(1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — La Mort d’Hercule. Ballet tragique. » pp. 157-168
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(1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome III [graphies originales] « [Programmes de ballets] — La Mort d’Hercule. Ballet tragique. » pp. 157-168

La Mort d’Hercule.
Ballet tragique.

Personnages.

  • Hercule .
  • Déjanire .
  • Hilias .
  • Jolé .
  • Philoclète .
  • Lycas .
  • Junon.
  • La Jalousie.
  • Compagnons d’Hercule.
  • Femmes de la suite de Déjanire.
  • Peuples vaincus.
  • Prêtres et sacrificateurs.

 

La décoration représente ; une grande colonade ornée des travaux d’Hercule et terminée par un Arc-de-Triomphe.

Scène I.

Un bruit de guerre se fait entendre, et une foule de peuple annonce le retour d’Hercule. Ce héros paroît sur un char traîné par les esclaves des différentes nations qu’il a vaincues ; ses compagnons charges des trophées de ses victoires et des riches dépouilles des vaincus, marchent à ses côtés. Des musiciens jouant de divers instruirions consacrés à la guerre, précédent cette marche triomphale. Jolé, Princesse captive est conduite par des Lutteurs ; elle est suivie par des gladiateurs et par des esclaves des parties du monde connu alors. Hilias et Philoclète sont placés sur le char d’Hercule.

A cette marche succèdent des danses guerrières, qui sont interrompues par l’arrivée de Déjanire.

Scène II.

Déjanire accompagnée d’une suite aussi brillante que nombreuse, se jette avec transport dans les bras de son époux. Hilias et Philoclète s’empressent à lui rendre hommage, et les captifs se prosternent à ses pieds.

Hilias, vivement frappé des charmes d’Jolé, conjure Déjanire de s’intéresser à la liberté de cette Princesse ; Hercule se rend à la prière de son épouse ; on détache les fers d’Jolé qui témoigne sa reconnoissance à Déjanire, et qui aussitôt est conduite par Hilias et Philoclète sur une estrade qui fait face à celle sur la quelle Hercule et Déjanire se sont placés.

Les captifs, tant Européens qu’Asiatiques et Africains, déposent aux pieds de Déjanire les différents tributs de leurs climats ; ils l’implorent pour leur liberté ; et l’ayant obtenue, ils se livrent à des danses qui expriment leur reconnoissance autant que leur joye, et dans les quelles le costume de chaque nation se fait distinctement remarquer.

Une esclave Théssalienne et une esclave Asiatique disputent ensemble le prix de la danse ; il est accordé à la Théssalienne qui reçoit des mains de Déjanire un thyrse d’or, orné d’une guirlande de fleurs.

Quatre Lutteurs se défient et se provoquent. Ils s’approchent, ils s’éloignent ; chacun cherche à prendre son avantage ; ils se joignent, ils se saisissent avec fureur. Leurs mouvemens, leurs efforts, leurs entrelacemens, enfin toutes les attitudes, toutes les situations qui caractérisent l’adresse, la souplesse et la force, offrent à chaque instant des grouppes pittoresques. Les vaincus laissent un champ libre aux vainqueurs ; ceux-ci se disputent la victoire ; et celui qui la remporte reçoit des mains d’Hercule, une peau de tigre, symbole de l’adresse, de l’agilité et du courage.

Deux Gladiateurs se livrent au combat : la présence d’Hercule, et la vue des couronnes, que le peuple destine au vainqueur, les anime ; la fureur s’empare de leur âme. Les coups qu’ils se portent, frappent de terreur les spectateurs ; et Hercule accorde pour prix de la valeur un bouclier superbement travaillé.

A ces jeux succèdent des danses guerrières. Hercule, Déjanire, Jolé, Philoclète et Hilias se mêlent à cette fête pour en augmenter la magnificence.

Scène III.

La décoration représente un Superbe sallon du palais d’Hercule.

Déjanire qui a remarqué l’amour d’Hilias et qui a cru découvrir qu’Jolé n’y étoit point insensible, cherche à s’assurer des sentimens de cette Princesse, qui, peu faite à l’art de feindre, lui dévoile ingénuement les secrets de son cœur.

Déjanire, uniquement occupée du bonheur d’Hilias, court à sa rencontre, et lui jure de travailler de tout son pouvoir à une union qui doit faire sa félicité.

Cette action forme un pas de trois dialogué qui peint tout à la fois la reconnoissance des deux amans, et la satisfaction que Déjanire se promet d’un Hymen qui mettra le comble au bonheur de son fils.

Scène IV.

