Chapitre XXII.
Du Menuet, & de la maniere de le danser régulierement.
Le Menuet est devenu la danse la plus usitée, tant par la facilité que l’on a de le danser, que par la figure aisée que l’on pratique à présent, & dont on est redevable à Monsieur Pécour, qui lui a donné toute la grace qu’il a aujourd’huy, en changeant la forme S, qui étoit sa principale figure en celle d’un Z, où les pas comptez pour le figurer, contiennent les Danseurs dans la même régularité, comme il est démontré dans la suite de ce Chapitre.
Après que vous avez fait les reverences que l’on fait ordinairement avant de danser, la seconde étant finie, il faut faire un pas de menuet en retrogradant à la place où vous avez commencé la premiere reverence, en formant un quart de cercle, de même qu’il est figuré par 1. ce qui vous rapproche, & vous présentez la main en dessous à la Demoiselle, comme il est représenté par 2. ces deux mains démontrant que celle du Cavalier doit être en dessous, pour que la Demoiselle s’appuie dessus.
Par cette Figure, elle vous represente que l’homme fait un pas de Menuet en arriere, pour laisser passer votre Demoiselle devant vous ; mais à la fin de votre pas de Menuet de côté, vous quittez la main & vous faites un pas de Menuet en avant, & la Demoiselle en fait un aussi en descendant, ainsi qu’il est démontré par cette Figure écrite, qui indique le chemin, & qui nomme les pas ; ensuite vous faites l’un & l’autre un pas de Menuet du côté droit en arriere, qui vous remet en presence par le quart de tour que vous faites à votre premier pas, de ce pas de Menuet de côté, ainsi qu’il est écrit ; mais en faisant ce pas vous effacez l’un & l’autre l’épaule droite, & la tête un peu tournée du côté gauche en vous regardant ; ce que l’on doit observer dans tout le courant de votre Menuet, mais sur-tout sans affectation.
Pour suivre le chemin que cette Figure répresente, il faut faire deux pas, 2. du côté gauche, vous devez pour lors, avoir le corps droit, & en passant à vos deux pas en avant, 3. effacer l’épaule droite l’un & l’autre, mais en donnant toûjours la droite à la Demoiselle, en vous regardant tous deux en passant, (effacer l’épaule, c’est la retirer un peu en arriere, en se presentant le haut du corps presque devant) néanmoins en continuant de faire vos pas en avant, ainsi que cette Figure le trace, qui est la Figure principale du Menuet ; mais lorsque vous avez fait cinq ou six tours de fuite, il faut d’un coin de la Salle à l’autre, en vous regardant, vous presenter la main droite en allant en avant.
Et pour vous le faire mieux comprendre, lorsque vous allez en avant, levez (à la fin de votre dernier pas en revenant du côté gauche) le bras droit à la hauteur de la poitrine, la main en dessous, de même qu’il est representé par ces deux bras : la tête étant tournée du côté droit en se regardant, vous faites un petit mouvement du poignet & du coude de bas en haut, ce qui est accompagné d’une legere inclination en presentant la main, & toûjours vous regardant en faisant un tour entier, comme il est representé & tracé par cette Figure.
Ayant quitté la main droite, il faut aller en avant, en faisant un demi tours.
Pour presenter la seconde fois la main qui est la gauche, en observant le même ceremonial que vous avez fait en presentant la main droite, ce qui est démontré par cette Figure.
Et quand vous vous quittez la main gauche, il faut faire un pas de Menuet du côté droit en arriere, ainsi qu’il est écrit 4. ce qui vous remet dans votre Figure principale que vous continuez trois ou quatre tours ; ensuite vous vous presentez les deux mains en levant vos deux bras à la hauteur de la poitrine, & le corps même se plie.
En presentant les mains à la Demoiselle, dans le même goût que j’ai tâché d’exprimer dans ces deux Figures, & lorsque vous tenez les deux mains, vous faites un tour ou deux, mais l’homme fait un pas de Menuet en arriere, en amenant à lui la Demoiselle dont il quitte la main gauche seulement, pour en ôter du même tems son chapeau : enfin le pas du Menuet fini, l’homme porte le pied droit à côté de la deuxiéme position : & puis ils font ensemble les mêmes reverences qu’ils ont faites avant de danser.
Ce n’est pas que je pretende qu’un Menuet, qui seroit dansé un peu plus long-tems ne soit pas bon ; mais il m’a paru que quoiqu’il soit arbitraire, en lui donnant cette proportion, il est plus dans la bien-séance, & la raison la plus essentielle, c’est que quelque bien que l’on danse c’est toûjours la même Figure, ainsi le plus court qu’on le peut faire c’est le meilleur.
Mais lorsque l’on est parvenu au point de le bien danser, on peut de tems à autre y faire quelque agrément ; ce que je vais expliquer dans le Chapitre suivant.