il devient froid ; ses moules sont de glace ; ses masques sont sans caractère et sans vie ; il ne peut saisir les finesses des traits, et toutes les nuances imperceptibles, qui grouppant, pour ainsi dire, la physionomie, lui prêtent mille formes différentes, quel est le modeleur qui puisse entreprendre de rendre les passions dans toutes leurs dégradations ? […] Vous concevez, Monsieur, qu’il étoit peu libre, que son âme étoit toujours agitée, que son imagination travailloit sans cesse, qu’il étoit les trois quarts de sa vie dans un enthousiasme fatiguant, qui altéroit d’autant plus sa santé, qu’il se tourmentoit et se pénétroit d’une situation triste et malheureuse, vingt quatre heures avant de la peindre et de s’en délivrer. […] Lorsque l’éléve est parvenu à mettre une figure ensemble, le maître lui enseigne la façon de l’animer, en y répandant de la force et du caractère ; il lui apprend à connoitre les mouvemens de la nature ; il lui indique la manière de distribuer avec art ces coups de crayon qui donnent la vie, et qui impriment sur la physionomie les passions et les affections dont l’âme est pénétrée. […] Ici je vois de la conduite et du raisonnement, de la précision dans l’ensemble, de la vérité dans le costume, de la fidélité dans le trait historique, de la vie dans les figures, des caractères frappans et variés dans les têtes, et de l’expression partout ; c’est la nature qui m’est offerte pas les mains habiles de l’art : mais là, je ne vois que des tableaux aussi mal composés que dèsagréablement dessinés. […] La dispute de Cicéron et Roscius à qui rendroit mieux la pensée, Cicéron par le tour et l’arrangement des mots, et Roscius parle mouvement des bras et l’expression de la physionomie, prouve très clairement que nous ne sommes à cet égard que des enfans, que nous n’avons que des mouvemens machinaux et indéterminés, sans signification, sans caractère et sans vie.