Par exemple, si c’est un pas tombé simple, tel que je l’ai deja dit dans la maniere de le faire, il faut que vous le commenciez par vous élever sur la pointe des pieds, les bras étant à la hauteur que le represente la Figure qui est au commencement de cette deuxiéme Partie : ainsi lorsque votre pied se tire derriere en tombant, les bras quoique étendus se baissent ; ce qui se fait par le mouvement de l’épaule qui se d’étend, en laissant baisser les bras & les relever dans le moment : vous voyez par là, la conformité des jambes avec les bras ; puisque dans le tems que vous tirez votre pied derriere, & que les genoux se plient, comme si les forces vous manquoient (ce qui fait votre pas tombé) les bras se baissent aussi & se relevent, lorsque vous faites votre second pas qui termine votre pas tombé, qui est un demi jetté : ainsi pour ce pas, les bras ne font que se baisser & se relever, ce qui est le mouvement de l’épaule, puisque ce n’est que par cette jointure que les bras s’émouvent. A l’égard des pas de Gaillarde, il faut les prendre differemment, en ce qu’ils se commencent par un assemblé ; c’est pourquoi les bras se tournent en dessous avant que vous pliez, lorsque vous assemblé les bras & les poignets se plient à demi en les prenant de bas en haut : mais lorsque vous faites votre second pas que vous portez à côté à la deuxiéme position, vos bras en retournant de haut en bas, s’étendent dans leur premiere situation : aussi lorsque vous vous élevez sur le pied que vous avez porté à côté pour tirer ensuite l’autre derriere, les bras font le même mouvement que je viens de dire au pas tombé, qui est de se baisser & de se relever. […] Mais comme j’ai deja dit, que ce pas ce commençoit par un assemblé ainsi si vous le faites du pied droit en avant, c’est le bras gauche qui doit s’opposer en avant de bas en haut : par exemple, en prenant votre mouvement pour assembler, le bras droit qui étoit devant, s’étend en dessous ; & dans le même tems le gauche se tourne aussi en dessous, & vient s’opposer au pied droit qui s’assemble devant le gauche : mais à peine cet assemblé est-il fait que le pied droit se glisse à la 4e position ; & en glissant le corps & la tête font un petit mouvement ; puis ils se redressent en vous élevant sur ce pied droit, & le bras gauche s’étend, pour lors vos deux bras restent dans leur situation, sans faire aucun mouvement pendant les deux jettez-chassez qui terminent l’étenduë de ce pas.
Premier mouvement du Contretems Par exemple, si vous devez faire un Contre-tems en venant du côté gauche, il se fait du pied droit, ayant les deux pieds à la deuxiéme position, le corps droit dans son à plomb, & vous pliez comme cette Figure le répresente, puis vous vous relevez en sautant. […] Deuxieme attitude ayant sauté Mais comme le mouvement que l’on prend pour sauter, est plus forcé que celui pour s’élever au demi-coupé ; cela fait qu’en vous élevant la jambe droite rejette le corps sur le pied gauche, & elle reste en l’air fort étenduë à côté, comme il est representé par cette seconde Figure, & de suite vous faites un pas de cette même jambe en la croisant jusqu’à la cinquiéme position, en posant le corps dessus, puis faites de suite un autre pas du pied gauche, en le portant à côté à la deuxiéme position, ce qui finit ce pas. […] Pour le faire du pied droit ayant le gauche devant, à la quatriéme position le corps posé dessus, il faut plier & vous relever en sautant sur le même pied, & la jambe droite qui est derriere se passe devant dans le même tems que vous pliez, & se tient en l’air fort étenduë pendant ce premier mouvement ; mais vous reprenez de suite un second mouvement en pliant sur le pied gauche, ce qui vous rejette sur le pied droit en formant un jetté : ainsi ce pas est composé de deux mouvemens differens, sçavoir, plier & sauter sur un pied ; puis plier sur le même pied, & se rejetter sur l’autre. […] J’ai dit que ces mêmes pas se font en arriere, on doit observer les circonstances pareilles ; Sçavoir, plier & sauter sur le pied qui est celuy qui est posé derriere, & celuy de devant se leve dans l’instant du premier mouvement en restant en l’air, le passer derriere lorsque l’on fait le second mouvement, ce qui est un demi-jetté par où se termine ce pas. Ceux du côté se prenent ordinairement après un pas de Bourée dessus & dessous, ainsi vous pliez & sautez sur le pied qui vient de finir le pas de Bourée, & celui qui est devant se leve, & au second mouvement vous vous laissez tomber sur ce pied en le jettant à la deuxiéme position.
