(1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Alceste. Ballet tragique. » pp. 207-218
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(1804) Lettres sur la danse, dernière édition augmentée en 4 vol. Avec les programmes de ballet. Tome IV [graphies originales] « [Programmes de ballets] — Alceste. Ballet tragique. » pp. 207-218

Alceste.

Ballet tragique.

Personnages.

Admète, Roi de Thessalie.

Alceste, épouse d’Admète.

Hercule.

Lycomède, Roi de Scyros.

Ismène, sœur d’Alceste.

Les deux enfans d’Alceste.

Apollon.

Lutteurs et Gladiateurs.

Thessaliens.

Thessaliennes.

Compagnons d’Hercule.

Soldats.

ARGUMENT.

Admète, Roi de Thessalie dont Phère étoit la Capital avoit épousé Alceste, fille de Pélias ; il jouissoit paisiblement des douceurs de son union, de l’amour de son peuple, de la tendresse de ses enfans et de l’estime de ses voisins.

Lycomède, Roi de Scyros, isle très-voisine de Phère, ne peut résister au désir de voir et de connoître un Prince et une Princesse qui réunissoient tant de vertus ; il vient à la cour d’Admète ; Hercule voulant vérifier les éloges que la Renommée publioit, se détermina à faire le voyage de Phère : ces illustres etrangers furent acceuillis avec tous les égards dus à leur rang et à leur naissance. Admète joignit à l’hospitalité tout ce que la magnificence et la générosité, peuvent y ajouter ; il leur donna des fêtes brillantes ; Hercule à l’exemple d’Apollon devient l’ami et le Protecteur d’Admète ; mais Lycomède dont l’ame étoit basse et ingrate, conçut l’horrible projet d’enlever Alceste à son époux ; il dissimula sa passion criminelle, et résolut en secret d’exécuter ce barbare dessein, lorsqu’il en tronveroit l’occasion.

Le public instruit s’appercevra facilement que Lycomède n’est qu’un personnage épisodique, mais qui devient absolument nécessaire à l’exposition et au nœud de l’action, et qu’il en amene le dénouement d’une manière claire et facile, lors-même qu’il n’existe plus et quoi qu’il soit étranger à la suite des événemens.

Première partie.

La décoration représente un vaste péristile superbement orné pour une fête ; les entre-colonnes forment des balustrades couvertes de riches étoffes ; une estrade est élevée sur un des côtés de la scène ; le fond du théâtre représente la mer ; le vaisseau de Lycomède est richement décoré ; d’autres vaisseaux de la flotte paroîssent dans l’éloignement.

La cour que précèdent un brillant cortège, des lutteurs et des gladiateurs, est suivie par les troupes et les compagnons d’Hercule.

Les Princes se placent sur l’estrade qui leur est destinée ; les jeux commencent ; les prix sont distribués ; des danses suivent, ces jeux : les Princes s’associent à cette fête et l’embellissent.

Lycomède, toujours occupé de sa passion ; n’a point renoncé à son imfâme projet ; l’absence momentanée d’Hercule et d’Admète lui en permet l’exécution : il engage la Reine qui a les yeux fixés sur son vaisseau, de vouloir y monter avec sa sœur et ses femmes, pour en examiner l’intérieur. La Reine, vivement sollicitée et par sa sœur et par le perfide Lycomède, accepte la proposition : le traître lui présente la main et traverse le pont qui unit le rivage au vaisseau : mais lorsqu’Hercule et Admète qui surviennent, veulent le suivre le pont s’enfonce et disparoît ; et le vaisseau prend le large. Dans ce moment d’une consternation générale, Admète et Hercule paroissent furieux de cette trahison, et exhalent leur colère ; c’est en vain qu’ils menacent ; c’est en vain qu’Alceste tend les bras vers son époux ; le vaisseau marche et disparoît.

Hercule, qui partage la situation malheureuse d’Admète, lui jure de seconder sa vengeance ; il lui offre le secours de son bras et de ses compagnons. Admète accepte avec reconnoissance ce généreux dévouement. On fait avancer les troupes, elles mettent le sabre à la main, entourent les deux héros et jurent sur la massue d’Hercule et le bouclier d’Admète de combattre jusqu’à la mort et de venger l’affront que Lycomède vient de leur faire. Après ce serment solennel, les chefs et les soldats s’embarquent avec précipitation pour joindre le ravisseur.

