J’aurais voulu savoir d’elle comment elle eut l’idée de ces danses lumineuses dont on ne se lasse pas et qu’elle vient de renouveler encore à l’Hippodrome. […] Loïe Fuller y dansera plusieurs danses nouvelles : la danse des perles, où elle se pare des colliers puisés au coffre d’Hérodias ; la danse des serpents, qu’elle manie dans une incantation farouche ; la danse de l’acier, la danse d’argent et cette « danse de la peur » qui la fait fuir, éperdue, devant la tête coupée de Jean, la tête du décapité, qui la suit partout et la regarde de ses yeux fixes de martyr. […] Salomé dansait, mais une Salomé en jupe courte, une Salomé ayant sur les épaules sa jaquette, une Salomé en costume tailleur, et dont les mains, les mains mobiles, expressives, tendres ou menaçantes, les mains toutes blanches, les mains pareilles à des bouts d’ailes, sortaient des vêtements, donnaient à elles seules toute la poésie de la danse, danse de séduction ou danse de terreur, danse infernale ou délicieuse. La lueur de la rampe se reflétait sur les verres du pince-nez de la danseuse et y allumaient comme des flammes, de fugitifs éclairs, et rien n’était plus fantastique à la fois et plus charmant que ces torsions de corps, ces mouvements de caresses, ces mains, encore une fois, ces mains de rêve s’agitant là devant Hérode, superbe en son manteau de théâtre et contemplant la vision de la danse idéale en robe de tous les jours.
Objection : On n’a pas été tenté dans les Danses. On a, dit-on, assisté à des danses, sans avoir été attaqué des tentations auxquelles on dit qu’elles exposent, et sans rien éprouver des mauvais effets qu’on leur attribue. […] Cependant, je suppose pour un moment, ce que j’ai bien de la peine à croire, que jamais on n’ait souffert aucun préjudice ni aucun dommage spirituel de la fréquentation des danses.