[Plan du ballet]
[13] J’ai divisé le Ballet en trois actes. Le premier représente une rue publique. La maison du Commandeur est d’un côté, celle de Don Juan de l’autre. L’action commence par uneSérénade que Don Juan donne à Donna Elvire sa Maîtresse, fille du Commandeur. Il obtient l’entrée dans la maison où il est surpris par le Père. Il se bat contre lui ; le Commandeur est tué ; on l’emporte.
[14] Dans le second Acte Don Juan donne chez lui un grand repas, précédéd’un bal, à ses amis et à ses Maîtresses. Lorsqu’on a dansé on se met à table. Au plus fort de la joie, le Commandeur en statue, frappe rudement à la porte. On va ouvrir ; il entre dans la salle ; les conviés sont épouvantés, ils prennent la fuite. Don Juan reste seul avec la statue. Il la prie, par dérision, de manger. Elle refuse, et convie, à son tour, Don Juan à manger à son tombeau. Don Juan accepte, et reconduit le Commandeur. Le bruit cesse ; les conviés, un peu rassurés reviennent dans la salle, mais la frayeur les accompagne, ce qui donne lieu à une entrée de Trembleurs. Don Juan revient. Il tâche de les rassurer ; ils l’abandonnent. Il reste seul avec son laquais, il donne des ordres, et sort.
[15] Le troisième Acte se passe dans un endroit destiné à lasépulture de personnes de distinction. Le Mausolée du Commandeur nouvellement achevé est au milieu. Il est lui même debout devant son tombeau. Don Juan est un peu étonné en le voyant. Il prend cependant un air assuré, et s’approche du Commandeur. Celui-ci le saisit par le bras, et l’exhorte à changer de vie. Don Juan parait obstiné, et malgré les menaces du Commandeur et les prodiges dont il est témoin, il persiste dans son impénitence. Alors le centre de la terre s’entrouvre vomissant des flammes. Il sort de ce Volcan beaucoup de spectres et de Furies qui tourmentent Don Juan. Il est enchainé par elles, dans son affreux désespoir il est englouti avec tous les monstres ; et un tremblement de terre couvre le lieu d’un monceau de ruines.
[16] Les Décorations de ce Ballet ont été faites avec beaucoup d’intelligence par le Sig. Quaglio. M. Gluck en a composé la Musique. Il a saisi parfaitement le terrible de l’Action. Il a tâché d’exprimer les passions qui y jouent, et l’épouvante qui règnedans la catastrophe. La Musique est essentielle aux Pantomimes : c’est elle qui parle, nous ne faisons que les gestes ; semblables aux anciens Acteurs des Tragédies et des Comédies qui faisaient déclamer les vers de la Pièce, et se bornaient eux mêmes à la partie de la gesticulation. Il nous serait presque impossible de nous faire entendre sans la Musique, et plus elle est appropriée à ce que nous voulons exprimer, plus nous nous rendons intelligibles. J’en parlerai plus amplement dans une autre occasion.