La danse, comme je la conçois, est toute autre chose ; son but doit être de parler aux yeux par le geste, de substituer des mouvements aux paroles, de représenter par des personnages vivants des actions intéressantes, enfin d’introduire sur la scène des comédiens muets, qui, sans le secours de la déclamation, fassent passer dans l’âme des spectateurs les impressions agréables qu’ils vont chercher aux théâtres ; je veux parler enfin de cette pantomime expressive, art connu, si chéri des Romains, et que ce peuple préférerait à tous les autres amusements. […] L’histoire nous a transmis les prodiges des Protées, des Empuses, des Pilades et des Bathiles ; ils ne se bornaient pas à des pas légèrement exécutés, à des attitudes régulières, si l’on veut, mais sans âme et sans vie : inspirés par le génie de leur art, ils exécutaient par son secours ce que le poète produit avec des paroles, le musicien avec des sons, le peintre avec des couleurs, le statuaire avec du marbre, c’est-à-dire qu’avec des pas et des gestes ils formaient de grands tableaux et représentaient des fables théâtrales, des véritables drames qui avaient leur exposition, leur nœud et leur dénouement.
Alors vous auriez été convaincu, Monsieur, qu’en Italie, les personnes riches ne sont pas les seules qui cultivent la musique ; que le goût de cet art y est généralement plus pur, plus répandu, plus éclairé qu’à Paris ; et que les paroles n’y sont pas plus négligées qu’en France, ou le plus bel opéra ne se soutient que par la perfection du poëme, l’empire de la musique, des décorations et des ballets : quant aux paroles, on ne les entend point et la plupart de nos chanteurs et de nos chanteuses se sauvent par les cinq voyelles.
Preuves de la possibilité de la Danse en action La parole n’est pas plus expressive que le geste.
Ils se saluèrent gravement, et le père, prenant le premier la parole, dit ces simples mots : — Monsieur le marquis, aurai-je du moins mon litre tous les jours ? […] Enfin, l’abonné parvint à se faire écouter, et il déclara à la jeune danseuse qu’elle avait mal interprété ses paroles, et qu’il avait de très bonnes raisons pour décliner absolument sa paternité.
Le saint docteur cite à ce sujet cette parole d’un païen, qu’une personne qui n’est point ivre, ne danse point, à moins qu’elle ne soit folle. […] » Le cœur de ses auditeurs fut en effet brisé par la force et l’onction de ses paroles, à laquelle Dieu joignit l’onction intérieure de sa grâce. […] Mais si toutes les paroles de ces saints livres sont véritables et inspirées de Dieu, comme elles le sont en effet, il est incontestable qu’il est défendu à des chrétiens de rechercher les divertissemens dont nous venons de parler : Si Dei hæc sint verba, et vera et divinitùs inspirata, ut reverà sunt : nefas sanè fuerit, christianis quæ jam dixerunt agere… N’employons donc pas, je vous en conjure, mes chers frères, à ces coupables divertissemens le temps qui nous est donné pour faire pénitence. […] Ne vous y trompez pas, mes frères, ne vous y trompez pas : on ne peut servir tout à la fois deux maitres, selon la parole de Jésus-Christ. […] « C’est, dit-il, à cause des pensées déshonnêtes, des paroles impures, de la corruption des mœurs, et des pernicieuses amorces pour toutes les œuvres de la chair qui y sont continuellement jointes : Idque ad turpes cogitationes, obscœna dicta, inhonestas actiones, morum corruptelas, et perniciosas adomnia opera carnis illecebras illis perpetuò conjunctas.
Tant pis, il faudra, cette fois-ci, me croire sur parole.
Le concile de Rouen, tenu l’an 1581, (Labbe, tom. 15, p. 825) s’exprime ainsi : « Nous connoissons et nous éprouvons combien sont grands les artifices du diable pour susbstituer son culte à celui de Dieu et des saints. » Il en donne pour preuves qu’aux fêtes solennelles des apôtres et des autres saints, « on tient des foires et des marchés publics, par lesquels non-seulement cet esprit de malice détourne le peuple de fréquenter les églises et d’assister à l’office divin et à la prédication de la parole de Dieu, mais où il a encore trouvé moyen d’introduire beaucoup de tromperies, de fraudes, de parjures, de blasphèmes, d’injures et d’outrages faits au prochain, et des jeux obscènes et impudiques : en sorte que les débauches ont en ces jours-là pris la place des aumônes, les danses, celle de la prière, et les bouffonneries, celle des prédications qu’on devroit aller entendre : Diabolus eleemosynas vertit in crapulas, orationem in choreas, et concionem in scurrilitatem ». […] Mais de plus, si on fait quelque attention aux paroles de plusieurs conciles que j’ai cités, on a dû remarquer que les danses y sont condamnées, même dans les noces, où l’usage en est le plus ordinaire, ce qui en montre le vice essentiel et radical ; qu’elles y sont défendues comme étant par elles-mêmes la source d’une infinité de désordres, et par conséquent dangereuses et mauvaises de leur nature : ce qu’on verra en relisant ce que j’ai rapporté du concile in trullo, et du troisième concile de Milan.