Seconde partie.

La décoration représente un paysage aride ; voisin de la mer et de la forteresse de Scyros.

Alceste s’est échappée des mains de son ravisseur ; elle est errante et ne sait de quel coté tourner ses pas ; Lycomède, qui est à sa poursuite, la rencontre, lui déclare sa passion, et lui offre le partage de son trône : Alceste ne répond à ses vœux et à ses hommages que par l’expression du mépris ; Lycomède offensé ose devenir téméraire. Alceste indignée lève le bras pour le frapper ; Lycomède la désarme et ordonne qu’on la charge de fers. Dans ce moment le bruit de la trompette se fait entendre. Lycomède montre de la crainte ; Alceste peint sa joie et menace le ravisseur, qui l’entraîne avec précipitation dans la forteresse.

La décoration représente les fortifications extérieures de la ville de Scyros.

Hercule et Admète paroîssent à la tête de leurs troupes. Ils somment la place de se rendre ; le farouche Lycomède, qui est sur les remparts, ne répond à cette sommation qu’en leur montrant Alceste dans les fers. A cette vue la fureur s’empare des assiégeans : on fait avancer les béliers et les tours mouvantes pour renverser les murailles ; on pose les échelles et l’on monte à l’assaut. Hercule de son bras nerveux brise et enfonce la porte de la ville. Une partie des murailles s’ecroule. On pénetre dans la place. Lycomède fait une sortie, mais il est joint par Admète ; le combat s’engage et devient général. Hercule chasse devant lui toutes les troupes de Scyros ; Lycomède est tué par Admète, mais ce Prince reçoit une blessure mortelle.

Hercule ayant embrasé la ville de Scyros délivre Alceste ; elle voit son ravisseur étendu sur la poussière, et ce premier objet excite sa joie ; mais apper-cevant ensuite son époux dangereusement blessé, elle exprime toute sa douleur. On apporte un brancard formant un trophée des dépouilles des vaincus ; on y place Admète pour le transporter dans ses états. L’armée le précede et le suit au bruit d’une musique lugubre.

Troisième partie.

La décoration représente un paysage orné de quelques tentes.

Admète touchant aux derniers instants de sa vie, s’arrête dans un lieu peu éloigné de sa capitale ; il est placé sous une tente. Tout ce qui l’environne a une nuance lugubre ; mais Alceste exprime son affliction de la manière de plus vive, on voit qu’une douleur profonde brise son ame et déchire son cœur.

Apollon paroît sur un nuage, ce Dieu Protecteur d’Admète, n’a point oublié les actes d’hospitalité que ce Prince exerça envers lui lorsqu’il fut chassé du ciel : par reconnoissance, il a obtenu des parques, que lorsqu’Admète toucheroit aux derniers instans de sa vie, il éviterait la mort si quelqu’un s’y devenoit à sa place.

Ce Dieu jette un poignard au milieu de l’assemblée. Le nuage sur le quel il est assis s’enflamme, et on lit en caractères de feu ces paroles :

Admète, va perdre la vie,
Si quelqu’un ne s’immole pour lui.

Cette inscription consterne l’assemblée ; Alceste se livre aux douceurs de l’espérance. Apollon disparaît. Alceste se saisit du poignard, elle le présente alternativement a ceux qu’elle croit le plus terdrement attachés à son époux ; mais ses amis fuient et l’abandonnent, alors elle prend la noble résolution de se dévouer ; elle ordonne à ses femmes de lui ôter son manteau royal, son diadême, et de lui amener ses enfans. Ils arrivent ; elle les presse contre son sein, elle les arrose des larmes que la tendresse maternelle fait couler, se jette à genoux, élève les bras vers le ciel, et l’implore en faveur de ses fils ; elle les embrasse pour la dernière fois, et ordonne qu’on les éloigne ; puis elle vole à son mari : s’appercevant que les signes de la mort se tracent sur ses traits, elle se frappe et tombe dans les bras de ses femmes.

