A Sa Majesté l’Empereur de toutes les Russies.
La double faveur que je viens de recevoir de votre Majesté Impériale, a pénétré mon cœur de la plus vive reconnoissance. Non seulement elle me permet de lui dédier mon ouvrage, mais elle daigne ajouter encore à cette grâce, celle de le faire imprimer à mon bénéfice. Cet honneur sait aux arts mériteroit d’être célébré par tous les artistes de nos jours. Sire, le cœur sensible de votre Majesté Impériale, a voulu sans doute récompenser les sentimens du Sr. Le Picq, mon élève par un bienfait que mes foibles talens n’auroient jamais osé solliciter.
Mais telles sont les jouissances qu’ambitionne votre Majesté Impériale, elle semble n’être élevée au rang suprème que pour jouir du privilège de faire des heureux. Ce spectacle consolant embellit mes derniers jours, et me fait regretter de ne voir qu’en perspective cette Cour brillante, où l’on rencontre la science parée de toutes les graces de l’esprit ; où la philosophie toujours associée à la raison ne cherche point à tromper les hommes par des impostures insidieuses et des promesses mensongères ; où les arts et les talens se développent paisiblement à l’ombre d’un trône que la gloire environne et dont les vertus du Monarque relévent la splendeur. Sire, les artistes qui ont besoin d’être encouragés, iront se réfugier dans votre empire et s’empresseront de consacrer dans leurs ouvrages la générosité du nouvel Alexandre, qui les protège d’une manière si éclatante.
Daignez recevoir, Sire, avec cette indulgente bonté qui vous caractérise, l’hommage de mon immortelle reconnoissance.
Je suis avec le plus profond respect,
Sire,
DE VOTRE MAJESTÉ IMPÉRIALE
Noverre.