L’Aminta du Tasse, suave berger à houlette fleurie qui modula sa tendre et extravagante complainte d’amour devant les « femmes savantes » de la cour de Ferrare — ce petit Trianon avant la lettre — suscita tout un monde de fiction dont le maniérisme baroque et la rusticité de convention se montrèrent plus durables que mainte réalité solide. […] Or l’histoire de la nymphe farouche qui aima le berger Aminta pour avoir essayé de le tuer eut la chance de tenter Delibes et lui inspira cette partition qui, aujourd’hui, affronte avec aisance le voisinage d’une œuvre de Mozart. « Inspira », c’est bien le mot, car la vivacité de l’invention mélodique, jaillissante, facile, infiniment aimable, nous captive encore un demi-siècle après la création de Sylvia.