Hercule épris pour le moins autant qu’Hilias des charmes d’Jolé, la cherche avec empressement ; son épouse vole au devant de lui, mais Hercule s’appercevant que son fils et Jolé sont ensemble, conçoit les plus violens soupçons ; il quitte Déjanire et court vers la Princesse dont les dédains et les mépris mettent le comble à sa fureur ; il menace Hilias ; il se dérobe aux empressemens de son épouse ; il vole vers Jolé, qui, méprisant continuellement ses feux, cherche un asyle dans les bras de Déjanire. Cette Princesse vivement frappée de l’indifférence de son époux, et outrée de l’éclat humiliant de sa jalousie, l’accable de reproches ; des reproches elle passe à la fureur ; en vain cherche-t-il à détruire ses soupçons et à la calmer : son amour plus fort que son désaveu, le trahit à chaque instant. Déjanire se livre à tous les excès de la jalousie et du désespoir ; elle tombe évanouie dans les bras d’Hilias et d’Jolé.

Philoclète qui accourt au bruit excité par les mouvemens de cette situation terrible, s’empresse à la sécourir cl à l’arracher d’un lien, qui, à son retour à la vie, ne pourroit que renouveller plus fortement ses douleurs.

Hercule honteux de sa foiblesse et sensible en même temps à l’état de son epouse, exprime toute l’agitation de son ame ; il s’appuie contre une colonne, pénétré tout à la fois de jalousie, de remords et d’amour.

Scène V.

Philoclète reparoît ; il rappelle Hercule à son devoir ; il lui peint avec force le tableau d’une passion qui va ternir sa gloire ; le héros, pénétré de honte et de repentir, ne peut soutenir les reproches dont son ami l’accable ; il lui jure qu’il renonce à son amour, qu’il va rendre son cœur à Déjanire, et qu’il va consentir à l’hymen de son fils et d’Jolé.

Scène VI.

Ces deux amans paroissent : Hercule frémit à leur vue ; l’amour et la jalousie triomphent de sa résolution. Philoclète, qui remarque le trouble d’Hercule, lui retrace encore sa foiblesse ; le héros, sensible à la gloire, hésite, balance, prend la main tremblante d’Jolé, qui ose à peine lever les yeux ; il prend ensuite celle de son fils, et après une irrésolution qui caractérise le combat des passions, qui agitent son ame et qui déchirent son cœur, il unit enfin ces deux amans. Il se précipite aussitôt dans les bras de son ami qu’il regarde comme un asyle où il est sûr de triompher de ses passions.

Hilias et Jolé, enchantés de leur bonheur et pénétrés de reconnoissance, veulent embrasser les genoux d’Hercule ; mais Philoclète entraîne ce héros pour lui épargner un spectacle touchant, qui pourroit de nouveau le faire succomber sous le pouvoir de l’amour, et amollir dans son ame les sentimens de gloire et de générosité qu’il vient de faire paroître.

Scène VII.

La décoration représente une grotte des jardins d’Hercule.

Déjanire qui ignore le retour d’Hercule sur lui-même, se livre à toutes ses inquiétudes ; accablée par l’idée de l’infidélité de son époux ; occupée des moyens qui peuvent le ramener à ses premiers sermons ; absorbée sous le poids de sa douleur ; anéantie par une multitude de réflexions désespérantes qui se détruisent à mesure qu’elles se succèdent, elle tombe sur un lit de gazon, et la tête appuyée sur une de ses mains, elle s’abandonne aux plus tristes pensées. Ses yeux s’appésantissent ; elle s’endort.

Scène VIII.

Junon traverse les airs ; elle est suivie par la jalousie ; elle ordonne à cette fille de l’enfer de répandre ses mortels poisons dans l’ame de Déjanire, et de troubler par ce moyen le bonheur dont cette Princesse va jouir avec Hercule. La jalousie obéit ; elle descend des airs ; elle exhale son venin, elle verse autour de Déjanire ses vapeurs infernales. Cette Princesse, troublée par les idées les plus funestes, exprime par des gestes, les tourmens qu’elle endure ; elle voit Hercule infidèle, elle le surprend dans les bras d’Jolé elle apperçoit cette Princesse sensible à ses feux ; un instant après tenant un poignard, elle semble s’élancer sur elle pour lui percer le sein.

Tous ces tableaux affreux sont tracés par la jalousie Déjanire les peint par l’altération de ses traits, l’expression de ses gestes et l’action terrible qui accompagne son sommeil. La jalousie s’applaudit du désordre qu’elle jette dans l’ame de Déjanire, et le sifflement de ses serpens, (qu’elle approche, avant de se retirer, du sein de cette malheureuse Princesse), annonce sa victoire.

Scène IX.

Déjanire s’éveille ; elle est épouvantée ; son tremblement, la pâleur de son front caractérisent le trouble de ses sens ; effrayée par les songes les plus épouvantables, son action est celle d’une personne, qui doute encore quoiqu’éveillée si elle ne voit pas réellement les objets affreux qui viennent de glacer son cœur.

