(1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1663 — 8 janvier : Ballet des Arts — La Muse Historique de Loret — Loret, lettre du 24 février 1663 »
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(1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1663 — 8 janvier : Ballet des Arts — La Muse Historique de Loret — Loret, lettre du 24 février 1663 »

Loret, lettre du 24 février 1663

Ce Ballet noble et magnifique,
Ce charmant Ballet harmonique,
Autrement Ballet musical,
Qui, durant le feu Carnaval,
Étant, en merveilles, fertile,
Divertit la Cour et la Ville
Fut rechanté, fut redansé,
Encor Jeudi, dernier passé,
Et fut, tout à fait, trouvé leste,
Par Monsieur le Cardinal d’Este,
Car c’était pour lui, seulement,
Qu’on fit ce renouvellement ;
Et pour d’autres Messieurs, encore,
Qu’au Louvre on aime et l’on honore,
À savoir Monsieur de Créqui,
Ambassadeur de France, et qui
N’avait, à cause de l’absence,
Vu ce Ballet de conséquence,
Ni Monsieur le Duc Mazarin,
Depuis peu, de retour du Rhin,
Ni sa belle et chère Compagne,
Ni même un Envoyé d’Espagne,
Venu de Madrid en ces lieux
Pour témoigner, tout de son mieux,
Le deuil qu’a son Maître, dans l’âme,
Pour le trépas de feue Madame.
Iceux, donc, maintenant en Cour,
Virent ce Ballet à leur tour :
C’est peu de dire qu’ils le virent,
De tout leur cœur ils l’applaudirent.
Louis, qui sous ses justes Lois
Gouverne les Peuples Gaulois,
Avec des grâces sans pareilles,
Y fit le Berger, à merveilles.
Plusieurs Princes et Grands Seigneurs,
Dignes, certes, de tous honneurs,
En ce Ballet galant dansèrent,
Et, des mieux, le Roi secondèrent.
Cinq jeunes et rare beautés,
Sources de feux et de clartés,
Dans leurs deux Danses différentes
Semblaient des planètes errantes,
D’un éclat vif et sans pareil,
Dont Madame était le Soleil.
Les autres Beautés renommées,
Qu’ailleurs j’ai, toutefois, nommées,
C’étaient Saint-Simon, Cévigny,
De mérite presque infini,
La Vallière, autre Fille illustre,
Digne un jour d’avoir un Balustre,
Et la défunte Mortemar,
Je la nomme défunte, car
Depuis qu’elle n’est plus pucelle,
Ce n’est plus ainsi qu’on l’appelle :
Elle a toujours les mêmes traits,
Autrement, les mêmes attraits,
Elle est toujours jeune et brillante,
Elle est, même, encore vivante :
Mais cette beauté de renom,
Est, du moins, morte par le nom,
Qui n’est plus que pour Père et Mère,
Que, de longue-main, je révère,
Étant leur très humble Valet :
Mais, pour revenir au Ballet,
Les Voix douces et naturelles
De quatre aimables Demoiselles,
Les Luthistes et Violons,
En leur Art, de vrais Apollons,
Et, bref, toute la symphonie,
Causaient une joie infinie.
Le Théâtre était fort paré,
Bien disposé, bien éclairé,
Et des Machines l’artifice
Y fit dignement son office.
Nos Reines, pleines d’un bon sens,
Mais qui des plaisirs innocents,
(Comme sages et débonnaires)
Ne sont nullement adversaires,
Malgré l’âpre et rude saison,
Quittant Chambre, Alcove et tison,
Furent, non seulement, icelles,
Mais Monsieur et Mesdemoiselles,27
Assez volontiers sur le lieu,
Pour audit Ballet dire adieu ;
Ayant illec, pour assistance,
Plusieurs Personnes d’importance,
Princes, Ducs, Comtes et Marquis,
Et quantité d’Objets exquis,
C’est-à-dire de beaux Visages
Bien dignes de vœux et d’hommages,
Que je lorgnais par-ci, par-là,
Étant en lieu propre à cela.