille illustre, Digne un jour d’avoir un Balustre, Et la défunte Mortemar, Je la nomme défunte, car Depuis qu’elle n’est plus pucelle, Ce n’est plus ainsi qu’on l’appelle : Elle a toujours les mêmes traits, Autrement, les mêmes attraits, Elle est toujours jeune et brillante, Elle est, même, encore vivante : Mais cette beauté de renom, Est, du moins, morte par le nom, Qui n’est plus que pour Père et Mère, Que, de longue-main, je révère, Étant leur très humble Valet : Mais, pour revenir au Ballet, Les Voix douces et naturelles De quatre aimables Demoiselles, Les Luthistes et Violons, En leur Art, de vrais Apollons, Et, bref, toute la symphonie, Causaient une joie infinie.

37. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre huitième. Danseur sérieux, danseur demi-caractère. Danseur comique » pp. 88-95

Selon moi, le type de ce genre est l’imitation de ces mouvements naturels qui ont formé ce qu’on a appelé les danses dans tous les temps et chez tous les peuples. […] Canova tient lui seul le sceptre de la sculpture moderne ; ses nombreux ouvrages, épars par toute l’Europe, se distinguent par le moelleux des contours, par une expression infinie, par une douce naïveté, par une grâce naturelle, et par le charme d’une suavité rare qui attire et séduit tous ceux qui ont le plaisir de voir sa Hébé, sa Madelaine, son Pâris, sa Vénus, son Amour et Psyché, son Dédale, sa Danseuse, sa Muse, etc.

38. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre XII. » pp. 115-121

Le geste noble simple et naturel est l’ornement du discours ; il prêté de la dignité aux pensées, de l’énergie aux phrases ; il fortifie et augmente le charme de 1’ éloquence ; il est à l’homme qui parle, ce que sont les accompagnemens à l’homme qui chante. […] Si ces prétendus maîtres de ballets se faisoient lire ce qu’Apulée a écrit sur leur art, s’ils pouvoient entendre et concevoir les longues énumérations des qualités et des connoissances que doit avoir le maître de ballets, ils seroient effrayés de leur ignorance, ils abandonneroient une profession qui n’est pas faite pour eux et qu’ils dégradent journellement par des productions monstrueuses : en se bornant au pur méchanisme de l’art, nous serions plus riches en bons figurants, et les ballets prendroient alors une forme plus sage, un caractère plus imposant ; ils offriroient des tableaux plus agréables, un intérêt plus soutenu, des situations plus naturelles, des groupes mieux dessinés, des contrastes moins choquants et une action plus vive, plus noble et plus expressive.

39. (1909) Une vie de danseuse. Fanny Elssler « Chapitre premier. les années d’apprentissage  » pp. 1-36

A l’époque du Congrès un entrepreneur du nom de Horchelt exploitait avec un succès remarquable sur la scène du théâtre An der Wien les dispositions naturelles des Viennoises pour la danse. […] Mais elle courait le risque, sous cette direction, de tomber dans les excès du système classique, d’aboutir à la froideur en recherchant la correction et de laisser figer par la discipline sa fougue naturelle. […] L’exemple des virtuoses italiennes, que Fanny Elssler vit soit à la Scala, soit à Naples, l’encourageait à s’abandonner à sa verve naturelle que réprimaient les leçons d’Aumer. […] Déesse de la Victoire, Amazone, Minerve, Muse, fille de roi, elle représente au naturel tout ce que l’on voudra de noble… Cette apparition d’une beauté, d’une noblesse absolue, obtint, grâce à un art consommé, le succès le plus éclatant. […] La grâce ne lui était pas naturelle ; il lui fallait se surveiller pour n’être point trop imposante.

40. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre XI. » pp. 145-156

Ou les vices naturels qu’on observe en soi sont tels que rien ne peut y remédier ; en ce cas, il faut perdre sur le champ et totalement de vüe l’idée que l’on s’étoit formée de l’avantage de concourir aux plaisirs des autres ; ou ces vices peuvent être réformés par une application, par une étude constante, et par les conseils et les avis d’un maître instruit et éclairé ; et dèslors il importe essentiellement de ne négliger aucuns des efforts, qui peuvent remédier à des imperfections dont on triomphera, si l’on prévient le tems où les parties ont acquis leur dernier dégré de force et de consistance, où la nature a pris son pli, et où le défaut à vaincre s’est fortifié par une habitude trop longue et trop invétérée, pour pouvoir être détruit. […] Le second reméde à employer, est de conserver une flexion continuelle dans l’articulation des genoux, et de paroitre extrémement tendu sans l’être en effet : c’est là Monsieur, l’ouvrage du temps et de l’habitude : lorsqu’elle est fortement contractée, il est comme impossible de reprendre sa position naturelle et vicieuse, sans des efforts qui causent dans ces parties un engourdissement et une douleur insupportable. […] En voici la raison : la contraction des muscles dans les efforts du saut roidit les articulations et force chaque partie à rentrer dans sa place et à revenir de sa forme naturelle : les genoux ainsi forcés se portent donc en dedans, ils reprennent leur volume ; ce volume met un obstacle aux battemens de l’entrechat : plus ces parties ce joignent, plus celles qui leur sont inférieures l’eloignent ; les jambes ne pouvant ni battre ni croiser, restent comme immobiles au moment de l’action des genoux qui roulent désagréablement l’un sur l’autre, et l’entrechat n’étant ni coupé, ni battu, ni croisé par le pas, ne sauroit avoir la vitesse et le brillant qui en font le mérite.

41. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 1er janvier 1923. Carte de visite. »

Nous souhaitons que la classe de rythmique reprenne sa place dans l’enseignement auxiliaire ; qu’elle se tourne vers les chanteurs et les chœurs qui ont, peut-être, besoin d’elle ; que le professeur de rythmique n’usurpe plus les droits du maître de ballet en montant des œuvres hybrides qui, n’ayant rien à voir avec la danse, ont le don d’exaspérer les musiciens à qui elles paraissent s’adresser ; qu’on abolisse les « emplois de consolation » comme celui de grand sujet de rythmique qui sapent la hiérarchie naturelle et pourraient être envisagés comme certificats d’incapacité.

42. (1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1661 — 23 juillet : Le Ballet des Saisons — La Muse Historique de Loret — Loret, lettre du 31 juillet 1661 »

Si tôt que les Récits cessèrent, Ces Aimables Nymphes dansèrent Avec des habits précieux, Qui donnaient bien moins dans les yeux Que mille grâces naturelles Qu’on voyait éclater en elles.

43. (1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre septième. Des pirouettes ; » pp. 79-87

Le pied perdra sa forme naturelle, il vacillera sans cesse et du côté du petit doigt au pouce et du pouce au petit doigt : cette espèce de roulis occasionné par la forme convexe que l’extrémité du pied prend dans cette position, s’oppose à toute stabilité ; les chevilles chancellent, et l’aplomb se perd. » [NdE J.  […] Je terminerai cette note sur les pirouettes, en disant à l’élève qu’il peut tourner dans toutes sortes d’attitudes et d’arabesques, pourvu que le dessin de son corps, de ses bras et de ses jambes soit gracieux et facile, et que le mouvement de toutes les parties du corps soit naturel, et dénué d’une pénible et désagréable affectation.

44. (1724) Histoire générale de la danse sacrée et profane [graphies originales] « Histoire generale de la danse sacrée et prophane : son origine, ses progrès & ses révolutions. — Chapitre III. Des mouvemens de la Danse par rapport aux actions humaines, suivant les préceptes des Egyptiens & des Grecs. » pp. 59-69

Ce sont ces mouvemens qui font le plaisir, dit encore Plutarque, parce que bien que naturellement nous n’aimions pas à voir les emportemens des furieux, ni le désespoir, & les actions violentes des personnes à qui la douleur fait s’arracher les cheveux, ni les extravagances des fous & de ceux qui sont pris de vin ; néanmoins nous aimons à les voir représenter par des Balets & dans un tableau, parce que l’imitation a pour nous un charme secret, qui fait que la peinture des choses les plus horribles & les plus monstrueuses, qui seroient capables de nous éfrayer si nous les voyions au naturel, nous plaît & nous touche agréablement, sans faire ces mauvais effets : les enfans même en qui la raison n’agit pas encore, sont touchez de ces imitations. […] Plus les expressions sont naturelles, plus elles sont agréables.

45. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre II. » pp. 9-16

Je ne puis m’empêcher, Monsieur, de désapprouver les Maîtres de ballets, qui ont l’entêtement ridicule de vouloir que les figurants, et les figurantes se modèlent exactement d’après eux, et compassent leurs mouvemens, leurs gestes et leurs attitudes d’après les leurs : cette singulière prétention ne doit-elle pas s’opposer au développement des graces naturelles des exécutans, et étouffer en eux le sentiment d’expression qui leur est propre ? […] Le maître de ballets, à son exemple, doit faire recommencer une scène en action, jusqu’à ce qu’enfin ceux qui l’exécutent ayent rencontré cet instant de naturel inné chez tous les hommes ; instant précieux qui se montre toujours avec autant de force que de vérité, lorsqu’il est produit par le sentiment.

46. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE II. » pp. 15-29

Je ne puis m’empêcher, Monsieur, de désaprouver les Maîtres de Ballets, qui ont l’entêtement ridicule de vouloir que les figurants & les figurantes se modelent exactement d’après eux, & compassent leurs mouvements, leurs gestes & leurs attitudes, d’après les leurs ; cette singuliere prétention ne peut-elle pas s’opposer au développement des graces naturelles des exécutants, & étouffer en eux le sentiment d’expression qui leur est propre ? […] Le Maître de Ballets, à son exemple, doit faire recommencer une Scene en action, jusqu’à ce qu’enfin ceux qui l’exécutent, aient rencontré cet instant de naturel inné chez tous les hommes ; instant précieux qui se montre toujours avec autant de force que de vérité, lorsqu’il est produit par le sentiment.

47. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE XI. » pp. 290-314

Ou les vices naturels qu’on observe en soi sont tels que rien ne peut y remédier ; en ce cas, il faut perdre sur le champ & totalement de vue l’idée que l’on s’étoit formée de l’avantage de concourir aux plaisirs des autres ; ou ces vices peuvent être réformés par une application, par une étude constante & par les conseils & les avis d’un Maître savant & éclairé ; & dès-lors il importe essentiellement de ne négliger aucun des efforts qui peuvent remédier à des imperfections dont on triomphera, si l’on prévient le temps où les parties ont acquis leur dernier degré de force & de consistance, où la nature a pris son pli, & où le défaut à vaincre s’est fortifié par une habitude trop longue & trop invétérée pour pouvoir être détruit. […] Le second remede à employer, est de conserver une fléxion continuelle dans l’articulation des genoux, & de paroître extrêmement tendu sans l’être en effet ; c’est là, Monsieur, l’ouvrage du temps & de l’habitude ; lorsqu’elle est fortement contractée, il est comme impossible de reprendre sa position naturelle & vicieuse sans des efforts qui causent dans ces parties un engourdissement & une douleur insupportable. […] En voici la raison ; la contraction des muscles dans les efforts du saut roidit les articulations, & force chaque partie à rentrer dans sa place & à revenir à sa forme naturelle ; les genoux ainsi forcés se portent donc en dedans, ils reprennent leur volume ; ce volume met un obstacle aux battemens de l’entrechat ; plus ces parties se joignent, plus celles qui leur sont inférieures s’éloignent ; les jambes ne pouvant ni battre ni croiser, restent comme immobiles au moment de l’action des genoux qui roulent désagréablement l’un sur l’autre, & l’entrechat n’étant ni coupé, ni battu, ni croisé par le bas, ne sauroit avoir la vîtesse & le brillant qui en font le mérite.

48. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Lettres sur la danse. — Lettre VIII. » pp. 65-96

Voilà des contrastes simples, mais naturels : le bonheur de l’un augmente la peine de l’autre. […] il faut de la décence au théatre, j’en conviens ; mais il faut, avant tout, de la vérité et du naturel dans l’action, du nerf et de la vigueur dans les tableaux et un désordre bien entendu dans tout ce qui en éxige. […] Cette peinture forte, mais naturelle, frappa, intéressa, jetta le trouble et l’horreur dans l’âme du spectateur. […] La danse à ce spectacle à trop de caractères idéaux, trop de personnes chimériques et trop d’êtres de fantaisie à rendre, pour qu’elle puisse les représenter tous avec des traits et des couleurs différentes : moins de féerie, moins de merveilleux, plus de vérité, plus de naturel, et la danse paroîtra dans un plus beau jour. […] Je crois donc, Monsieur, qu’il nous seroit plus facile de peindre nos semblables ; que l’imitation en seroit plus naturelle et plus séduisante ; mais c’est aux poètes, comme je l’ai dit, à chercher les moyens de faire paroître des hommes sur le théatre de l’opéra.

49. (1760) Lettres sur la danse et sur les ballets (1re éd.) [graphies originales] « LETTRES SUR LA DANSE. — LETTRE VIII. » pp. 129-194

Ils estropient l’original, ils le chargent & n’en prennent que les défauts ; car il est plus aisé de saisir les ridicules que d’imiter les perfections : tels les courtisans d’Alexandre, qui ne pouvant lui ressembler par sa valeur & ses vertus héroïques, portoient tous le col de côté, pour imiter le défaut naturel de ce Prince. […] Il faut de la décence au Théatre, j’en conviens, mais il faut encore de la vérité & du naturel dans l’action, du nerf & de la vigueur dans les Tableaux, & un désordre bien entendu dans tout ce qui en exige. […] Cette Peinture forte mais naturelle frappa, intéressa & jetta le trouble & l’horreur dans l’ame du Spectateur. […] La Danse à ce Spectacle a trop de caracteres idéaux, trop de personnages chimériques & trop d’êtres de fantaisie à rendre, pour qu’elle puisse les représenter tous avec des traits & des couleurs différentes ; moins de féeries, moins de merveilleux, plus de vérité, plus de naturel, & la Danse paroîtra dans un plus beau jour. […] Je crois donc, Monsieur, qu’il nous seroit plus facile de peindre nos semblables ; que l’imitation en seroit plus naturelle & plus séduisante ; Mais c’est aux Poëtes, comme je l’ai dit, à chercher les moyens de faire paroître des hommes sur le Théatre de l’Opéra.

50. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre VII. Des Ballets Bouffons »

On oublie, malgré soi pendant la Représentation, le mauvais fond sur lequel ils sont bâtis, pour se livrer sans réserve aux détails agréables, au Chant d’expression, aux traits multipliés de naturel et de génie, dont les Musiciens excellents ont l’art de les embellir.

/ 157