L’Homme a eu des sensations au premier moment qu’il a respiré, et les sons de la voix, le jeu des traits du visage, les mouvements du corps ont été seuls les expressions de ce qu’il a senti. […] Il y a de même dans les mouvements du visage et du corps, des gestes de tous ces caractères ; les uns ont été les sources primitives du Chant, et les autres de la Danse. […] Suivez ces tendres enfants, depuis leur entrée dans le monde, jusqu’au moment où leur raison se développe c’est la Nature primitive qui se peint dans les sons de leur voix, dans les traits de leur visage, dans leurs regards, dans tous leurs mouvements. […] Voyez ce souris aimable, ces regards de feu, ces mouvements rapides, lorsqu’elle est émue par un sentiment de joie. […] Quoiqu’ils soient tous naturels à l’homme, on a cependant trouvé des moyens, pour donner aux mouvements du corps les agréments dont ils étaient susceptibles.
Mouvements des jambes. […] Il est inséparable du mouvement du cou-de-pied. Le mouvement de la hanche est un mouvement qui conduit celui du cou-de-pied et du genou. […] On peut être très doux et saccader tous les mouvements, en pliant bas comme en ne pliant pas. La raison en est simple, naturelle et évidente, lorsque l’on considère que les temps et les mouvements du danseur sont exactement subordonnés aux temps et aux mouvements de la musique.
J’ai separé le coupé de mouvement des autres coupez, pour ne le pas confondre, & pour faire sentir toute la grace qu’il faut lui donner, ce pas se fait en avant & de côté. […] C’est pourquoi, lorsque vous prenez votre premier pas qui est un demi-coupé fort soûtenu dans ce même tems, vous laissez tourner vos deux bras un peu en dessous, & vous faites un demi mouvement des poignets, & des coudes en commençant de bas en haut : ce qui doit être accompagné aussi d’une petite inclination du corps & de la tête imperceptible & sans paroître affectée ; mais lorsque vous prenez votre second mouvement qui est le jetté échapé, en commençant votre plié, vos bras s’étendent, & dans le même moment ils prennent un petit mouvement de l’épaule, en se baisant & en se relevant, le corps se redresse de même que la tête qui doit se retirer en arriere ; ce qui lui donne un port majestueux, & fait une liaison parfaite de tous les mouvemens, tant des jambes & des bras que de la tête & du corps. Quant à ceux que l’on fait de côté, quoique les mouvemens des bras se prennent à peu près de même, il y a cependant quelques petites observations à faire, qui sont un peu differentes ; Sçavoir, lorsque vous prenez votre demi-coupé (soit du pied droit) comme il se croise devant le gauche à la 5e. position, cela vous oblige pour vous assujetir en quelque façon à la regle de l’opposition, d’effacer un peu l’épaule droite, & de laisser venir un peu aussi la gauche en devant qui par consequent fait cette sorte d’opposé au pied droit, sans néanmoins vous distraire de faire ces mouvemens de bras de bas en haut ; mais les laisser un peu baissés en prenant votre second mouvement, & les relever en le finissant, comme aussi de faire une demie inclination du corps, & un petit baissement de tête, en observant pourtant que si c’est du côté droit que vous alliez, la tête doit aussi s’y tourner à demi.
