(1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre quatrième — Chapitre VII. Supériorité et avantages de la Danse en action »
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(1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre quatrième — Chapitre VII. Supériorité et avantages de la Danse en action »

Chapitre VII. Supériorité et avantages de la Danse en action

La Danse en action a sur la Danse simple, la supériorité qu’a un beau tableau d’histoire sur des découpures de fleurs. Un arrangement mécanique sait tout le mérite de la seconde. Le génie ordonne, distribue, compose la première. Tout le monde peut faire des découpures, il n’y a nul mérite à les faire même supérieurement. On marche dans les sentiers difficiles qui conduisent au Temple de mémoire à côté des Montesquieu, lorsqu’on peint comme Vanlo.

Les avantages d’un genre sur un autre sont en proportion des moyens qu’il procure de développer le talent plus fréquemment et avec moins de difficulté.

Or, le talent supposé dans le Danseur, la Danse en action lui fournit autant de moyens d’expression qu’il y a de passions dans l’homme. Autant de tableaux qu’il y a dans la nature de manières d’être, autant d’occasions de les varier qu’il y a de façons différentes de sentir et d’exprimer.

Un grand Peintre a commencé par assurer sa main. L’Art du Dessin l’a réglée. Il a d’abord tracé quelque partie d’une figure, et successivement allant d’études en études, de progrès en progrès, il a dessiné la figure entière. C’est la Danse simple.

Son imagination s’est échauffée par les chefs-d’œuvre qui l’ont frappée ; son talent s’est développé par l’étude constante de la nature. Il saisit alors le pinceau. Les grands hommes renaissent, les événements mémorables se retracent ; les couleurs parlent, la toile respire. C’est la Danse en action.

Jeunes talents qui entrez dans la carrière du Théâtre ; étudiez la nature, approfondissez l’Art. Venez. Suivez la multitude qui court en foule dans le Salon du Louvre ; mais ne regardez pas comme elle, sans voir. Recueillez-vous : apprenez à peindre, ou ne prétendez à aucune sorte de gloire.

Vous vous arrêtez au premier pas ? Eh quoi (dites-vous) on a donc trouvé le secret de peindre l’esprit ! Je vois dans ces portraits le caractère, le sentiment, la vie. Dans l’arrangement pittoresque des traits du premier, je devine que le souvenir de ce qu’il a entendu le console de ne plus entendre. Je découvre des étincelles de génie à travers l’aimable gaieté qui me séduit dans le second. C’est un Philosophe qui n’est sérieux qu’avec ses livres. Il rit, joue, et badine dans le monde avec les hommes… Un flot nous entraîne. Je vous suis… Quelle attention ! Quel silence !

Vous admirez le pinceau mâle, qui met sous vos yeux la dispute de Saint Augustin contre les Donatistes. L’expression qu’il répand dans tous les traits de Saint Charles Borromée passe jusqu’au fond de votre cœur. Tournez la tête : parcourez ces quatre tableaux où une allégorie fine et délicate vous retrace les Arts libéraux. Que pourrait produire de plus aimable la main même des Grâces ?

Voilà les ressources sans nombre que les images fournissent au véritable talent. Plus la danse, comme la peinture, embrassera d’objets ; et plus elle aura des moyens fréquents de déployer les belles proportions, de les mettre dans des jours heureux, de leur imprimer le seul mouvement qui peut leur donner une sorte de vie.

On ne saurait faire qu’un seul tableau, de toutes les Danses simples qu’a exécutées, pendant vingt ans, le meilleur Danseur moderne. Voyez que de jolis Teniers naissent chaque jour sous la main légère de Dehesse.