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72. (1803) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome I [graphies originales] « Avant-propos. » pp. -

Lorsque je me proposai d’écrire sur un art, objet constant de mes études et de mes réflexions, j’étois loin de prévoir le succès et l’effet de mes lettres sur la danse ; quand elles parûrent en 1760, Elles fûrent accueillies avec intérêt par les gens de lettres et par les personnes de goût ; mais en même temps avec un sentiment de dépit et d’humeur de la part de celles pour qui elles étoient principalement composées. […]   Briser des masques hideux, bruler des perruques ridicules, supprimer les paniers incommodes, bannir les hanches plus incommodes encore, substituer le goût à la routine, indiquer un costume plus noble, plus vrai et plus pittoresque ; exiger de l’action et du mouvement dans les scènes, de l’ame et de l’expression dans la danse ; marquer l’intervalle immense qui sépare le mécanisme du métier, du génie qui le place à côté des arts imitateurs ; c’étoit m’exposer à la mauvaise humeur de tous ceux qui respectoient et vénéroient les anciens usages quelque barbares et ridicules qu’ils pûssent être. […]   Cependant, comme dans tous les arts les observations et les principes puisés dans la nature finissent toujours par l’emporter, en criant que j’avois tort, en combattant mes idées, on les adoptoit par dégrès, on se rapprochoit de moi pas à pas, on faisoit insensiblement des réformes ; et je me vis bientôt secondé par des artistes dont le goût et l’imagination étant au dessus de leur art, se trouvèrent bien supérieurs au sentiment de l’envie et de la jalousie.

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