Dans cette situation elle fuit, court et s’arrête ; mais se ressouvenant tout à coup de la tunique du Centaure Nésus, tunique qui doit avoir la vertu de ramener Hercule à ses premiers sermens, elle conçoit le dessein de la lui envoyer.

 

L’espérance et le calme renaissent dans son cœur ; elle appelle ses femmes, elle demande Lycas, elle lui ordonne de porter à son époux le coffret qu’elle lui confie, et de l’offrir de sa part à Hercule comme un nouveau gage de ses sentimens.

 

Déjanire enchantée de l’effet que produira ce présent, se retire avec ses femmes, en s’applaudissant d’une ruse innocente qui doit cimenter à jamais son bonheur et sa tranquillité.

Scène X.

La décoration représente une forêt mêlée de rocher et terminée par la mer.

Une marche majestueuse annonce l’arrivée d’Hercule ; les sacrificateurs de Jupiter précédent ce héros, qui paroît devancé par ses compagnons ; Hilias et Philoclète l’accompagnent, et les captifs des nations qu’il a vaincues les suivent et terminent cette marche.

Les prêtres ornent l’autel et parent les victimes ; d’autres élèvent le bûcher. On voit déjà fumer l’encens, lorsque Lycas paroît ; ce fidèle esclave se prosterne humblement aux pieds d’Hercule, il lui offre les présens de Déjanire ; ce héros les reçoit avec reconnaissance ; il s’empresse à se parer d’une dépouille d’autant plus honorable, qu’elle est un trophée de ses victoires, et un nouveau gage de la tendresse de son épouse.

 

Il marche à pas lents vers l’autel pour offrir son sacrifice ; mais un feu dévorant circule tout à coup dans ses veines ; il fait d’inutiles efforts, pour détacher cette robe fatale dont le poison subtil a filtré dans son cœur. Ses douleurs s’accroissent ; ses entrailles se déchirent ; il se livre à toute sa rage ; il déracine les arbres ; le malheureux Lycas devient la victime de sa fureur. Hercule s’élance sur lui, l’étouffe entre ses bras, et du haut d’un rocher, le précipite dans la mer ; il revient ensuite, mais ne pouvant plus supporter la violence de ses douleurs, il tombe sans sentiment dans les bras d’Hilias et de Philoclète qui s’empressent à le secourir.

 

Déjanire, bien loin de prévoir le fatal effet de ses présens, accourt pour jouir de leur succès heureux, son étonnement égale sa douleur lorsqu’elle apperçoit l’état déplorable au quel son époux est réduit ; elle vole à lui, elle tombe à ses genoux et tente de se justifier. Hercule la fuit avec horreur, et la regardant comme un monstre altéré de son sang, il ne peut la voir sans sentir accroître ses maux, sa rage et son désespoir.

La situation de Déjanire est affreuse, l’idée d’un crime, quoiqu’involontaire, lui déchire le cœur, les forces d’Hercule diminuent ; il chancelle, il succombe ; il conjure Déjanire de consommer son forfait, et de lui épargner par une mort prompte des tourmens qu’il ne peut plus supporter ; il s’adresse à ses compagnons et à Philoclète, mais les trouvant sourds à ses cris, il se précipite dans le bûcher, et ordonne à son fils de l’embraser ; Hilias frémit et sa main comme son cœur se refuse à un ordre si barbare.

Déjanire ne peut soutenir la vue de ce spectacle ; la perte de son époux met le comble à sa douleur ; elle tire un poignard, s’en perce le sein et tombe expirante dans les bras de ses femmes.

Hilias, effrayé de tant de malheurs, partage ses sentimens entre Hercule et Déjanire ; il veut se précipiter dans le bûcher et unir ses cendres à celles de son père ; puis volant vers Déjanire, il se saisit du fer qui vient de trancher ses jours, pour terminer les siens.

Jolé, Philoclète et les suivans d’Hercule ne sont occupés que de la conservation de ce jeune et malheureux Prince, qui tente alternativement tous les moyens qui peuvent le délivrer de la vie.

Scène XII et dernière.

Le ciel s’entr’ouvre ; Jupiter se montre dans tout l’éclat de sa gloire, accompagné de toutes les divinités célestes.

Hercule renaît de sa cendre ; son bûcher presque consumé se change en un char pompeux, qui élève ce héros vers l’Olympe. En y montant-il remet ses armes à Philoclète. Jupiter le reçoit dans le ciel, et le place au rang des Demi-Dieux.

 

Le calme et la joye succèdent bientôt aux larmes et à la douleur ; et ce ballet se termine par l’Apothéose d’Hercule et par l’union d’Hilias et d’Jolé.