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15. (1775) La littérature renversée, ou l’art de faire des pièces de théâtre sans paroles [graphies originales] « Lettre, d'un grand sauteur. A M. de Voltaire, sur les pantomimes . » pp. 17-37

Oui, s’il est prouvé que les gestes suffisent pour faire entendre ce qui se passe dans notre âme, la parole est inutile dans les drames ; & il est clair qu’on doit l’en bannir un jour, puisqu’on commence même à n’y mettre que de petites phrases, qu’on prend pour un dialogue vif & coupé. […] Ceux pour qui le vrai beau est un plaisir utile & réel, seront enthousiasmés de mon mérite, & leur âme en extase me saura gré d’avoir fait des Pantomimes  ». […] Mon âme, « vous le voyez, Monsieur, s’épanche devant vous avec liberté. […] On voit qu’alors il se passe un nouveau combat dans son âme. […] Les Spectateurs émus, agités, en concluent que le grand Timoléon, par un effort plus qu’héroïque, étouffe dans son âme les sentimens de la nature, n’écoute que l’amour de la Patrie, & se décide à faire poignarder son frère : les paroles sont inutiles pour exprimer tant de choses sublimes.

16. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre IV. Des Ballets poétiques »

Il ne jouit point de la douceur, dont il était digne, de faire passer dans l’âme de ses contemporains un goût utile. […] On n’a qu’à substituer à leur place beaucoup de patience, un fond inépuisable d’intrigue, une âme bien basse, un front d’airain.

17. (1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1668 — 15 février : La Fête de Vénus — Lettres en vers à Madame de Robinet — Robinet, lettre du 14 juillet 1668 »

Robinet, lettre du 14 juillet 1668 Celle des Acteurs d’Italie97 De plus en plus paraît jolie Par de surprenants Incidents Qu’ils mêlent chaque jour dedans ; Et CINTIO, Fils d’AURÉLIE, Dont l’Âme est savante et polie, Y fait le Rôle d’un Amant D’un air si tendre et si charmant, Ainsi que le célèbre OCTAVE, Toujours et si leste et si brave, Qu’en vérité, qu’en vérité Chacun s’en retourne enchanté.

18. (1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1665 — 26 janvier : Ballet de la Naissance de Vénus — La Muse Historique de Loret — Loret, lettre du 14 février 1665 »

Loret, lettre du 14 février 1665 Jeudi, douze du mois présent, Moi, l’Auteur de ces vers, présent, Le Ballet de Vénus céleste, Des Divinités la plus leste, Où de très beau Monde courut, Pour la dernière fois parut, Laissant un grand regret dans l’âme De maint Monsieur, de mainte Dame, De perdre le contentement D’un si cher divertissement, Où Beauchamp, Danseur d’importance, L’un des plus dispos de la France, (Et l’incomparable, dit-on,) Représentant du Dieu Pluton, Le rollet, ou le personnage, Fait admirer, à triple étage, Et, mêmement, aux Majestés, Ses étranges agilités.

19. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 5 mars. Pour le ballet français. Ballets russes ; ballets français. — Une variation de « Sylvia ». — « Fox-Péri ». — Juliette Péri. »

L’âme russe, polymorphe et fluide, s’incarne sous d’innombrables espèces, s’adapte à tous les moules. Elle est, cette âme, spontanée et complexe, Fokine peut imaginer les Danses Polovtsiennes, car le vent des steppes asiatiques fouette son sang, Nijinsky a pu être le Spectre de la Rose, car il fut nourri du plus pur suc de la civilisation occidentale. […] Exprimer avec clarté les choses essentielles de l’âme.

20. (1779) Trattato teorico-prattico di ballo « Trattato teorico-prattico di ballo —  Parte prima — Capitolo III. Delle qualità del Ballerino »

«Il faut que le Danseur Pantomime connaisse la Poésie, la Géométrie, la Musique, la Philosophie, l’Histoire, et la fable, qu’il sache exprimer les passions, et les mouvements de l’âme, que il emprunte de la Peinture, et de la Sculpture, les différentes postures et contenances, en sorte qu’il ne le cède à […] Ce Danseur doit savoir aussi particulièrement expliquer les conceptions de l’âme, et Découvrir les sentiments par les gestes, et les mouvements du Corps: enfin il doit avoir le secret de voir partout ce qui convient (qu’on appelle le Décorum) et, avec cela, être subtil, inventif, judicieux, et avoir l’oreille très délicate».

21. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre quatrième — Chapitre XII. Règles générales à observer dans les actions de Danse »

Copies monotones des froides Copies qui vous ont précédé, sujets communs qui n’êtes qu’un composé mécanique et sans âme de pieds, de jambes, et de bras, je n’ai point écrit pour vous. […] Habituez votre âme à sentir, vos gestes seront bientôt d’accord avec elle pour exprimer.

22. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 29 mai. Pétrouchka. L’Après-midi d’un faune. Soleil de nuit. »

En vain l’âme se débat contre l’armature qui l’emprisonne ; elle ne peut s’en arracher ; le geste de ferveur n’aboutit pas ; il sombre dans l’automatisme de la poupée. […] Mais elle n’efface pas de ma mémoire la figure de porcelaine de la ballerine-Karsavina, son sourire adorablement niais et ses beaux yeux vides d’être sans âme.

23. (1765) Dissertation sur les Ballets Pantomimes des Anciens, pour servir de programme au Ballet Pantomime Tragique de Sémiramis « [Seconde partie] »

Dans cette danse il est question de remuer l’âme, et non pas de plaire aux yeux. […] Cependant comme toute expression en avait autrefois été bannie en couvrant d’une masque le visage du Danseur qui même le plus souvent dansait seul, elle ne pouvait alors affecter le Spectateur que très médiocrement, en faisant seulement éprouver à son âme quelques atteintes passagères de volupté, telles qu’on les ressent lorsque la belle nature parée de ses grâces naïves, et aidée de celles d’un art qui se cache, se présente à nos yeux. […] Tout ce que la belle danse exige des Dupré, des Vestris, celle-ci le demande à ses Danseurs, et ce n’est pas tout : l’art du geste porté au suprême degré doit accompagner le majestueux, l’élégant, le délicat de la belle danse, et cela ne suffit pas encore : il faut, comme nous avons dit, que le Danseur Pantomime puisse exprimer toutes les passions, et tous les mouvements de l’âme. […] Mais si le Public judicieux et instruit, applaudit à mes tentatives comme je m’en flatte, parce que le vrai fait son effet dans tous les temps, dans tous les Pays (pour me servir d’une réflexion de l’Abbé Du Bos) je ne me découragerai point pour des prétendus bons mots, et j’aurai toujours devant les yeux le conseil, que l’auteur de la Poétique Française a donné aux Poètes, et que je m’approprie en qualité de compositeur de Tragédies Ballets « Qu’il faut avoir le courage d’écrire pour les âmes sensibles, sans nul égard pour cette malignité froide et basse, qui cherche à rire, où la nature invite à pleurer ».

24. (1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre quatrième — Chapitre I. Caractère que doit avoir la Danse Théâtrale »

Ainsi, toute Danse doit exprimer, peindre, retracer aux yeux quelque affection de l’âme, sans cette condition, elle perd le caractère de son institution primitive.

25. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome II [graphies originales] « Lettre XVIII. » pp. 185-200

Il joue la tragédie, la comédie, le comique et la farce avec la même supériorité ; il joint à la plus belle diction le ton et les accents vrais de la nature, faire répandre dans la tragédie un torrent de larmes, effrayer le public, l’entrainer à la terreur, et l’épouvanter par la vérité des tableaux déchirans, qu’il lui présente, le pénétrer de la plus vive douleur, l’électriser au feu des passions, et des sentimens, qui embrâsent son âme, tel est le talent de Garrick, tels sont les effets d’une expression vraie, d’une déclamation animée, qui tient tout de la nature, et qui n’emprunte presque rien de l’art. […] Son âme forte, mais sensible se répandoit sur tous les traits de sa physionomie, et les imprégnoit des sentimens, et des passions qu’il avoit à peindre. […] Ses gestes sont éloquents, parce qu’ils ne sont point étudiés dans une glace infidèle, qu’ils sont mus par les passions, dessinés par le sentiment, colorés par la vérité, et que le principe de leurs mouvemens réside dans l’âme de l’acteur. […] Je les regarde comme le trop plein d’une âme fortement agitée par quelques passions violentes, ou par de grands intérêts. […] La nature lui avoit fait, un don bien précieux, en prêtant à tous ses traits, et aux muscles de son visage la plus parfaite mobilité, de telle sorte que sa physionomie étoit le miroir de son âme, qu’elle se ployoit, cl se déploiyoit avec une heureuse facilité aux sentimens et aux passions qu’elle éprouvoit.

26. (1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 5 juin. Les deux Sacres. »

D’où provient-il, ce charme cruel, qui plie les artistes modernes les plus raffinés, les danseurs russes, à ces accents impératifs, qui greffe sur leur sensibilité slave l’âme pathétique et asservie de l’homme primitif ? […] Le rythme, telle apparaît pour lui la force unique, monstrueuse, apte à dompter l’âme primitive.

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