[3] Quant au bienfait, très incertain souvent, et quelquefois acheté par des complaisances en faveur de l’adulation, n’en ai-je pas reçu d’avance un assez grand, assez délicatement accordé, pour ne pas balancer dans le choix de mon Mécène ? […] Ce sera sous votre nom, que le public, indulgent pour votre fils, votre élève, recevra cet ouvrage ; et cette dédicace sera le sentiment profond de la reconnaissance, du respect et de l’amour, etc., etc., de Votre Fils affectionné Charles Blasis.
La Reine le reçoit avec ce trouble et cette agitation qui caractérisent l’excès de la passion ; le jeune Ascagne vole des bras de Didon dans ceux d’Enée : il le presse contre son sein ; il imprime dans son ame l’image du plaisir, il grave dans son cœur les attraits de la volupté ; et satisfait de son ouvrage, le perfide enfant se retire à l’écart, pour jouir du progrès de ses artifices et s’applaudir de son triomphe. […] Didon, aussi tendre que le Prince Troyen, reçoit ses sermens avec transport ; elle lui promet sa main, son cœur et son trône. […] Les Maures sont terrassés et vaincus ; les uns prennent la fuite, ceux-ci payent de leur vie, l’excès de leur témérité, tandis que ceux-là, foulés aux pieds des vainqueurs et prêts à recevoir la mort, implorent leur clémence, et leur générosité. […] Didon, qui s’étoit rangée du côté des Troyens, et qui aimoit même leur courage en combattant à côté de son amant, le reçoit tendrement dans ses bras, Enée regarde son triomphe comme l’ouvrage de l’Amour, et il en abandonne toute la gloire à Didon. […] Enée se réveille, et ne voulant point résister aux impressions de sagesse qu’il vient de recevoir, il se lève et sort avec la ferme résolution d’abandonner Didon et de quitter Carthage.