Hercule et Ismène, qui paroîssent, n’ont pu arrêter le bras d’Alceste. Cette Princesse, avant d’expirer, leur recommande Admète et ses enfans. Ismène exprime sa douleur, et Hercule promet à Alceste d’être l’ami de sa famille. Cependant l’oracle est accompli ; le sacrifice est consommé : Admète revoit la lumière et recouvre graduellement sa santé ; il se lève, il chancèle, il apperçoit Hercule, marche vers lui et se jette dans ses bras ; son premier soin est de lui demander Alceste. Hercule ne répond que par un geste, qui exprime son affliction : Admète allarmé le conjure, le presse de s’expliquer. Hercule lui avoue que son épouse s’est devouée à la mort, pour lui conserver la vie, et il la lui montre entourée de sa sœur, de ses enfans et de ses femmes ; Admète s’approche de ce tableau avec effroi, et se précipite aux genoux de son épouse ; mais la voyant sans vie, il se saisit du poignard, et veut se frapper ; Hercule lui arrête le bras, le désarme et lui promet de descendre aux enfers, de ravir son épouse à l’empire de Pluton et de la rendre à sa tendresse : Hercule se jette à genoux, étend ses bras vers le ciel et supplie Jupiter de lui accorder cette nouvelle victoire, Le Maître des Dieux est sensible à la prière de son fils ; la foudre gronde, l’éclair perce la nue ; le Tonnerre frappe la terre : elle sentrouvre et offre une route à Hercule. L’Amour paroît avec son flambeau pour le guider et éclairer les pas du héros, il embrasse Admète, le confie aux soins de ses compagnons, à la tendresse de tout ce qui l’entoure et descend aux enfers.

Quatrième partie.

D’un côté la décoration représente les antres de l’enfer ; l’autre partie de la scène offre les Champs Elisées.

Hercule pénétre dans l’empire des morts ; mais Cerbère, ce monstre à trois têtes, s’oppose à son passage. Hercule le combat, le terrasse, et l’enchaîne. De cet antre il porte ses pas vers les Champs Elisées : parmi les ombres heureuses qui s’offrent à sa vue, il croit distinguer Alceste ; il l’éloigne de ses compagnes, lève le voile qui dérobe ses traits la reconnoît et l’emméne ; mais la troupe infernale s’oppose à ses desseins ; les farouches Euménides s’élancent sur lui et ne peuvent lui ravir sa proie. Il dompte leur fureur et les disperse : les Démons font d’inutiles efforts pour lui arracher Alceste. Hercule lutte contre eux, les terrasse, et enlève l’épouse de son ami.

Cinquième partie.

La décoration représente un bosquet des jardins d’Admète.

Admète est entouré des Dames de la Cour ; elles s’empressent par leurs jeux de dissiper les inquiétudes et l’impatience de ce Prince. Il les engage à s’éloigner et à le laisser jouir un instant des douceurs de la solitude.

Comme elles se disposent à obéir, la terre s’en-trouvre ; on voit Hercule, l’Amour et l’Hymen grouppés à l’entour d’Alceste qui est endormie. Admète s’approche avec précipitation, se jette aux genoux de ces Divinités protectrices. Alceste ouvre les yeux, voit son époux et se jette dans ses bras : l’Hymen rallume son flambeau à celui de l’Amour ; Admète et Alceste se prosternent aux pieds de ces Immortels, et expriment vivement à Hercule leur reconnoissance.

Apollon, n’ayant point oublié les égards et les services qu’Admète et Alceste lui rendirent, veut être témoin du bonheur de ces époux.

L’horison s’entrouvre : le jardin disparoît et fait place au Palais brillant du soleil(1) : Apollon est assis sur un trône éclatant ; ce Dieu veut se montrer dans toute sa gloire : les Astres, les Constellations, les Heures, les Muses et les Arts l’environnent : Admète et Alceste se prosternent, et lui expriment leur gratitude. L’Amour a appelé les Jeux, les Ris, les Plaisirs et la Cour enjouée de Vénus : ils arrivent et s’empressent de célébrer par leurs danses la félicité des deux époux.

FIN.