Un muet donne des sons, et forme par conséquent des chants : ce qui prouve que le chant est une expression distincte de la parole. […] De là il est évident que le chant a son expression propre, indépendante de celle de l’articulation des paroles. […] Cette espèce de déclamation n’est et ne doit être autre chose que l’expression en chant du sentiment qu’expriment les paroles. […] ) Le geste au théâtre doit toujours précéder la parole : on sent bien plutôt que la parole ne peut le dire ; et le geste est beaucoup plus preste qu’elle ; il faut des moments à la parole pour se former et pour frapper l’oreille ; le geste que la sensibilité rend agile, part toujours au moment même où l’âme éprouve le sentiment.
Mettez de l’expression, de l’âme, de l’abandon dans vos attitudes, dans vos arabesques 16 et dans vos groupes ; « Siano le attitudini degli uomini con le loro membra in tal modo disposte, che con quelle si dimostri l’intenzione del loro animo17. » [traduction] [6] Ces paroles du grand Léonard 18 doivent être gravées dans la mémoire du danseur et du mime, aussi bien que dans celle du peintre qu’a voulu instruire cet artiste sublime19. […] La musique d’un pas ou d’un ballet doit avoir encore plus de cadence et d’accent que la musique vocale, parce qu’elle est chargée de signifier plus de choses ; que c’est à elle seule d’inspirer au danseur, au mime, la chaleur et l’expression que le chanteur peut tirer des paroles, et qu’il faut de plus qu’elle supplée dans le langage de l’âme et des expressions tout ce que la danse ne peut dire aux yeux du spectateur (J. […] Il ritmo è la più sensibile distinzione dei componimenti musicali : poiché le infinite diverse combinazioni de’ vari tempi, de’ quali esso variamente si forma, producono le sensibili infinite diversità d’una dall’altra aria, o dell’uno dall’altro motivo, pensiero, idea, soggetto, o comunque voglia chiamarsi, e per ciò disse Virgilio : « Dell’aria io ben mi sovverrei se in mente avessi le parole. » Con cotesto numero o sia ritmo (che noi sogliamo regolare con la battuta), possono i ballerini, senza soccorso di armonia (cioè di canto o di suono), eseguire le loro imitazioni. […] La pantomime exprime avec rapidité les mouvements de l’âme ; elle est le langage de tous les peuples, de tous les âges, de tous les temps ; elle peint même mieux que la parole, une douleur extrême, ou une joie excessive.
Et comme ce qu’il dit sur les spectacles est également applicable aux danses, je crois devoir rapporter ses propres paroles en substituant les danses aux spectacles. […] En connoît-on beaucoup qui, affectionnés au sermon et à l’office de la paroisse, après les avoir ouïs, aillent perdre à la danse, dans une si grande effusion d’une joie mondaine, l’esprit de recueillement et de componction que la parole de Dieu et ses louanges auront excité ? […] Le jeûne a encore un caractère particulier dans le nouveau testament, puisqu’il est une expression de la douleur de l’Eglise dans le temps qu’elle aura perdu son époux, conformément à cette parole de Jésus-Christ même : (Matth. c. 9, v. 15.)
Parole d’honneur ! […] Parole d’honneur !
On peut juger de l’impression que produisirent sur moi les paroles que me rapportait mon agent. […] Celle du Casino a manqué de parole.
Sçache donc qu’il y a trois ans que fraischement arriué en Angleterre ie communiquay au sieur Montagut le dessain que i’auois de faire quelque chose sur la danse, & luy laissant vne coppie de ce que i’en auois desia trassé, le priay de la considerer & me conseiller en amy s’il seroit à propos que ie passasse outre : Il ne l’eut pas si tost veuë que loüant infiniment ma premiere resolution il me tentoit par mille flateuses paroles a la poursuitte de cest œuure, dont il protestoit souhaitter l’accomplissement auec impatience, & qui seroit indubitablement (disoit-il) bien veu de tout le monde, me faisant deslors sentir que ses persuasions ne tendoient qu’à son aduantage, & que sa vanité se promettoit cela de ma franchise que ie luy cederois aisement tout l’honneur qui se pourroit tirer de mes peines.