C’est pourquoi, lorsque vous portez votre premier pas à la 2e position (ce pas se faisant après un autre pas, qui vous engage à avoir un bras opposé) le bras qui est opposé devant, s’étend de haut en bas, & l’autre bras qui est étendu fait un petit mouvement du poignet de haut en bas, aussi parce qu’il faut que vous tâchiez quand vous faites un mouvement d’un bras, que celui qui est étendu fasse une petite action qui accompagne : ainsi c’est jusques dans ces moindres parties que naissent cette grace & cette delicatesse dont j’ai parlé ci-devant. Quant aux autres Balancez que l’on porte en devant à la quatriéme position : par exemple, si vous le commencez du pied droit, le bras droit qui est devant, s’étend en prenant son mouvement de haut en bas, & le bras gauche se tournant en dessous, se plie & s’oppose au pied droit en revenant de bas en haut ; ce qui est le mouvement contraire de l’un à l’autre ; mais au second demi coupé la tête se tourne un peu du côté droit, puis se baisse doucement, & se releve de même ; ce qui accompagne ce pas, puisque dans le tems que vous vous relevez sur le pied gauche, la tête se releve aussi & fait voir un accord parfait de l’un avec l’autre.
Je ne dis pas qu’il soit moralement impossible de faire faire un mouvement aux jambes par un effort violent de la hanche ; mais un mouvement de cette espece ne peut être regardé comme un temps de l’entrechat ou de la Danse. […] Il faut pour bien danser que le corps soit ferme & tranquille, qu’il soit immobile & inébranlable dans le temps des mouvements des jambes. […] La raison en est simple, naturelle & évidente lorsque l’on considere que les temps & les mouvements du Danseur sont exactement subordonnés aux temps & aux mouvements de la Musique. […] Ce charme qui naît de l’harmonie des mouvements de la Musique & des mouvements du Danseur enchaîne ceux mêmes qui ont l’oreille la plus ingrate & la moins susceptible des impressions de la Musique. […] Les airs mêmes destinés à leurs réjouissances ont un caractere & un mouvement différents, quoiqu’ils portent tous celui de la gaieté.
On compte dans les bras trois mouvemens de même que dans les jambes, & qui sont rélatifs l’un à l’autre : Sçavoir, celui du poignet, celui du coude, & celui de l’épaule ; mais il faut qu’ils s’accordent avec ceux des jambes, en ce que, si vous faites des demi-coupez en des tems & ouvertures de jambes, & autres pas qui se prennent plus du cou-de-pied que du genou, ce sont les poignets qui agissent, au lieu que si ce sont des pas fort pliez, comme pas de Bourée, tems de Courante, pas de Sissonne, Contretems & autres pas qui demandent du contraste ou de l’opposition, pour lors c’est le coude qui agit, ou du moins qui est le plus apparent ; parce que l’on ne doit pas plier le coude, sans que son mouvement soit accompagné de celui du poignet : ainsi du cou-de-pied & du genou, qui ne peut finir son mouvement sans que l’on soit élevé sur la pointe du pied, qui par consequent est le cou-de-pied qui l’acheve. Quant au mouvement de l’épaule, il n’est apparent que dans les pas tombez où il semble par la pente que le corps fait, que les forces vous manquent : aussi l’épaule par son mouvement fait comme si les bras tomboient ; ce qui sera ci-après expliqué dans la maniere de faire les bras à chaque pas.
