30 décembre. Polyphème.
Le rêve de reconstituer l’orchestique des anciens ou bien, pour user de la terminologie plus circonspecte de Goethe, « s’approchant de la forme ancienne », a de tout temps hanté l’imagination des musiciens et des maîtres de ballet▶ : Gluck et Noverre jadis, Ravel et Fokine hier encore. L’intermezzo de danses intercalé dans Polyphème ne prétend point à une pareille évocation. Une belle intention n’aurait d’ailleurs pas pu être réalisée dans le cadre restreint où le ◀ballet▶ étouffait. Car le plateau de la Salle Favart ne s’est pas mis pour les danseurs en frais d’hospitalité. L’idylle bocagère, le « Waldweben » antique imaginé par M. Cras se déroule sur une scène encombrée par d’énormes rochers praticables ; de grands arbres sont plantés sur tous les plans, toute une flore artificielle complète la mise en scène. Qu’y avait-il à faire ? Mme Stichel fait tourner son corps de ◀ballet autour des arbres dans une sorte de farandole de cotillon ; mais il est difficile de danser une ronde autour d’un arbre en trompe-l’œil qui n’est pas rond. Il aurait fallu, au moins, un arbre « plastique ».
L’interprétation ? Comment en juger dans ces conditions ? Les artistes se débattent contre l’impossible. Ainsi Diane (Mlle Luparia) a tout juste une attitude dans son rôle. Et si nous signalons dans la petite variation de Mlle Soulé quelques entrechats — cinq de volée brillants, si nous constatons les aptitudes plastiques, fort appréciables, de M. Gerlys — nous aurons été aussi explicite que possible.