Ce spectacle m’a fait songer à ces mémorables présentations de modèles sur la piste de l’Oasis, l’an passé, où d’adorables jeunes filles faisaient le tour du plateau en adaptant l’allure et la forme du mouvement à la coupe de leurs vêtements de ville ou de soirée. Or les costumes très somptueux arborés par Mlle Nérys entravaient plutôt les mouvements indiqués à l’artiste par le maître Clustine qu’ils ne les secondaient ou les « habillaient ». […] Nous pouvons comprendre un homme de théâtre quand, comme Michel Larionoff, il s’évertue à circonscrire et à limiter volontairement le mouvement par l’usage du costume « rigide » ; encore ne le suivons-nous pas dans cette voie. […] Pour le faire taire — si nous avons bien compris — la figure bizantine esquisse un mouvement qui déplace les lignes, et c’en est fait de la belle ordonnance des plis drapés avec tant d’intelligence.
Les passions sont les ressorts qui font jouer la machine : quels que soient les mouvements qui en résultent, ils ne peuvent manquer d’être vrais. […] Que mes confreres se persuadent que j’entends par gestes les mouvements expressifs des bras soutenus par les caracteres frappants & variés de la physionomie. […] Ce mêlange innombrable de pas enchaînés plus ou moins mal, cette exécution difficile, ces mouvements compliqués, ôtent, pour ainsi dire, la parole à la Danse. Plus de simplicité, plus de douceur & de moëlleux dans les mouvements procureroit au Danseur la facilité de peindre & d’exprimer. Il pourroit se partager entre le méchanisme des pas & les mouvements qui sont propres à rendre les passions ; la Danse alors délivrée des petites choses, pourroit se livrer aux plus grandes.
D’ailleurs, pour aboutir, pour l’emporter dans ce duel avec les enchantements de la musique, il aurait fallu une autorité plastique, une plénitude du mouvement à peine imaginables. […] Dans les séries de temps battus ou sautés, ronds de jambes ou entrechats-six, la concordance de durée entre les mouvements consécutifs et identiques avait l’exactitude d’un chronomètre. […] Mais dès que mes danseurs passaient aux enchaînements de pas, ce rythme se désagrégeait, l’équilibre se déplaçait en faveur de l’élément statique, les repos se prolongeaient ou bien le mouvement se précipitait par saccades. […] La danse obtiendra de la musique de danse qu’elle redevienne un art appliqué, calqué sur la configuration du mouvement, ancilla choregraphiæ. […] C’est elle qui organise le mouvement dans la durée.
Supposé que vous ayez le pied gauche devant, par consequent le droit se trouve opposé : alors en prenant votre premier mouvement, votre bras droit fait aussi du même tems son mouvement en le prenant de haut en bas, & le gauche dans le moment se tourne en dessous, & se plie en faisant l’opposition au pied droit qui se croise devant le gauche, & sur lequel vous faites un second saut, sans que le bras gauche change son opposition, puisque ce second saut se releve dessus ce pied droit qui est devant ; ce qui fait le contraste du pied au bras. […] Pour ceux qui se font en tournant, se doit être le bras opposé qui vous fasse tourner, dont vous en trouvez plusieurs dans les danses de Ville : par exemple, dans la Mariée à la fin du premier couplet où il se trouve deux contre-tems, de côté sur le pied droit, le bras gauche opposé qui en s’étendant vous fait faire par son mouvement le demi tour à gauche ; mais comme le pied droit se croise derriere, c’est le bras droit aussi qui se plie, en ce qu’il se trouve opposé au pied gauche qui est devant. Une regle generale est que pour les pas en tournant, il faut que ce soit le bras du côté que vous voulez tourner qui vous en donne la facilité, parce que par son mouvement il oblige le corps de ce tourner du côté qu’il s’étend.
Mouvements en l’air que l’on fait d’une jambe, pendant que le corps est posé sur l’autre. […] Après le mouvement du battement, la jambe retombe à la cinquième position d’où elle est partie. […] Ces battements délieront les jambes, parce que l’élève sera obligé de doubler le temps et le mouvement. […] Doublez peu à peu le mouvement jusqu’à ce que vous soyez parvenu, avec le temps, à les faire aussi vite qu’on ne puisse les compter. […] Ne mettez point de roideur dans le mouvement des jambes, et ne les écartez pas.